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    Les fabriques et les marguilliers.

         Une paroisse à l’époque détient des biens qu’elle gère comme un cimetière, un presbytère, souvent une école et même des terres et des bâtiments.

     Ce n’est pas le curé qui administre ces biens mais la fabrique - assemblée de paroissiens.

    Durand de Maillane, dans son Dictionnaire canonique et de

    pratique bénéficiale,définit la fabrique : «…signifie le temporel ,

    ou le revenu affecté à l’entretien à l’ Eglise Paroissiale, tant

    pour les réparations, que pour la célébration du service

    Divin…On entend aussi par ce mot dans l’usage, l’œuvre

    même ou le Corps des Paroissiens qui le composent, & qui

    sont proposés pour avoir soin des biens & des charges de la

    Fabrique…Ce mot de fabrique vient du mot latin Fabrica, qui

    signifie construction….Or comme la construction des Eglises &

    leurs réparations sont un objet important , & pour les dépenses

    qu’elles occasionnent…on assigna des fonds particuliers à la

    Fabrique dès le premier partage des biens d’Eglise, &

    on en confiant ensuite l’administration aux Paroissiens. »[1]

    On peut adjoindre à ces fonctions les procès à intenter.

    Le même auteur mentionne les différents moyens financiers permettant à ladite fabrique de subsister : les legs, les fondations, les quêtes, les locations des bancs de l’église. Pour ce dernier point, il est nécessaire de rappeler que « les Marguilliers peuvent donner à rente, ou moyennement certaines sommes, les bancs des Eglises, ils peuvent aussi vendre ou louer des places vides pour y faire construire des bancs. » L’entretien et la réparation sont à la charge des utilisateurs. Les bancs peuvent être concédés à perpétuité. Il faut y exclure ceux dont bénéficient  - dans le cadre des droits honorifiques ou simplement nommés les privilèges, dans le chœur ou au-devant de la nef, les seigneurs.

    On peut y adjoindre également des amendes infligées à des paroissiens coupables d’infractions envers les règles instituées par la communauté.  Les ports d’images saintes, de bannières, de la croix lors des processions sont autant de moyens d’acquérir des ressources. Il arrive qu’exceptionnellement la fabrique, ne pouvant bénéficier de suffisantes ressources face à des dépenses élevées, décide d’exécuter une perception auprès des paroissiens.

    Qui sont les membres d’une fabrique ? On trouve des laïcs, on les nomme marguilliers. Le mot vient du latin «  matricularius » qui signifie « celui qui tient un registre ». Ailleurs on leur donne d’autres noms comme fabriciens, obriers,  luminiers, bailes…Ils s’occupent du temporel alors que le curé se charge du  spirituel. Les désignations peuvent provenir du curé ou des marguilliers sortants qui présentent leurs candidats qui seront désignés par une assemblée des principaux  habitants, souvent à la suite de la messe. On considérait que le candidat devait être honnête. Ils sont choisis souvent dans la part la plus aisée de la paroisse  - ils sont responsables sur leurs biens du patrimoine de la communauté -, les laboureurs, les négociants…

    L’intégrité n’est pas la seule vertu exigée, les fabriciens se doivent être alphabétisés. Ils dégagent de cette tâche un

    sentiment de l’honneur.

    Son mandat pouvait devait durer un an et ne pas être renouvelable.

    A Montaut, le registre de délibérations en date de mars 1708

    nous donne les noms des deux marguillers désignés et les

    biens de l’église dont ils ont la charge : vingt-deux nappes de

    lin destinées au service des autels et du balustre

    pour la communion, vingt-sept serviettes, cinq aubes dont

    quatre de lin et une de toile qualifiée de très usée , trois surplis

    de toile jugés d’assez bon état, quatre chandeliers dont deux

    de laiton et deux de fer, deux croix de laiton utilisées pour

    les processions, deux lampes au laiton, un chaudron pour

    contenir de l’eau bénite et, enfin, deux clochettes .[2]  

     Leur charge était-elle bénévole ? Lors de leur mandat d’un ou de deux ans  s’effectue le plus souvent sans rémunération. Certains bénéficiaient d’avantages comme l’exonération du logement des soldats, une rémunération.

    Le conseil de la fabrique est composé généralement de quatre membres, un président, le curé, un trésorier et un secrétaire. Outre  le prêtre la composition correspond  aux membres dirigeants d’une association aujourd’hui.

    Ces membres font partie de la « besiau »

    A Mirepeix, l’assemblée de fabrique nomme chaque année  un

    marguillier (marguilher). Yves Suarez mentionne que, dans le

    but de surveiller la paroisse, la municipalité sollicite de la part

    de la besiau la nomination d’un second au XVIIIe siècle[3].

    Lorsque leur mandat s’achève, les membres de la fabrique présentent une reddition de comptes lors d’une assemblée réunissant le Corps municipal, le curé…Ces dits comptes sont divisés en deux parties, les recettes et les dépenses et sont contrôlés notamment par les évêques ou les archidiacres  au moment de leurs visites pastorales, ceci surtout depuis l’édit d’avril 1695 – excepté  dans certaines provinces réunies tardivement.

    Ségolène de Dainville-Barbiche précise que ces visites épiscopales, au XVIIIe siècle, sont devenues rares dans les villes épiscopales.

    D’ailleurs ces visites épiscopales étaient craintes par les communautés – clergé, jurats surtout – vu que l’évêque est entouré de nombreux personnages  notamment des domestiques et son équipage. On doit s’assurer de les accueillir « dignement » (arc de triomphe, guirlandes…), de les  nourrir, de les loger, d’offrir un cadeau.

     

         Alors les comptes sont présentés à une assemblée générale.  Elle rajoute que les fabriques étaient contrôlées par  les procureurs généraux des parlements. « Leurs règlements étaient d’ailleurs homologués par arrêts de parlement. »

     

     Les communautés sont tellement démunies car non contentes

    de ne pas posséder de fabriques elles sont dans l’incapacité

    d’entretenir l’église. On l’observe notamment dans le cahier de

    doléances  d’’Arance, l’article 7 :

    « Observant encore que la dite communauté se trouve sans

    aucun  revenu quelconque pour l’entretien du luminaire de

    l’église ; qu’il n’en est pas de celle-ci comme de plusieurs

    autres paroisses, qu’elles ont une clavette ou fabrique pour

    subvenir aux frais du dit luminaire. » La clavette signifiant

    « caisse » (clefs = clau en béarnais).[4]

    Dans celui d’Assat on pointe du doigt le seigneur. L’article 14

    est bien clair :

    « Qu’attendu que les seigneurs sont les premiers habitants, ils

      contribueront et  seront compris aux constructions et

    réparations  des églises et des presbytères. » [5]

    La communauté d’Angaïs – la fabrique de surcroît -  a un

    différend avec le chapitre de Lescar au sujet des réparations

    de l’église vu qu’a priori celui-ci ne veut rien entendre et que

    cela dure près de quatre années. Dans l’article 4 de ses

    cahiers de doléances il est marqué : « Il sera exposé que  la

    foudre écrasa l’église et le clocher, le 18 janvