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4) EGLISE, LIEU DE CULTE
Préambule
Au XVIIIème siècle, l’église, lieu de culte, est un bâtiment relativement ancien.
Si l’on remonte au début du Moyen Age (fin Xème et début XIème siècles), le Béarn voit plusieurs églises se construire selon le style roman, telles que celles de Morlaàs, de Lescar… Parallèlement, à côté des monastères (Lucq, Larreule), se dressent des églises (église de Miossens…) avec des noyaux urbains. Ce sont autant de grands bâtiments que de petits, tels que l’on peut observer dans les villages, Simacourbe par exemple. Par la suite, le pèlerinage de Saint-Jacques-de- Compostelle, a un impact en Béarn. Le long des chemins (trois des quatre grandes voies y circulent, plus les chemins secondaires), on bâtit des hôpitaux (Lescar, Saint-Blaise, Orion…), des commanderies (Gabas, Mifaget…) et, bien entendu, des églises. Autres facteurs à énumérer, l’essor démographique et économique. Le XIIème et la première moitié du XIIIème, l’art roman s’implante alors vraiment. De plus, outre le pèlerinage, un mouvement imprègne le développement des lieux de culte, la Reconquista, dans laquelle les vicomtes de Béarn (pensons à Gaston IV dit le Croisé) s’investissent pleinement (donations, pillages). Rajoutons un autre facteur d’influence, celui des abbés laïques.
Au début, un propriétaire terrien édifie une chapelle, puis il nomme un desservant, et, enfin, dans le but d’entretenir ce bâtiment, il perçoit une partie des revenus qui lui sont alloués. Lorsque la localité naît, une église remplace cette chapelle généralement attenante au château. Elle change de statut et devient une église paroissiale. A quoi, il faut adjoindre la création de centres de mises en valeur dus à la période de prospérité, à partir de la fin du XIème siècle, tels les castelnaux et les sauvetés. Le but est d’enraciner les individus attirés par l’obtention d’un habitat, d’un enclos (casal pour les sauvetés) ou d’un statut plus valorisant, à charge pour eux de défricher des terrains incultes.
En quelques mots, les sauvetés, ce sont des villages qui apparaissent en se groupant autour d’une église, notamment à partir des XI et XIIème siècles. L’Eglise tente de développer la pratique du droit d’asile et l’institution de la Paix de Dieu. L’espace de ces sauvetés est matérialisé par des bornes surmontées de croix. Tout individu pénétrant dans cet asile est sauvé. Pensons à Sauveterre-de-Béarn, Sauvelade qui ont préservé leurs noms d’origine médiévale. Par peur de voir partir leurs paysans et pour mieux les exploiter, les seigneurs copient cette initiative. Nous sommes alors à une époque dans laquelle l’autorité publique s’émiette en de multiples pouvoirs locaux. En quelques mots, les castelnaux sont de petites agglomérations qui s’implantent au pied d’un château (mottes castrales), souvent enserrées dans une enceinte. Plusieurs villages gardent la trace de cette création, Castet, Castetpugon, Castetis… Ce développement a lieu après une période, les IXème et Xème siècle, dans laquelle la population est plutôt dispersée.
En ce qui concerne le style gothique, notamment lors des derniers siècles du Moyen Age, les XIVème et XVème siècles, peu d’églises sont édifiées (Monein) si ce n’est que l’on se contente de réaliser des ajouts. Il est à noter que l’art gothique en Béarn s’est implanté tardivement, plutôt vers le XIVème siècle.
Les bastides (latin « bastida » : construire), comme les castelnaux et les sauvetés, sont des noyaux agglomérés, mais elles apparaissent en Béarn dans les années 1230 et 1250, et se prolongent jusqu’au XIVème siècle, lors de l’essor de la fondation des Villes neuves, de l’accroissement des échanges économiques, à l’époque. Elles sont le fait de seigneurs, en Béarn, par le vicomte, ce dernier cherchant à faire du Béarn une entité politique. La première date de 1278, Bellocq, en 1281, Bruges, en 1357, la dernière Labastide-Monréjeau datant d’environ 1380, autant de bastides créées dans le piémont, en bordure avec les possessions anglaises à l’ouest, des comtes d’Armagnac et aux débouchés des vallées montagnardes, plus autonomes. Ici, le caractère militaire s’explique, peur de probables invasions, mais aussi, là, seulement le souci de coloniser, comme à Labastide-Montréjeau. Le seigneur dote alors la bastide d’une charte de franchises pour la rendre attirante aux « poblans ». L’église, avec la place, constituent les deux éléments essentiels. L’implantation de l’église est parfois choisie d’élément de défense, comme à Bellocq ou à Nay, où elles sont construites à la limite du site. Peu se trouvent accolées sur la place. Autre fonction qu’on lui alloue occasionnellement, la préservation des trésors et des textes comme la charte de fondation. En parallèle avec ces édifications de bastides, à partir du XIIème siècle, se joint un courant religieux propice à l’éclosion d’églises, les ordres mendiants. Les Cordeliers s’implantent, par exemple, à Morlaàs à la fin du XIIIème siècle.
La place de marché revêt une grande importance pour toutes ces créations de centres urbains et donc d’églises.
Christian Desplat rappelle que plusieurs bâtiments religieux ont été édifiés lors de la seconde moitié du XIe siècle et du XIIe siècle. Pour lui, le XVIe siècle, « siècle de la Réforme », constitue « un renouveau de l’architecture religieuse en Béarn. Entre la fin du XVe et la fin du XVIe siècles, quarante édifices au moins furent édifiés ou très profondément remaniés ; dont la moitié au cours de la première partie du siècle. » Le style flamboyant est employé « entre Nay, Bruges, Sainte-Colome et l’Ossau. »[1]
Le style renaissance se répand à travers des éléments décoratifs tels des portails (Lembeye, Monein…), des fenêtres (Baleix).
Plusieurs édifices religieux ont subi des dommages au XVIème siècle lors des guerres de religion. L’armée de Mongoméry s’illustre en saccageant, en détruisant des églises, des monastères en 1569. L’élément le plus visé dans les bâtiments religieux est le clocher, on le détruit car, en matière militaire, il constitue un bon moyen de surveillance et de défense. Au XIXème siècle, de nombreux clochers seront reconstruits ou édifiés. On peut citer les églises d’Asson, d’Igon comme exemples de bâtiments brûlés, mais aussi les abbayes de Sarrance, d’Orthez. Les tombeaux des princes souverains béarnais, dans la cathédrale de Lescar, sont dégradés. Tous les bâtiments religieux, tels les chapelles et les églises qui ne sont « point d’une structure assez solide pour tenir contre l’impatience des réformateurs, étaient abattus et rasés jusqu’aux fondements »[2]. Jeanne d’Albret, protestante, après avoir instauré le calvinisme, religion d’Etat (1566-1599) s’attaque aux biens de l’Eglise catholique béarnaise en les confisquant et en les intégrant au patrimoine de la vicomté.
Le 22 septembre 1570, Jeanne d’Albret prend un édit iconoclaste, propre au protestantisme, en ce qui concerne les funérailles « …qu’il ne se tiendra aucune image de peinture ni de sculpture, ni se mettra de croix, ni draps sur les morts, qu’aucune personne n’ait à chanter aucun chant qui ne soit à l’honneur de Dieu. » Plus particulièrement concernant les lieux de culte catholiques : « …les églises encore qui sont ruinées seront entièrement défaites et les murailles en même temps et le bois et trésor des dites églises seront vendus… » [3]
Afin d’illustrer ces propos il suffit de rappeler qu’une unique église dans la vallée de Barétous ne remonte actuellement qu’au-delà du XVIIème siècle. Heureusement, il subsiste de ces églises romanes dégradées quelques éléments, comme le chevet par exemple.
A l’opposé les lieux de culte conçus avec des matériaux plus solides ont davantage résisté.
Lors des XVIIème et XVIIIème, on tente d’effacer toutes ces destructions. On restaure, ou si les dégâts sont trop importants, on édifie un nouveau bâtiment religieux. Ceux qui s’en chargent sont notamment les communautés religieuses. A Oloron, les Cordeliers sont à l’œuvre, à Sarrance ce sont les Prémontrés, à Arthez les Augustins.
Ailleurs, ce sont les évêques qui se lancent dans cette tâche ; pensons aux évêques d’Oloron Joseph et François de Révol. Au premier, on doit l’introduction dans les églises de plusieurs retables. Au second, la cathédrale Sainte-Marie s’est agrandie de quatre chapelles rayonnantes doublant les bas-côtés.
Si certaines restaurations sont réalisées rapidement, comme à Igon au début du XVIIème, d’autres traînèrent en longueur. A Pontacq, par exemple, les travaux s’échelonnent de 1606 à 1783, à Bruges, même constat, on entreprend à des remédiations les plus pressées mais elles continuent vers 1780. Ou encore l’église de Luc-Armaud qui est réparée globalement en 1642, mais qui devra attendre 1749 pour voir son clocher restauré. Malheureusement, des hôpitaux furent laissés à l’abandon. A Garlin, l’hôpital de la Madeleine disparaît.
Les causes de ces retards sont multiples : l’ampleur des destructions, les rénovations nécessaires de bâtiments religieux anciens qui s’ajoutent aux précédentes.
Victor Allègre regrette que les XVIIème et XVIIIème siècles aient revêtu pour certains décideurs l’occasion de profiter de ces aléas pour détruire des édifices anciens « que l’on sacrifia au goût du moment… La plupart se trouvent évidemment dans les vallées ravagées des gaves de Pau et d’Aspe, en Soule, etc….»[4]. Le même auteur écrit que ces « retables et ces chaires » réalisés lors de la période qui nous intéresse « sont les œuvres d’artisans organisés en véritables ateliers, parfois très renommés, sculpteurs locaux comme Pradines d’Izeste, Dartigacave de Sainte-Marie d’Oloron (auteur du retable de l’église Sainte-Croix), Jérôme Ribère (qui travaille pour Arette, Arros, Bedous, etc… au XVIIIème siècle), citons encore les Caron, de Lescar (auteurs du chœur sculpté de la cathédrale), les Ferrère, d’Asté, artistes de père en fils ; Guillaume Navarret, maître sculpteur de Lescar (peut-être Espagnol), fit le retable de Bruges, etc…. »[5].
En compulsant la « Revue des Etudes Historiques et Religieuses » on est informé que les évêques lors de leurs visites épiscopales sont navrés de l’état délabré de plusieurs églises, comme par exemple celle du village de Salles-Montgiscard[6]. Le 22 avril 1739, on note qu’il y a : « un trou dans le mur, au levant, qui répond au dessous du sanctuaire. Avons ordonné qu’il fût muré, dès aujourd’hui, pour mettre fin à la superstition où on étoit d’y faire passer les enfants à la mamelle pour les empêcher de pleurer ».
L’Intendant Lebret, lui-même, mentionne que la cathédrale de Sainte-Foy « menace ruine ».
La Révolution de 1789 a continué à faire subir des outrages à ces anciens bâtiments. En 1793, le représentant en mission de la Convention Monestier, ex-prêtre et défroqué (ancien chanoine de Saint-Pierre de Clermont, envoyé par le Puy-de-Dôme), est chargé de déchristianiser la région. Il transforme les églises soit en salles d’assemblées populaires soit en Temples de la Déesse Raison ou, enfin, il décrète leur fermeture. Ce qu’il entreprend, le 29 ventôse 1794, en ce qui concerne l’église de Nay. De plus, il pousse la population à la piller, à détruire toutes les images pieuses et la statuaire. Il est aidé en cela par la Société populaire qui avait entrepris avant sa venue de fustiger ce symbole d’un « fanatisme » certain à travers des déclarations La Société populaire de Nay est fière, lors de la présence de Monestiers, d’affirmer que «… dans un moment, tous les hochets de la superstition et du fanatisme disparaissent : toute la séquelle des saints sont foutus par terre et le génie de la liberté leur assigne un emploi, celui de faire du salpêtre… »[7]. L’église est ensuite convertie en temple de la Raison.
Dans le réquisitoire de l’agent national du district de Pau, le quatrième article décrète : « L’invitation aux habitans des communes de prendre en possession des ci-devant églises pour y établir des temples voués à la raison, où l’on célèbrera les décades, et où les sociétés populaires tiendront leurs séances.»[8]
Autre document montrant le passage de statut de l’église Saint-Martin en temple de la Raison. Dans une lettre du représentant Monestier écrite à Pau, le 12 ventôse de l’an II (2 mars 1794) on lit dans l’article 1 : « De retirer de la cy devant Eglise de St Martin tous les meubles et effets consacrés au cy devant culte catholique… », dans l’article 2 : « De constater dans une délibération qui d’après le vœu des républicains de Pau réunis en masse d’abord dans la Société populaire ensuite dans la ci devant Eglise de St Martin, et édifice sera désormais consacré sous le nom de temple de la raison pour y célébrer le culte des hommes vertueux et républicains et pour servir provisoirement le lieu de séance aux sans culottes qui composent la société populaire régénérée de Pau. » et dans l’article 6 : « … chaque decadi, un officier municipal en écharpe lira dans ce temple pendant la mauvaise saison et dans les mauvais jours les lois et les décrets qui dans les beaux jours seront à l’autel de la patrie; cette lecture sera suivie d’une explication brève et claire… »
Cette lettre est adressée au conseil général de Pau. Pour terminer mentionnons l’article 7 qui décrit le déroulement de la fête. « Cette fête civique sera toujours précédée de chants républicains et terminée également par des hymnes patriotiques, et par les cris vifs et souvent répétés de vive la république une et indivisible autant que faire se pourra la Société réunira ou des tambours ou des musiciens de Bataillons ou de garde nationale, ou des musiciens amateurs qui iront prendre les sans culottes dans la salle de la société ou les municipal et l’administrateur du district revêtu de son cordon auront le soin de se rendre. La marche partant de là les républicains traverseront les rues les plus importantes pour avertir et recueillir les bons citoyens et citoyennes.»[9]
Même procédé pour les cathédrales de Lescar et d’Oloron où on les dépouille des statues, des objets précieux… Après leurs « forfaits », les « coupables », contents d’avoir rempli une juste cause procèdent à fêter l’événement comme à Lescar le 9 avril 1794 en dansant la Carmagnole sur la place la Hourquie, nouvellement débaptisée place de la Liberté[10].
Ailleurs, notamment à Lescar, on plante l’arbre de la Raison, le décadi 23 février 1794, face à la cathédrale. Avant la venue du représentant Monestier, le 7 mars 1794, on marque sur la façade du bâtiment : « Temple de la Raison ». La conversion est établie.
A Bétharam, lors de l’installation du culte de la Raison, les participants s’en prennent aux lieux de culte puisque l’église est pillée, le calvaire est détruit[11].
Les destructions touchent comme on le voit outre les bâtiments, les statues, les clochers du fait du symbole qu’ils incarnent, le mobilier comme le confessionnal, les croix, les vases, les tableaux… Tout ce qui est métaux précieux, or et argent, sont privilégiés. En ce qui concerne les cloches (signes extérieurs du culte catholique), les paroisses ont le droit d’en garder une seule jusqu’en mars 1794, date à laquelle il est décrété que l’on conserve uniquement celle sonnant l’heure.
Prenons un exemple de mesure prise au sujet des cloches par l’agent national de Pau. Dans son réquisitoire daté du 3 mars 1794, il décrète dans l’article 1 : « Je requiers une invitation aux municipalités pour la descente définitive des cloches qui ont resté dans chaque commune. », dans l’article 2 : « Pour la démolition de tous les clochers des ci-devant églises, et la conversion de celles de cette commune en magasins de fourrages, ateliers d’armes, et fabriques de salpêtres.»[12]
Ce qui intéresse les révolutionnaires est de récupérer le bronze afin de le fondre pour fabriquer des canons. D’abord, c’est la fonderie d’Orthez qui en a la charge, ensuite elle est dévolue à la fonderie des canons de Tarbes. La totalité des cloches apportées aurait permis de récupérer cinquante mille livres.
Autre matériau recouvré, la corde, la marine en bénéficiera.
Certaines paroisses choisissent de ne pas appliquer les décrets. On connaît les noms de Maslacq et de Denguin Ces décrets datent du 12 ventôse 1793 (fermeture des églises paloises), du 26 germinal 1794, du 2 ventôse 1794…
Prenons l’exemple de celui du 26 germinal an II (15 avril 1794) pris par le représentant du peuple dans les « départemens des Hautes et Basses-Pyrénées ». En préambule, il est écrit : Considérant que les progrès rapides de la raison dans ces départemens, sont tourner chaque jour, au profit de la République, les matières d’or & d’argent qui y servoient aux momeries de la superstition & du fanatisme; & qu’il en résulte une branche nouvelle de comptabilité, pour la marche & la garantie de laquelle il importe d’établir des règles positives & appropriées aux localités & aux circonstances ; ARRÊTE : Article Premier. Toutes les matières d’or & d’argent provenantes des églises des départemens des Hautes & Basses-Pyrénées, quels que soient les lieux où elles ont été provisoirement déposées, seront versées, sans délai, dans les caisses des payeurs-généraux »[13].
Dans le district d’Orthez, en 1795, dix-neuf cloches sont « sauvées » sur trente-sept[14].
La décision de détruire les clochers ne fut pas totalement appliquée, seule la fermeture des églises le sera.
Son zèle le poussera à faire arrêter et exécuter le curé de Bénéjacq qui s’était opposé à la profanation de son église.
Le 2 juillet 1794, un décret déplace le représentant Monestier dans le département des Hautes-Pyrénées. Cette décision a pour effet de ralentir « le zèle » des Béarnais « avant la fin du Gouvernement révolutionnaire, le clergé était à peu près partout rétabli dans le département, la masse de la population n’ayant pas été convaincue par les efforts de déchristianisation des représentants en mission »[15].
Quelques notions sur les églises en général
A partir du IVe siècle, à la suite de la reconnaissance de la religion chrétienne par l’édit de Constantin en 313, l’édification de nombreuses églises s’accélère. Le plan d’une église catholique s’inspire de la basilique romaine, à la fois marché couvert (rectangulaire et couverte d’une charpente et d’un plafond en bois), salle réunion, bourse de commerce et siège du tribunal (abside, seule partie voûtée en pierre). Au sujet de la couverture de la surface construite, les Romains utilisent l’arc en plein cintre et la voûte en berceau. La basilique est constituée d’un rectangle, le plus souvent divisé en trois nefs par des colonnades. Une des raisons de cette copie est la possibilité de recevoir de nombreux fidèles. L’ajout consiste à modifier ce plan en intégrant le transept lui donnant la forme d’une croix, symbole de la Passion du Christ. Lors du Haut Moyen Age, à la fin des invasions germaniques, la prospérité revient et entraîne l’accroissement de la population.
L’église sert à la fois de maison de Dieu (chœur où les prêtres célèbrent la messe) et de maison des fidèles.
a- L’art roman
Dans le style roman, les forces des murs et des voûtes sont dirigées du haut vers le bas alors que dans le style gothique, c’est l’opposé puisqu’il s’agit de s’élancer vers le ciel, la lumière. Vu que le poids de la voûte, énorme, tend à écarter les murs sur les côtés, on les épaule par des arcs-boutants. Cette voûte existe à l’époque romaine (thermes, amphithéâtres) mais les Carolingiens l’utilisent aux cryptes et aux absides en culs de four. Sa généralisation se produit par la suite. Autre solution, ériger des voûtes selon le principe de l’arc clavé. On taille les pierres, nommées claveaux, et on les ajuste entre elles, puis on place la clé de voûte au sommet. Cette dernière voit son poids peser vers le bas, mais comme la largeur des claveaux est plus large en haut qu’en bas, l’ensemble se tient vu qu’ils se calent entre eux.
Eglise de Saint-Laurent à Sévignacq-Thèze : milieu du XIIe siècle, style roman.
- Au sujet du plan, d’après Fernan Schwarz[16] on peut le subdiviser en deux :
* au sol, la nef correspond au Monde souterrain, le transept à la Terre et le chœur au Ciel.
* verticalement, la crypte équivaut au monde souterrain, le sol à la Terre et les voûtes au Ciel.
En ce qui concerne le Monde souterrain, l’auteur écrit qu’il ne faut pas le confondre avec l’Enfer, il s’agit du milieu où « se nourrissent les racines des êtres ». La crypte « est liée aux mystères de la résurrection et de la transmutation », coïncide aussi aux « baptistères des premiers sanctuaires chrétiens ».
* Le plan suit le corps de l’homme : la tête se réfère à l’autel, le cœur à la croisée du transept, les pieds et les mains aux portes. Si l’entrée de la basilique civile romaine se trouve sur le côté, celle d’une église se situe sur une partie la plus courte, ce qui confère au bâtiment sa forme d’un vaisseau qui dirige les yeux du fidèle vers l’abside, l’Est, le lieu de la divinité.
* le plan suit depuis surtout le IIIe siècle l’orientation du lever et du coucher du soleil. L’Est représente la victoire de la lumière et de Jésus sur les ténèbres. C’est de l’Est que le Christ viendra à la fin des temps. A partir du XIIIème siècle, la tête de l’église indique l’Est, vers le soleil levant et, par conséquent, vers la résurrection et non pas vers Jérusalem comme cela est écrit souvent. Le sanctuaire est ainsi éclairé le matin aux heures des offices majeurs.
- Systématiser les voûtes de pierres (qui existaient à l’époque romaine) dès la fin du Xème siècle, utiliser les arcs-doubleaux afin de séparer les voûtes. Néanmoins, les charpentes de l’architecture carolingienne et les plafonds de bois perdurent encore, notamment dans l’Ouest de la France.
- Lors du premier art roman, l’appareil est d’apparence rustique de pierres cassées en usant des marteaux et des pics. Les colonnes rondes apparaissent dans les cryptes et les déambulatoires, mais moins systématiquement dans les nefs auxquelles on préfère la forme carrée ou rectangulaire. Vers l’an mille, on introduit les colonnes engagées.
Les causes de l’adoption de la voûte de pierre sont multiples. Une durée plus longue équivalente à l’idée d’éternité (pierre est considérée comme un matériau noble), l’allusion à la sphère céleste, des chants bénéficiant d’une meilleure acoustique, une réponse relative aux incendies sont autant d’atouts.
Les voûtes sont d’abord élaborées dans les cryptes jusqu’au XIème siècle, la nef et le transept sont couverts d’une charpente. En effet, le plafond plat est présent lors du premier âge roman et par conséquent lors des Xème et XIème siècles. Par la suite, lors du second âge roman au XIIème siècle, l’usage de la voûte en berceau s’applique sur les nefs centrales tandis que la croisée d’arêtes, ancêtre de la croisée d’ogives, est affectée sur les bas-côtés (elle concentre les forces sur des points auxquels s’appuient les contreforts).
Le souci des architectes de la période correspondant à l’art roman est de se préserver de tout écartement des murs. Pour y parvenir, ils les épaississent, ils élaborent une voûte à poussée continue et comme ce sont des murs porteurs, ils élaborent des ouvertures peu nombreuses et étroites et, enfin, ils leur adjoignent des contreforts.
Pour soutenir ces murs épais, des fondations de 10 m de profondeur (parfois même 40 m) sont creusées, ce qui correspond à un tiers de la hauteur des édifices.
Pour protéger les voûtes de pierres, on les recouvre le plus souvent d’une charpente de bois, elle-même couverte d’une couverture de tuiles ou autres matériaux étanches.
- Les différents éléments architecturaux d’une église correspondent à des fonctions particulières :
* portail = souvent 3 entrées correspondent à la nef et aux bas-côtés, allusion à la trinité. L’entrée se situe lors des XIème et XIIème siècles à l’ouest. Leur ornementation sculpturale date principalement de la première moitié du XIIème siècle. En Béarn, en raison du climat (pluie, vent…), les portes sont généralement disposées sur le mur sud, protégées parfois par un auvent.
Eglise Saint-Laurent à Sévignacq-Thèze : portail datant de 1150 environ, sculpté dans du grès exception du tympan qui est en calcaire et qui représente Jésus assis avec à sa droite Saint-Pierre recevant les clés et, à sa gauche, Saint-Paul prenant le phylactère contenant un texte de l'Evangile.
Cathédrale Sainte-Marie à Oloron-Sainte-Marie : portail roman du XIIIe siècle.
* façade = 2 tours l’encadrent souvent (origine : Normandie au XIème siècle), elles sont munies de flèches par la suite depuis le XIIème siècle. Elles évoquent la voie vers le ciel. Une grande rose sert d’ouverture indiquant l’axe de l’église, une galerie court souvent horizontalement.
* narthez = abrite depuis le Vème siècle les catéchumènes (initiés à la foi chrétienne avant le baptême et qui ne pouvaient pas pénétrer dans l’église), les pénitents et les pèlerins de passage. Il correspond à un porche. Les fonts baptismaux y sont placés après la porte, symbolisant la renaissance des baptisés à une vie nouvelle (et la résurrection de Jésus). Ils marquent l’introduction dans le temple divin et dans l’Eglise (communauté des fidèles). Le bénitier permet aux fidèles de raviver cette dite résurrection.
* nef (vaisseau) = partie ouverte aux fidèles (qui restent debout) entre le narthez et le chœur. La nef et le transept sont parfois divisés en plusieurs vaisseaux nommés bas-côtés ou collatéraux. Ces derniers ont une hauteur correspondant le plus souvent à la moitié de la nef centrale.
* coupole = connue avant le Moyen Age, elle surmonte les parties des bâtiments à contrebuter. A la suite de la Première Croisade, une mode orientalisante se diffuse en Europe et la coupole en fait partie (église orientale en croix grecque). Elle se dresse sur un plan carré et est surmontée d’un clocher dont son poids a l’avantage d’annihiler les forces obliques de la coupole.
* chœur = réservé aux ecclésiastiques et aux choristes, l’autel y est placé et lui confère un caractère sacré. Le chœur est rehaussé par quelques marches (rappelant le sommet de la montagne à laquelle se tient Dieu). Dans les cathédrales, le trône épiscopal s’y dresse. Le chœur est parfois clôturé par un jubé ou une clôture de chœur, plus élevée (ou chancel, barrière basse) l’isolant des fidèles entre le XIIIème siècle et le XVIème siècle.
* Transept =: nef perpendiculaire à la nef centrale donnant à l’église la forme d’une croix. Le carré qu’il dessine symbolise les quatre éléments du monde (air, feu, terre, eau). On le rencontre majoritairement dans les grandes églises et rarement dans les petites. Des portails sont souvent aménagés dans les bras du transept pour permettre de pénétrer dans le bâtiment.
* chevet = date dès l’époque carolingienne, un déambulatoire et des chapelles rayonnantes le parcourent permettant aux fidèles de contourner le chœur. Il a un tracé semi-courbe. Les chapelles rayonnantes, dans l’art roman, sont détachées les unes des autres, on les sépare, par exemple, par des murs. Par la suite, dans l’art gothique, on agit à l’opposé en les rapprochant.
* Crypte = n’existe pas partout et qui est édifiée fréquemment sous le bâtiment. Utilisée d’abord pour placer une sépulture afin qu’elle soit vénérée. Ultérieurement, des reliques y sont disposées afin que les fidèles puissent s’y recueillir, mais aussi pour éviter les vols, les incendies. Ces églises inférieures, du fait de l’importance grandissante du culte des reliques, sont de plus en plus vastes, ce qui explique la présence de chapelles rayonnantes, plus nombreuses, et de déambulatoires permettant leur accès. En Béarn, une seule église est dotée d’une crypte, celle de Mifaget.
Crypte de l'église romane de Saint-Michel (construite en 1114) à Mifaget : halte sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, crypte circulaire et voûtée, éclairée par 3 petites fenêtres. On y invoquait "sent Plouradou" (saint Pleureur) afin de guérir les enfants pleurnichards.
* Clocher = apparaît approximativement au VIème siècle, il revêt plusieurs fonctions, celle bien entendu d’abriter une ou des cloches mais également de symboliser la puissance. Autre rôle, important lors des périodes troublées, celui de servir de poste d’observation.
Quelques clochers se singularisent. Proches de la Soule, certains d’entre eux ont la particularité de présenter trois toits, on les appelle « clochers trinitaires ». Ils sont plats (clochers-murs), rehaussés par trois pics, eux-mêmes surmontés quelquefois de croix. La référence à la Trinité (Père, fils et Saint-Esprit) est manifeste. Parfois, le clocher du milieu se dresse plus haut, on le surnomme alors clocher-calvaire, allusion à la Crucifixion de Jésus et aux deux larrons qui l’encadrent. Ils seraient édifiés postérieurement aux guerres de religion. Les églises de Viellenave-de-Navarrenx, d’Agnos offrent de beaux exemples.
Viellenave-de-Navarrenx: clocher trinitaire.
Vue arrière du clocher trinitaire de l'église de Viellenave-de-Navarrenx.
Dernière catégorie de clocher analysé, le clocher porche. Il est accolé au bâtiment principal, le rez-de-chaussée sert d’entrée de l’église. Ses fonctions sont multiples, lorsque les habitants de la localité souhaitaient donner à leurs contrats, leurs serments un caractère solennels, on passait « sous le clocher ». Le curé recevait dans ce lieu les femmes en retour de couche, les nouveau-nés, le catéchumène… Il pouvait abriter les mendiants, les passants, mais également les pénitents qui ne pouvaient pas assister que de loin aux offices religieux. Le prêtre y pratique l’exorcisme pour chasser le démon. Lorsque la justice était rendue sur le parvis des églises, les juges se protégeaient des intempéries sous le porche. Les cordes servant à faire sonner les cloches y pendaient. Lorsqu’il est assez vaste, il sert de lieu de marché, d’assemblées…
Eglise Saint-Vincent (XIe siècle) à Lucq-de-Béarn : tour du clocher-porche du XVe siècle conservant des éléments défensifs (trous de hourdage...).
Eglise Saint-Laurent à Sévignacq-Thèze, milieu XIIe siècle : clocher-mur.
Ces édifices religieux étaient ornés de peintures à l’intérieur et à l’extérieur. Très souvent, elles ont disparu, car elles sont réalisées « a Tempera », c’est-à-dire que l’on fixe des pigments sur un enduit sec à l’aide de colles. Mais les pigments, avec le temps, tombent. A côté de la peinture, la sculpture orne les portails, les chapiteaux et les modillons. Outre leur fonction décorative, la peinture et la sculpture jouent un rôle éducatif (vie de Jésus, de la Vierge et des saints, préceptes moraux chrétiens). Elle est destinée aussi à émouvoir les fidèles qui sont en majorité illettrés.
Eglise Saint-Michel à Montaner : fresque murale du Jugement dernier du XVe siècle.
Fresque murale de l'église Saint-Michel à Montaner : Immaculée Conception de Marie, au milieu de symboles bibliques. Elle fait partie de peintures murales, datant du XIVe au XVIe siècles, qui recouvrent l'arrière de l'autel.
b- L’art gothique (ou l’ « art français »).
Les architectes, à partir du début de la seconde moitié du XIIème siècle, se lancent dans des conceptions novatrices, motivés notamment par le souci d’éclairer les sanctuaires. Ils optimisent les techniques anciennes (à Sens, Noyon…).
La croisée d’ogives qui suit la voûte d’arêtes voit son prototype apparaître dans la région anglo-normande avant 1100 (cathédrale de Durham) puis se manifeste en Ile-de-France entre 1180 et 1220. L’usage de l’ogive est attesté au Xème siècle. Les architectes arméniens, musulmans, adoptent des systèmes d’arcs pour porter les voûtes.
Les ogives sont des arcs qui se croisent et reportent le poids du centre de la voûte vers les quatre supports. De plus, ils appuient moins intensément sur ses supports. Ces arcs brisés et ces voûtes sur nervures croisées occasionnent des poussées moins importantes non sur des murs, mais sur des piliers. La voûte en berceau d’un seul tenant est donc substituée par une enfilade de travées en voûtes d’arêtes renforcées par les ogives ou nervures. Par conséquent, la voûte d’ogives sur arcs brisés libère les murs portant des gouttières (appelés gouttereaux). L’intérêt est de permettre d’ouvrir de grandes baies. Mais il est essentiel que les forces obliques soient contrebutées par des arcs-boutants situés à la hauteur de la voûte centrale et à l’extérieur de l’édifice. Des pinacles couronnent les culées des arcs-boutants avec des gargouilles servant à décorer et à évacuer l’eau de pluie. Les voûtes de plus en plus s’allègeront, de même que les arcs-boutants ce qui soulage la structure permettant aux architectes d’édifier des bâtiments plus hauts comportant de plus grandes fenêtres (voûte de la nef de Notre-dame-de-Chartres s’élève à 66,5 m en 1195, la cathédrale d’Amiens atteint de 42 m en 1220).
Cathédrale Sainte-Marie à Oloron-Sainte-Marie : chevet de style gothique, du début du XIVe siècle.
Cathédrale Sainte-Marie à Oloron-Sainte-Marie : intérieur, nef à voûtes d'ogives du début du XIIIe siècle. Reconstruction réalisée après un incendie.
La crypte n’est plus construite, car les reliques sont présentées sur des autels au rez-de-chaussée dans des châsses.
Les vitraux couvrent les ouvertures bien qu’ils existaient chez les Romains, mais ils étaient de petite dimension. Ce sont plusieurs fragments de verres colorés que l’on relie à l’aide de baguettes de plomb. Pour résister à des vents puissants (un vent de 100 km/h exerce une pression de 80 kg/m2 soit plus de 10 t sur les grandes roses), on rajoute des barres de fer dans le fenestrage de pierre horizontalement et verticalement. Leurs coûts sont élevés et sont le fait de personnages riches ou importants (dignitaires du clergé, de la société laïque) ou de corporations.
Cette utilisation de fer se trouve aussi dans la structure de l’édifice pour le renforcer. Par exemple, les tirants métalliques soutiennent les arcs-boutants.
Au sujet de l’appareil (agencement et disposition des matériaux d’une construction), les églises du Haut Moyen Age sont élevées avec des petites pierres irrégulières, tandis que celles bâties selon le style roman ce sont les pierres sont disposées plus régulièrement. Plus tard, au XIIème siècle, l’aspect des murs montre des pierres plus grandes et régulières.
Les réalisations de ces bâtiments religieux dépendent du financement et des problèmes inhérents. Lorsque ces derniers sont inexistants, ils peuvent durer de 2 ans à 3 ans, si, par contre, ils se posent avec acuité, le temps d’édification peut s’échelonner sur plusieurs générations (3 siècles) expliquant alors les différents styles qui les caractérisent.
c- L’art roman et l’art gothique en Béarn
Les églises béarnaises se sont généralement inspirées de ce qui se faisait autour du Béarn, c’est-à-dire dans le Sud-Ouest, le Languedoc et en Espagne.
Quelques documents révèlent les noms de ceux qui ont participé à la réalisation des édifices religieux béarnais moyenâgeux. Des artistes nous sont connus comme Arnaud Guilhem de Narp qui a œuvré à l’église de Laàs en 1336.[17] Un autre, Guilhem le Coq, vivant à Pardies, est sollicité, en 1389, pour édifier une église en bois à Besingrad. [18] Guilhem Arnaud de Minvieille-Juzon, maçon de son état, habitant Audaux, s’engage à réparer le monastère de Lucq, en 1446. [19]
En ce qui concerne les charpentiers, la plupart sont des cagots, on sait la discrimination dont ils étaient sujets et les métiers qui leur étaient imposés. Un d’entre eux, de Lucq, est engagé pour réparer l’église de la localité d’Ogenne, en 1396. [20]
Le plan type des églises béarnaises est celui d’une nef unique, à laquelle on ajoute une abside. Il existe également celui qui présente un ou deux collatéraux. L’église de Monein, par exemple, est partagée par une nef principale très large et un bas-côté plus étroit. Dans le pays de Morlaàs, la proportion pour les deux cas est la moitié chacune. En ce qui concerne les grands édifices, tels les cathédrales d’Oloron et de Lescar, les églises de Morlaàs et de Sauveterre, on adopte ce que l’on nomme le plan basilical dont l’église de l’abbaye de Cluny illustre parfaitement l’exemple. L’église a un espace intérieur, de forme rectangulaire, divisé par des piliers. Trois parties longitudinales se démarquent, elles sont appelées vaisseaux. La partie centrale, ou nef, est plus large, tandis que de chaque côté sont disposés des collatéraux (ou bas-côtés) moins élevés et moins larges. Chacune des trois parties se prolongent par des absides (ou murs plats) pour la nef et des absidioles pour les deux autres. D’autres espaces se rajoutent, le transept qui, comme on l’a vu, sert de voie de circulation entre les deux bas-côtés, donnant au plan général la forme d’une croix. Des chapelles flanquent les bas-côtés. La plupart de ces grands édifices étaient dotés de cloîtres qui ont disparu aujourd’hui. A Lescar, construit au XIVème siècle, il se trouvait au sud de l’église. Ses dimensions étaient de 17m sur 21 m, avec des galeries larges de 4 m. Dans la seconde moitié du XVIIIème, il est détruit.
En Béarn, se dégage un autre type de plan, de type centré. Ce sont quelques églises (Hôpital Saint-Blaise, Sauvelade…), qui offrent plutôt une forme de croix à quatre branches (comme les églises orthodoxes byzantines), surmontée d’une coupole.
Pour ce qui est des voûtes, les grands édifices sont réalisés en pierre tandis que le bois est utilisé dans de nombreuses églises rurales. On perçoit sur certaines églises béarnaises l’influence de l’art hispano-mauresque, le chemin de Saint-Jacques est facteur d’échanges, comme on le sait. Les coupoles de l’église de Sainte-Croix d’Oloron et de l’Hôpital Saint-Blaise sont soutenues par huit nervures de pierre, au-dessus de la croisée du transept. Ces nervures dessineraient les huit branches du sceau de Salomon. On y voit l’influence de la mosquée de Cordoue et la cathédrale de Jaca. Toujours dans l’église de l’Hôpital Saint-Blaise, des fenêtres romanes à dalles de pierres ajourées de motifs géométriques inspirés de l’art mudejar.
Dans ce cas-là, ce sont soit des lambris naturels (ceux de l’église de Baleix réalisés par un menuisier de Lembeye Mouret-Burie en 1750), plâtrés ou peints qui s’offrent aux yeux des fidèles ou alors simplement la charpente comme à Maubecq.
La façade ouest correspondant à l’entrée du lieu est soit magnifiée par un portail joliment décoré (Sainte-Marie, Monein, Lembeye…), soit marquée par un simple mur-pignon ou clocher-mur, une tour-porche…
Le décor est globalement simple, surtout dans les églises rurales. Dans de nombreuses portes (37 recensées), on retrouve systématiquement gravé le chrisme (monogramme du Christ). Ce dessin est composé d’un cercle représentant l’univers, la perfection divine, à l’intérieur deux lettres majuscules grecques X et P (les deux premières lettres du mot Χριστός signifiant Christ). S’adjoignent parfois deux autres lettres, la première et la dernière lettre de l’alphabet grec α (alpha) et ω (oméga). Ces dernières encadrent alors les deux précédentes, symbolisant le commencement et la fin. Toutes ces lettres assemblées forment le mot ἄρχω, qui signifie « commander », et donc au Christ. En Béarn, une autre lettre est ajoutée parfois, le S (sigma latinisé, à l’endroit ou à l’envers). Ce symbole est inspiré de l’Apocalypse de Jean (Apocalypse 22:13), où il écrit : « Je suis l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin. » On l’associe à l’empereur Constantin le Grand, lors de la bataille du pont Milvius en 312. Il l’aurait aperçu en songe ou « délivré » lors d’une vision avant le déroulement de la bataille. Le chrisme lui apparaît dans le ciel, avec les mots « In hoc signo vinces » (par ce signe tu vaincras), ce qui le dissuade de le faire reproduire sur les étendards et les boucliers de ses guerriers.
Eglise Saint-Jean-Baptiste à Diusse : portail roman, 2e quart du XIIe siècle, tympan avec chrisme.
Eglise Saint-Pierre de Simacourbe, fin XIe siècle : chrisme sur le portail Sud.
Outre les chrismes, les tympans de quelques églises sont ornés magnifiquement par des motifs religieux et profanes. Celui de la cathédrale de Sainte-Marie, en plaques de marbre blanc, représente la Descente de Croix. Les voussures, outre les vingt-quatre Vieillards de l’Apocalypse, nous dépeignent des personnages issus de la vie active (paysans..) et de la vie quotidienne (chasse à l’ours, préparation d’un repas…). Néanmoins, la plupart des églises romanes, outre les chrismes, quelques tympans indiquant parfois la date de réalisation ou de reconstruction, quelques portes encadrées par des colonnes surmontées par des chapiteaux historiés, des voussures décorées de motifs, restent simples dans leur ornementation.
Ceci pour l’extérieur, mais aussi pour l’intérieur. Peu ou pas de chapelles, actuellement, plusieurs d’entre elles que l’on peut voir ont été construites ultérieurement. Peu de mobilier qui date de l’époque romane ou même gothique. La raison est due au pillage perpétré lors des guerres de religion par les troupes huguenotes, notamment en 1569.
Le financement de la construction des églises, au Moyen Age, est certainement dû à la participation des vicomtes béarnais à la Reconquista en Espagne, comme on l’a vu plus haut. Par la suite, ces derniers, durant les XIVème et XVème siècles, ne se soucient pas de bâtir des églises, si ce n’est que de réaliser des adjonctions (chœur de l’église d’Accous, voûtes de l’église d’Arudy). Par contre, à partir de la fin du XVème siècle, nous assistons à une floraison de constructions, surtout sous la dynastie des Albret.
Le XVIème siècle est associé, en France, sur le plan religieux, à la Réforme protestante et aux guerres de religion. En Béarn, ces événements revêtent beaucoup d’importance. En ce qui concerne les édifices religieux édifiés, leur nombre, lors de la fin du XVème au XVIème siècle, est important.
Le gothique est bien implanté dans la vallée d’Ossau, la plaine de Nay, le Saubestre, on en trouve aussi, en moins grande quantité, dans le Vic-Bilh. Dans cette dernière partie du Béarn, l’église qui incarne le plus ce style est, sans conteste, l’église de Lembeye. Le gothique flamboyant se retrouve essentiellement dans son beau portail, composé de trois arcs en anse de panier, en arc brisé et en accolade à choux frisés qui se chevauchent.
Ce qui démontre que la piété catholique des Béarnais est quasi entière, avant l’introduction du protestantisme dans la province. Par contre, ils subiront des dégradations au moment des luttes fratricides, surtout en 1569, par les soldats de Mongoméry.
Le style qui domine alors est le gothique flamboyant (lignes sinueuses évoquant l’image de flammes agitées par le vent) comme on peut l’observer à Monein, un des plus vastes édifices gothiques de la province. Ce style se retrouve sur les portes comme à Bruges. Des arcs en accolade (formés par deux courbes et deux contre-courbes), des choux, des feuillages, des pinacles sont sculptés. Ce style persiste, en Béarn, jusqu’au XVIIIème siècle.
Eglise Saint-Sylvestre à Sainte-Colome : portail gothique flamboyant en accolade (piedroits gothiques, anse de panier, choux fleuris, niche avec Vierge, anciennement peint).
En ce qui concerne les ateliers et les artistes des XVème et XVIème siècle, on connaît plusieurs noms. Par exemple, au sujet des maîtres, Peyroton de Peyrer, originaire de Saucède, passe un accord avec Menaud de Mirassor, de Navarrenx, pour l’élaboration d’un autel dans l’église de Monein. [21] Autre exemple, Bernard de Betheder, maître-maçon d’Izeste, restaure l’église de Laruns. C’est lui, d’après les dessins de Jacques Bouchet de Monein, qui réalise le portail de la même église. [22] Ici, nous avons affaire à des artistes locaux, mais ceux qui proviennent d’autres contrées ne sont pas rares, notamment s’il s’agit de décorateurs. Nommons Pierre Bertrec, de Vic-en-Bigorre, qui reçoit la commande de la ville de Pontacq afin d’exécuter des grilles et d’un crucifix à l’église Saint-Laurent.[23] Enfin, citons des Flamands, tel Henri, originaire de Liège mais habitant à Oloron, est contacté pour réaliser le retable de l’église d’Accous.
d- Les style Renaissance et baroque
Mais, on trouve aussi quelques exemples du style qui suit, la Renaissance.
L’église de Thèze offre un bel arc surbaissé en anse de panier, de même que des corniches et des entablements. Des églises mêlent à la fois les styles gothique, flamboyant et renaissance, comme l’église de Saint-Girons de Monein. Le clocher à dôme à l’impériale, apparu en France au XVIème siècle, s’observe plus tard en Béarn, surtout au XVIIIème. Sa forme courbe à quatre faces est surmontée d’un globe. L’église Saint-Pierre de Sévignacq-Meyracq offre un bel exemple de ce type de clocher.
Eglise Saint-Pierre à Thèze, du XIIe et transformée de la fin du XVe siècle au début du XVIe siècle : portail renaissance du 2e quart du XVIe siècle.
Au XVIIIème siècle peu d’églises sont édifiées, excepté des chapelles conventuelles, des adjonctions comme le porche soutenu par quatre colonnes à la fin du XVIIIème siècle de l’église Saint-Martin de Baleix. On remanie plutôt les anciennes constructions.
On détruit les jubés bâtis depuis le XIIème siècle dans les grandes églises. Clôtures du chœur liturgique, elles délimitaient l’emplacement réservé au clergé et au maître-autel. Faits de bois ou de pierre, généralement magnifiquement décorés, on les juge malheureusement inutiles au XVIIIème siècle puisqu’ils empêchent aux fidèles de voir l’autel. La même pensée se retrouve pour les tombeaux situés dans les chœurs qu’on retire. On veut des églises plus éclairées, si on garde les anciens vitraux, on lance des campagnes d’élargissement des fenêtres, on pose des vitraux de couleur claire, des carreaux de verre blanc. Toujours dans le but d’illuminer l’intérieur de l’église et du fait du changement des goûts artistiques on badigeonne les peintures médiévales de chaux blanche ou du blanc d’Espagne, ceci dès le XVIème siècle avec la Contre-Réforme.
On cherche à mettre en valeur les maîtres-autels avec des retables polychromes qui ont pour objectifs de décorer, d’illustrer des scènes des Evangiles et d’éveiller la dévotion, ceci après l’impulsion donnée par la Contre-Réforme. Le style baroque dominant offre aux yeux des fidèles une myriade de couleurs, chaudes surtout. L’or symbolise la pureté, le Christ du fait de sa nature solaire, le bleu représente le ciel, le blanc est associé à la pureté. Si les retables du XVIIème siècle apparaissent plutôt extravagants et surchargés, ceux du XVIIIème siècle sont davantage sobres. Ils sont pourvus de tableaux peints sur bois ou toiles, des statues ou statuettes.
Le retable le plus représentatif, en Béarn, est constitué soit d’un seul panneau, soit de trois panneaux. Sur le panneau central est figuré le saint patron (peinture ou statue), les deux autres sont séparés du précédent par des colonnes torses.
Le marbre ou le stuc est souvent utilisé pour décorer ces retables, les murs, les plafonds…
Ce mobilier, le plus souvent baroque, est réalisé fréquemment par des artistes locaux. Outre les retables, il est composé aussi de Vierges et de Saints en bois polychromes, de chaires…, d’orgues. On connaît les Dartigacave, et notamment Jean-Baptiste, de la seconde moitié du XVIIème siècle. Ils sont originaires de Sainte-Colome, proche d’Arudy. Un autre nom est à signaler, le sculpteur Claverie, originaire de la vallée d’Ossau et qui œuvre, en Béarn, dans le nord-est .Nous connaissons d’individus qui entreprirent à les faire réaliser, comme l’évêque Joseph de Revol du diocèse d’Oloron (1705-1742). On peut citer l’autel-retable de l’église de Lacommande
Eglise Saint-Jean-Baptiste à Diusse : chaire du XVIIIe siècle.
Eglise Saint-Laurent à Morlanne : chaire du XVIIIe siècle.
Eglise Saint-Julien de Lescar de Lucgarier : retable du XVIIIe siècle.
e- Des églises fortifiées
L’église, lieu de culte des catholiques, est au Moyen Age, avec le château, souvent les seuls bâtiments en pierre. Elle apparaît solide aux paroissiens mais aussi un monument que l’on transforme à travers les époques selon les goûts, les styles. Si on prend l’exemple de l’église Saint Laurent à Morlanne – symétriquement opposée au château-fort le long de la rue principale -, on aperçoit un bâtiment à la fois moyenâgeux car fortifié avec 3 tours dont une crénelée, des archères sur les murs munis d’un chemin de ronde. Construite au XIIIème siècle, de style gothique, l’église a été fortifiée au XIVème mais par la suite on l’a modifiée en lui adjoignant un portail classique à baldaquin du XVIIème dans sa partie méridionale. Si l’intérieur garde une majorité d’éléments caractéristiques du Moyen Age et plus particulièrement du style gothique, un chœur aux voûtes sexpartites, de belles clefs de voûte dont une représentant Saint-Laurent sur son gril, une voûte à six nervures, des chapiteaux historiés dont un montre un individu dormant sur son sac. On trouve également des éléments postérieurs comme un lutrin du XVIIème siècle, un confessionnal, un bénitier du XVIIIème siècle et une chaire en bois doré baroque munie d’un abat-voix aussi du XVIIIème siècle.
Eglise Saint-Laurent et ancienne abbaye laïque à Montaner. L'église, fortifiée, est dotée de trois tours percées d'archères, de chemin de ronde.
Chevet roman fortifié de l'église Saint-Martin de Maspie (datant en partie du XIIe siècle). On distingue des créneaux, des archères et des trous de hourdage.
D’autres églises béarnaises offrent à la vue de l’observateur des éléments de fortification. Certains vicomtes se distinguent comme constructeurs, Gaston VII Moncade, Gaston Fébus. Des créneaux notamment, l’église de Maspie offre aussi un exemple d’église refuge, sur le chevet, avec des corbeaux pour y introduire des madriers pour la réalisation de hourds. Une autre église dresse un clocher-porche fortifié, l’église d’Andrein avec une archère et des corbeaux…
f- Pour les chrétiens, la cloche est un instrument liturgique et un moyen de communication
De l’église le son de la cloche se répand dans le village et symbolise la communauté et la paroisse. La cloche aurait été importée en Europe continentale par les moines irlandais. Puis son utilisation se répand du temps des Carolingiens.
Outre leur fonction religieuse, elle sert à délimiter les paroisses. En effet, les limites étaient calculées selon le rayon que couvrait le son au départ de l'église, Si la paroisse était importante en superficie, on choisissait une cloche de taille imposante en conséquence.
Hugues Neveux cite l’exemple de l’ « Angelus » qui « intègre les deux fonctions, laïque et ecclésiastique; elle rythme le déroulement de la journée tout en invitant à la prière. »[24]
En réalité, elles sont plusieurs. Elles sont fixées et suspendues dans le haut du clocher et chacune émet un son différent afin d’informer les habitants. Apparues à l’ Age du bronze, elles sont dissemblables du fait de leurs formes et de leurs sonorités[25]. Elles sont fabriquées à l’aide de matériaux différents (airain, fer, fonte…).
Elles sont baptisées au moment de leur inauguration puisqu’on leur donne un nom. Un parrain ou une marraine (ou les deux ensemble) leur sont attribués.
Elles signalent les fêtes et les cérémonies religieuses. Elles rythment les étapes de la vie quotidienne des paroissiens. Elles auraient le pouvoir d’éloigner les orages, les foudres, les grêles, elles préviendraient les gens d’un incendie, d’une attaque…
Le tocsin annonce le danger, le glas la mort.
On cite l'anecdote suivante survenu le 1 juillet 1617, journée où toutes les cloches du Béarn se mirent à sonner au même moment du fait d'un important tremblement de terre qui aurait secoué tout le Béarn.
En Béarn, deux cloches datées du Moyen Age existent, l’une de 1464 sous Gaston XI de Béarn et l’autre de 1610 sous Henri IV). Si la première, le tocsin, porte des inscriptions gothiques au sujet de formules de prières permettant d’écarter toutes les catastrophes tirées de l’office de Sainte Barbe, on peut relever sur la seconde la citation : « Sancte Petre Ora Pro Nobis » signifiant Saint Pierre prie pour nous vu que la paroisse en a fait son patron.
Cloche de 1465 de l'église Siant-Pierre à Laruns. Cloche des tocsins, elle porte des formules de prières contre les fléaux.
Cloche des tocsins à Laruns: "Mentem sanctam spontaneam", correspondent au début du texte qui, à partir du XIIIème siècle, fait partie de l'épigraphie campanile (cela jusqu'au XVIIIème siècle). Ces mots sont utilisés lors de la messe de Sainte-Agathe que l'on invoquait pour se protéger des séismes, de l'orage et de l'incendie.
A Buziet, le clocher carré de l’église de Saint-Justin de Bigorre bâtie en 1734 supporte une cloche fondue en 1791 possédant la vertu d’éloigner les orages.
On sonne les cloches lors des obsèques des personnages les plus importants de la communauté. A Pontacq, la sonnerie à la volée se pratique vis-à-vis de l’abbé laïque, l’archiprêtre, le curé, les membres du Corps municipal. En dehors de ces catégories, on n’hésite pas à intenter des procès ou tout simplement à s’opposer. On connaît des exemples, tel le cas de ce noble, Jean de Bataille, seigneur de Castelnau, qui revendique le droit aux nobles de jouir de la sonnerie à la volée[26].
Outre la cloche, il existe un autre procédé pour annoncer aux habitants des nouvelles. A Claracq, dans le Vic-Bihl, une estrade en pierre (aujourd’hui disparue) permettait au crieur public de procéder à cette fonction.
Eglise de Claracq, clocher XIXe : portail, à côté un escalier à 2 marches conduisait à une estrade du crieur public.
g- Les bancs, les chaises, les tribunes, des marqueurs de la société
Lors de la messe, les notables de la paroisse (seigneurs, marguilliers…) s’installent au premier rang des bancs réservés. Si celui des nobles est un symbole de leurs privilèges, les autres sont souvent loués ou transmis de père en fils .Ces derniers à coffre ou à queue sont placés non loin du chœur. Ils peuvent contenir un prie-Dieu. A Arros, à Osse-en-Aspe (au-dessus de la tribune), on peut observer encore des bancs dévolus aux jurats.
Eglise d'Abos: bancs pour la fabrique.
Le reste des habitants cherche à trouver une chaise de libre ou un banc pour s’asseoir. Les chaises se sont généralisées afin que les fidèles puissent bénéficier de bonnes conditions d’écoute du sermon vu que les offices deviennent plus longs à partir de la Contre-réforme. Les bancs et les chaises apparaissent à partir du XVIe siècle. Auparavant, les gens du peuple, selon les étapes de la messe, restaient agenouillés, debout ou assis par terre ou sur des tabourets bas amenés avec soi.
Dans plusieurs églises, dans plusieurs régions béarnaises les hommes s’installent sur une tribune ou galerie telle que l’on peut la voir dans la vallée de Barétous (à l’exception de celle d’Aramitz), mais aussi dans la vallée d'Ossau.
Eglise de Béost (XIIe siècle) : tribune pour hommes.
En ce qui concerne les tribunes, il en existe une servant aux chantres ou chanteurs lors des services religieux (exemples : à Lembeye, à Sainte-Colome [à gauche de la porte de la sacristie].
La réforme tridentine, au sujet de la messe, tend à développer deux types de dévotion en apparence contradictoire selon François Lebrun, une piété personnelle et une piété collective, mais « en fait complémentaire »[27]. Le fidèle récite la prière en commun. Le fidèle suit les prières du clerc qui officie à voix basse en l’observant et en énonçant doucement les livres pieux.
A la suite de nombreux auteurs théologiens, on tente d’inciter davantage les fidèles à participer lors des messes. Par exemple l’archevêque de Rouen, François II de Harlay de Champvallon, dans son ouvrage la « Manière de bien entendre la messe de paroisse[28] écrit notamment en 1651 que les fidèles vis à-vis du prêtre soient «… attentifs à la prière qu’il va faire pour vous et pour tous les assistants et que vous pensiez au sacrifice là présent, en l’offrant et vous offrant par le prêtre dans l’esprit et l’union de l’Eglise. »
Ce type d’engagement explique, d’après François Lebrun, que dans certaines églises on abat des jubés, surtout dans les villes, et on réagence les chœurs afin de « rendre le culte plus vivant et plus communautaire, de rapprocher l’autel… de l’assemblée des fidèles… »[29].
Dans le même esprit on entreprend de publier des missels dans lesquels on a traduit les textes du latin en français. Mais son usage d’après François Lebrun « reste exceptionnel » excepté « quelques grandes paroisses urbaines ou dans les chapelles de communautés religieuses ouvertes aux fidèles ». Un constat est dressé, « les tentatives pour faire participer étroitement les assistants aux prières liturgiques récitées à l’autel par le célébrant échouent. »[30].
Les fêtes religieuses
La paroisse est protégée par un saint patron. Les fidèles se doivent d’honorer Jésus à travers les saints et les saintes et ce, par exemple, lors de la « fête patronale » ou « fête du saint ». Ce jour, par le biais, de pèlerinages, correspond à une occasion de rencontres et de dialogue entre les membres de la communauté. L’église de Lacommande est placée sous le patronage de Saint Blaise, celle d’Igon de Saint- Vincent…
Les paroissiens assistent aux messes non seulement les dimanches mais aussi lors des fêtes dites religieuses ou d’obligation. L’Eglise, surtout par le biais des évêques, a cherché à réduire ces dernières pour différentes raisons comme par exemple diminuer le nombre de jours chômés pour des gens aux revenus modestes mais aussi baisser la fréquentation des fidèles dans les cabarets et non pas dans les églises. On est passé « d’une moyenne de 35 à 40 au début du règne de Louis XIV… à une vingtaine à la veille de la Révolution. »[31]
La fête a-t-elle cessé d’être un facteur de cohésion sociale avec des tensions qu’elle engendre parfois ? On peut le penser lorsqu’on observe les évêques tenter de remettre les participants, les professionnels de la comédie dans le rang et de les menacer de l’excommunication et de leur nier le droit d’être inhumé.
L’Eglise n’est pas la seule à vouloir réduire le nombre des fêtes d’obligation, les autorités civiles, par souci d’éviter tout débordement, appuient son action.
Le nombre de jours travaillés augmente au XVIIIème siècle – pas le nombre d’heures quotidiennes.
Lors de la rédaction des cahiers de doléances en 1789 de nombreuses paroisses rurales les plus pauvres demandent la suppression de fêtes chômées.
Il est nécessaire de rappeler qu’auparavant les assistants devaient s’asseoir par terre puisque les sièges étaient absents. Ces derniers se sont répandus à partir du XVIIème siècle en France à partir de la Contre-Réforme.
Sur les murs, des tableaux, des statues pieuses permettent d’illustrer la vie de Jésus, de la Vierge et des saints.
Le confessionnal apparaît dans les églises.
Les messes ne s’effectuent pas dans le silence le plus rigoureux comme aujourd’hui. Les gens discutent à l’époque, de tout. Toutefois on s’abstient de bavarder lors de certains rites comme par exemple au moment dans lequel le curé élève l’hostie ou le calice. Il est vrai qu’on prévient les fidèles par des coups de clochette. De plus, le paroissien ne comprend pas le curé lors de la messe vu qu’il use du latin. Il se contente de répéter et de chanter comme lui le « Pater Noster », « l’Ave Maria », le « Credo », de réciter le chapelet… Il sait que ces paroles relèvent du sacré. Le curé utilisera leur langue lors du prône.
Philippe Martin écrit que la séparation des sexes daterait de la Contre-Réforme (1564), accentuée vers la fin du XVIIIème siècle et le début du XIXème siècle. Les femmes portent des foulards. 31
Les sépultures
Dans les églises des sépultures sont présentes. Depuis l’Antiquité, les inhumations, chez les chrétiens, se pratiquaient ad sanctos c’est-à-dire près des reliques, des tombeaux des saints et, par conséquent, dans un espace comprenant l’église et ses dépendances (cloître…). Cet espace sacré voit donc s’adjoindre dans son enclos le cimetière et cela au sein de la communauté des fidèles. Les vivants et les morts « cohabitent ». Néanmoins tous les villages ne possèdent pas de cimetières.
Depuis le Moyen Age, on peut inhumer dans les lieux de culte, surtout dans les monastères.
Cette liberté est liée alors à des dons ou des legs et se produit soit du vivant du décideur, soit par un de ses proches. Cet argent permet alors à entretenir l’église. En ce qui concerne les prêtres, les évêques sont enterrés dans le chœur des cathédrales tandis que les curés dans celui des églises. Quant aux laïcs, le seigneur dont dépendait la paroisse ou le fondateur du sanctuaire, ils ont également droit à ce lieu d’inhumation. Concrètement, il peut s’agir d’un enfeu, d’un caveau individuel, d’un caveau familial. Il peut s’agir aussi de l’emplacement du banc sur lequel le seigneur s’asseyait lors des offices et l’on ensevelissait dessous comme on va plus loin le voir à Lacommande. Mais les notables se font également enterrer dans une chapelle ou dans le haut de la nef. Les plus humbles, eux ont droit au bas de la nef ou dans le cimetière. C’est également un droit qui se monnaye. En 1683, conjointement le curé Thimothée Bonnecaze, le Corps de Ville et la fabrique vendent le droit de sépulture à deux individus dénommés Jean de Sarthou et Jean de Laborde pour une somme s’élevant à 50 francs[32].
Eglise de Béost : dalle noire portant une inscription, près de la porte d'entrée. C'est la sépulture du noble Raymond Espalungue, seigneur de Cazaux de Louvie-Juzon, abbé laïque de Béost, mort le 21 septembre 1698 à 67 ans.
Eglise Saint-Pierre à Sévignacq-Thèze : dalle funéraire du XVIIIe siècle.
Cette pratique avait concrètement des inconvénients. Si des dalles recouvraient le sol, il était nécessaire de les enlever, de rapporter de la terre, de la niveler…
Pourtant le 10 mars 1776 une ordonnance royale décide de refuser tout enterrement dans les églises - exception faire pour quelques cas limités et prévus (comme par exemple les hauts dignitaires de l’Eglise). Il est à noter que Jeanne d’Albret avait également décrété cette interdiction dans le passé à travers les ordonnances ecclésiastiques du 26 novembre 1571 de Pau.
En théorie, il est spécifié de vider les fosses des ossements périodiquement et de les transférer dans une fosse commune ou un ossuaire.
En même temps, on encourage le transfert des cimetières en dehors des villes et des bourgs déclenchant parfois des émeutes de « résistance » de la part des populations - et surtout des curés et des marguilliers - comme à Lille en 1779 ou à Cambrai en 1786. Ces déplacements, en effet, outre ces rébellions, ont débouché malgré des amendes sur des procès, des expertises commanditées afin de déceler si l’insalubrité était bien avérée et si la décomposition des corps entraînait bien des risques du fait de « leur redoutable chimie ».
Ces décisions sont à mettre en relation avec le souci cher au « siècle des Lumières » de lutter contre l’impureté de l’air et d‘avoir un « air pur ». En effet, dans le dernier tiers du XVIIIème siècle, les individus sont en quête d’une meilleure hygiène et un bon assainissement et, pour y parvenir, cherchent avant tout à éradiquer les maladies, les épidémies…
On est alors contraint d’acquérir un terrain pour y enterrer les sépultures et le clore de murs.
Cette démarche consistant à prohiber les sépultures dans les églises se poursuit le 23 prairial an XII (12 juin 1804) par le Décret Impérial sur les Sépultures. Dans l’article premier il est spécifié : « Aucune inhumation n'aura lieu dans les églises, temples, synagogues, hôpitaux, chapelles publiques, et généralement dans aucun édifice clos et fermé où les citoyens se réunissent pour la célébration de leurs cultes, ni dans l'enceinte des villes et bourgs ».
Les notables, après avoir reçu une autorisation préfectorale au préalable, opteront pour l’enterrement dans des chapelles funéraires familiales.
Afin d’illustrer ces propos, prenons le cas de Lacommande . Entre 1724 et 1780, le relevé des sépultures nous renseigne que la localité obéit à l’ordonnance royale du 10 mars 1776 puisqu’ elles cessent à partir de 1777. Jean-Claude Lassègues écrit que 67,9% des inhumations se font entre 1724 et 1776 dans le cimetière, 25,6 % dans la nef de l’église Saint-Blaise 4,8% dans la chapelle du Saint-Sacrement et 1,7% dans la chapelle Notre-Dame. L’auteur rappelle que la population à l’époque s’élevait à 1 500 personnes ce qui lui paraît très important. Il cite trois exemples d’individus qui ont été enterrés dans l’église comme l’ont été en majorité des membres de la noblesse, du clergé et de ceux ayant une fonction « reconnue » comme les jurats.
« Le 18 octobre 1744 mourut la Demoiselle Marie Thérèse de Navailles Mirepeix agée d’environ 5 mois, fille légitime du seigneur François de Mirepeix et de la Dame (d’Aspremont) d’Orthe son épouse. Son corps a été enterré le lendemain dans la présente église, sous le banc dudit seigneur. »
Autre exemple d’un noble non originaire de la localité mais qui y est mort- plus exactement dans le château -. Cet « invité » dénommé Henri de Bourbon a également une sépulture dans l’église.
« Le cinq décembre 1772 mourut le noble Henry de Bourbon, natif de la ville d’Oloron, âgé d’environ 40 ans, et le lendemain fut enterré dans la chapelle du Saint-Sacrement, à l’assistance de la plus grande partie de mes paroissiens. Témoins le sieur Henry de Bourbon, curé de Ledeuix, et Sylvestre Bergeret qui ont signé avec moi, Dabbadie curé. »
Pour finir, terminons avec un ecclésiastique, le curé Lassalle-Atas (ou Athas).
« Noble Arnaud de Lassalle-Atas, curé agé d’environ 54 ans, mourut subitement le 27 janvier 1730 et fut enterré le jour suivant à l’assistance de plusieurs ecclésiastiques et de presque tous les paroissiens dans le sanctuaire de cette église au coin de l’Evangile. Présents et témoins qui ont signé les sieurs Jean de Lespitau, marchand de Lacommande, et Antoine de L’Eglise, régent d’Aubertin. » [33]
Quant à l’article 2 du Décret, il s’attache à éloigner les cimetières hors des villes puisqu’il est prévu : « Il y aura, hors de chacune des villes ou des bourgs, à la distance de trente-cinq à quarante mètres au moins de leur enceinte, des terrains spécialement consacrés à l'inhumation des morts ».
En ce qui concerne le souci de salubrité, il persiste vu que les lieux choisis pour implanter les cimetières doivent correspondre à des critères bien définis : « Les terrains les plus élevés et exposés au nord seront choisis de préférence; ils seront clos de murs de deux mètres au moins d’élévation. On y fera des plantations, en prenant les précautions convenables pour ne point gêner la circulation de l’air. »[34]
L’église sert souvent de lieu de rassemblement de la communauté des habitants du village, de l’assemblée générale et donc à caractère politique souvent. Ce point démontrant que l’église s’intègre aussi dans l’espace social de la communauté villageoise. Au préalable, le curé lors de la messe annonce la convocation de l’assemblée villageoise. On le rappellera également par une annonce opérée de porte à porte, au son du tambour.
Si les habitants, à cette occasion, se réunissent souvent dans la nef principale, ce n’est toujours pas le cas. Quelques églises possèdent des endroits dévolus à ce type d’occupation, un couvert porté par une charpente orienté vers un côté du bâtiment par exemple. Dans d’autres, on s’assemble sous le porche (exemple : à Lembeye).
Eglise de Lembeye : sous le portail ogival, bancs.
Mais l’assemblée peut se tenir aussi en plein air ou alors dans des bâtiments comme une halle, une école ou une maison commune.
L’église Saint-Vivien de Bielle en est un bon exemple, sur la façade nord un escalier extérieur permet d’accéder à une salle de réunion appelée « segrari » où s’assemblait « l’Universitat d’Ossau » puisque la localité de Bielle sert de capitale ou « Capdeuilh ».
Si la réunion a lieu un dimanche, à la sortie de la messe, les gens, bien habillés pour l’occasion, se sépareront, les femmes (excepté les veuves par exemple qui deviennent par la force des choses chefs de famille) et les enfants se dirigeront vers leurs domiciles tandis les hommes, chefs de famille ou célibataires payant un impôt à l’occurrence la taille, s’assembleront pour prendre les décisions lors de votes.
Les portes des cagots
Dans certaines églises béarnaises une porte, un bénitier sont destinés dès le Moyen Age aux cagots ou « crestians » gascons. Ces marginaux institutionnalisés continuent d’exister au XVIIIème siècle. A la fin du XIVème siècle, ils représentent environ 2% de la population béarnaise. Dès le XIème siècle, des documents établissent une relation entre les lépreux et les « crestias ». Discriminés à la suite d’une erreur médicale (la découverte du bacille de Hansen ou ce que l’on nomme couramment la lèpre date de 1874), ils subissent l’idée reçue selon laquelle ils seraient les descendants des malades de cette dite maladie. Ils sont soumis à la juridiction ecclésiastique. Le For de Béarn de 1551 promulgué par Henri II d’Albret contribue à les mettre à l’Index en les excluant de la société et à les obliger à se cantonner dans certaines tâches comme celle du bois, de fossoyeur ou de médecin et dans certains espaces. Cette ségrégation résultant de la peur des autres habitants à une possible souillure physique. Par la suite, aux XVIIème et XVIIIème siècles, des contemporains font remonter leurs ascendances aux Wisigoths, aux Sarrasins…
Les articles 4 et 5 tirés de la rubrique de la qualité des personnes leur sont alloués. Celui qui concerne plus spécifiquement l’église est l’article 4 : « Les cagots ne doivent pas se mêler avec les autres hommes pour des relations familières. Ils doivent dorénavant habiter séparés des autres habitants et ils ne se mettront pas devant les hommes et les femmes à l’Eglise, ni aux processions, sous peine d’une amende majeure chaque fois qu’ils contreviendront. »[35]
Ces exclusions perdureront jusqu’en 1789 bien que le pouvoir royal, notamment par l’action de louis XIV et de son ministre Colbert sous l’instigation de l’Intendant du Béarn M. Dubois du Baillet aient tenté de lutter contre elles (notamment pour des raisons financières en leur permettant de s’affranchir en s’acquittant en le moyennant). Des lettres patentes furent distribuées. Toutefois les institutions, les communautés locales et l’opinion publique sont intervenus pour s’y opposer. Songeons à Mgr François de Revol, évêque de Sainte Marie (1742-1783), qui refuse à tout cagot de recevoir les sacrements. A la fin du XVIIIème siècle, leur intégration au sein de la population est bien établie, ils deviennent des citoyens aussi bien que les Juifs et les Protestants qui le furent par l’édit de Versailles de 1787 signé par Louis XVI. On sait actuellement que la lèpre n’est pas transmissible. Malheureusement, à l’époque elle a servi de prétexte à des discriminations ; nous connaissons des cas où la ségrégation perdurera encore au milieu du XXème siècle.
Dans l’église les cagots portent un signe distinctif cousu sur leurs vêtements – épaule gauche –, une patte d’oie ou de canard rouge. Benoît Cursente note que cette obligation est mentionnée sur un certain nombre de documents datés de 1550 à 1650. De plus, elle a été imposée seulement dans certaines régions et durant un temps donné.
Ils doivent entrer souvent par une porte distincte des autres paroissiens, le plus souvent latérale au bâtiment.
A ce sujet, une hypothèse contredit quelque peu l'existence des portes des cagots, il s'agirait en fait, pour de nombreuses d’entre elles cataloguées comme telles, des portes latérales dédiées aux messes de semaine. Les fidèles pénétraient par les portails centraux pour assister aux messes dominicales ou aux cérémonies religieuses importantes (celle d'obligation comme l'Ascension, Noël...). Il faut rappeler que les messes de semaines ont un statut inférieur, elles sont plus dépouillées et sont pratiquées dans le chœur ou dans des chapelles latérales d'où la présence des portes permettant l'accès. Alors que lors des messes du dimanche, les chrétiens se rassemblent dans le but de participer à l'Eucharistie.
Cathédrale Sainte-Marie à Oloron-Sainte -Marie : bénitier dit des Lépreux ou des Cagots du XIIe siècle représentant un chien poursuivant un lièvre.
Eglise de Notre-Dame-de-L'Assomption à Lembeye : de la fin du XVe siècle, porte dite des Cagots, côté Sud.
Eglise Saint-André à Sauveterre-de-Béarn : porte dite des Cagots.
Eglise de Saint-Laurent à Bentayou-Sérée : emplacement probable du cimetière des Cagots.
Chemin des Cagots à Lons menant à l'église Saint-Jean-Baptiste.
Poussés par les interdictions à leur encontre ils pratiquent l’endogamie ou la recherche de conjoints dans d’autres contrées. Cette porte est souvent conçue pour les obliger à se courber, basse et étroite. De plus, un bénitier leur est destiné. Ils doivent se placer souvent au fond du bâtiment cultuel, parfois séparés du reste des fidèles par une balustrade. Au moment de la bénédiction du pain, ce dernier leur est jeté et non pas offert dans la corbeille, l’eau bénite n’est prise qu’au bout d’un bâton ou une fourchette de bois de la part d’un bedeau comme à Lucarre lorsqu’il n’existe qu’un seul bénitier. Même l’hostie est également tendue au bout d’une planchette. Ils ne peuvent s’approcher de la « sainte table » qu’à la suite des autres croyants. On les baptise le soir. Néanmoins, du fait qu’ils soient baptisés ils reçoivent tous les autres sacrements. A Arbonne, le cagot doit se contenter de baiser une étole disposée sur une croix d’argent alors que les autres paroissiens ont le droit d’y apposer un baiser directement sur la dite croix.
Même les cloches ne sonnaient pas de manière semblable, à Olesse, l’Angelus a un son différend lorsqu’’il s’adresse aux cagots ou aux autres fidèles.
A Sauvagnon, autre discrimination, le curé procède à la procession solennelle avant qu’il effectue ensuite la procession dominicale spécialement pour les cagots seulement dans leur cimetière dévolu.
Lors des processions on leur interdit de porter des cierges, ils se placent à l’arrière. De plus ils ne peuvent guère s’affilier à n’importe quelle confrérie excepté celles qui les acceptaient au prix de droits d’entrée très élevés.
Ils ne peuvent appartenir à aucune fabrique.
- Porte des cagots: église d’Abitain (actuellement murée) , église d’Accous côté nord, église d’Argelos , église de Béost, église de Notre-Dame de l’Assomption de Cardesse (linteau décoré d’un arc en forme d’accolade ) , chapelle romane de Caubin près d’Arthez-de-Béarn (est aujourd’hui murée , haute de 1,50 m) , église d’Escos (mur sud) , église d’Issor, église de Lembeye, église de Monein, église de Navarrenx (bas côté gauche) , église d’Oraàs (mur ouest), église Saint André de Sauveterre-de-Béarn (petite porte à gauche du portail surmonté d’un chrisme), église de Serres-Castet ( mur sud , arc brisé à grosse moulure à larmier), église de Sévignacq, église de Simacourbe (au nord).
Cette énumération correspond à celle de la tradition, celle qui de génération en génération désigne les portes latérales des églises - qui seraient, en réalité, dévolues aux messes de semaine,
Dans les cimetières, on leur dévolue un espace à part. A Claracq, si on plante du buis sur les tombes des paroissiens, on met du houx sur celles des cagots. A Issor, la porte des cagots mène au cimetière.
Les cagots construisent les charpentes des églises (probablement dans l’église de Saint-Girons de Monein dès 1464).
- Sculpture d’un cagot dans l’église de Monein dans le mur sud , à la base du pilier du fond près du bénitier des cagots.
- Bénitier : église d’Argelos, église d’Issor, église de Monein, cathédrale d’Oloron Sainte-Marie, église de Précilhon (déplacé à l’église de Billère), église de Sainte Colome (sculpture de tête d’une Vierge archaïque), église de Serres-Castet, église Saint-Girons de Monein.
- Emplacement des cagots dans l’église : église de Saint-Orens de Bosdarros, nord du collatéral est = encoches creusées dans des piliers où des cloisons s’emboîter pour les séparer des autres paroissiens.
- Cimetière des cagots : Sauvagnon, Salies-de-Béarn, Sérée.
- Un chemin à Lons mène à l’église et porte le nom : « chemin des cagots ».
A côté de tous ces éléments architecturaux, décoratifs…, ces fonctions l’église peut en remplir d’autres. A Escoubes, au-dessus du grand porche, une salle tient lieu d’école. Plus surprenant, à Sainte-Colome, une prison est présente, une porte y donne accès sur la façade nord de l’église.
Références:
[1]- Desplat Christian, La Principauté de Béarn, Société Nouvelle d’Editions Régionales et de Diffusion, 1980, p.191.
[2]- Poeydevant abbé , Histoire des troubles survenus en Béarn dans le 16e et la moitié du 17e siècles , Pau, 1879, tome 1,399.)
[3]- Cadier L., Documents pour servir à l’histoire des origines de la Réforme en Béarn, Paris, 1886.
[4]- Allègre, Victor, Les vieilles églises du Béarn. Etude archéologique, Toulouse, Imprimerie régionale, 1952, Tome 1, p. 61.
[5]- Allègre, V., op.cit., p. 62.
[6]- Revue des Etudes Historiques et Religieuses, 1895, p. 144.
[7]- Jean Annat, Les Sociétés populaires, Pau, 1940, p. 126, 247-249.
[8]- A.D.P.A., Imprimé.
[9]- Arch. com. de Pau, B.M. Pau D7 f° 43-44.
[10]- A.D.P.A., Lescar, t. III, Q. 13 et 16.
[11]- Pons-Devier, La déesse Raison et l’Etre Suprême dans les Basses-Pyrénées, Revue historique et archéologique du Béarn et du Pays Basque, 1926.
[12]- A.D.P.A., Imprimé.
[13]- A.D.P.A., Imprimé.
[14]- Batcave, Cloches du district d’Orthez, Revue historique et archéologique du Béarn et du Pays Basque, 1926, p. 195.
[15]- V. Allègre, op.cit., p. 68.
Voir A. Richard, Gouvernement révolutionnaire des Basses-Pyrénées, Paris, Paris, F. Alcan, Bibliothèque d'histoire révolutionnaire, nouvelle série, tome VII, 1926, 243 p.
Rivarès, Pau et les Basses-Pyrénées pendant la révolution, Editeur : Pau, Léon Ribaut (1875), Extrait du « Bull.SSLA de
Pau », 2e série, tome 4 ; Pons-Devier, « La déesse Raison et l’Etre suprême dans les Basses-Pyrénées, Revue historique et archéologique Béarn et Pays Basque, 1926.
[16]- F. Schwarz, Symbolique des cathédrales, Les Editions du Palais, 2012, p. 38.
[17]- A.D.P.A., E 1593, f° 24.
[18]- A.D.P.A., E 1923, f° 7.
[19] -A.D.P.A., E 1410, f° 20.
[20] -A.D.P.A., E 1405, f°73.
[21] -A.D.P.A., E 1471, f° 164.
[22] -A.D.P.A., E 1856, f° 32.
[23]- A.D.P.A.., E 2089, f°40.
[24]- Hugues Neveux, Histoire de la France rurale, (dir: Georges Duby et Armand Wallon), Editions Seuil, tome 2, 1975.
[25]- Voir : https://periersamuel.wixsite.com/lesvoixdescathedrale/une-breve-histoire-des-cloches)
[26]- A.D.P.A., B 5001.
[27]- François Lebrun, Histoire de la vie privée, (sous dir. de Ph. Ariès et G. Duby, tome 3, p.73.
Rouen, pour servir d'instruction à ses diocésains, rééd. Paris, Muguet, 1685.
[28]- François Lebrun, op.cit., p. 75.
[29]- Idem., p. 76.
[30]-Temps de travail et fêtes religieuses au XVIIIe siècle, Dans Revue historique 2012/3 (n° 663), pages 609 à 641.
[31]- Philippe Martin, Le théâtre divin. Une histoire de la messe du xvie au xxe siècle, édition de poche Paris, CNRS Éditions, coll. « Biblis », 2010, 383 p.
[32]- Jean-Claude Lassègues, Lacommande, de l’Hôpital à la commanderie et village, Centre généalogique des Pyrénées-Atlantiques, 2102, p. 83-84.
[33]- A.D.P.A., E .1560.
[34]- Bulletin des lois de la République française | 1804-009-22 | Gallica (bnf.fr), p. 75-76.
[35]- Desplat Christian, Le For de Béarn d’Henri II d’Albret (1551), Librairie Marrimpouey, pau, 1986, 144
Cursente B., Les Cagots, Histoire d’une ségrégation, Editions Cairn, 2018.
Jolly Geneviève, Les cagots des Pyrénées : une ségrégation attestée, une mobilité mal connue, Le Monde alpin et rhodanien. Revue régionale d’ethnologie, Année 2000, 28-1-3, pp. 197-222.
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- Rives J, Dîme et société dans l’archevêché d’Auch au XVIIIe siècle, Thèze de 3e cycle, Toulouse, 1972.
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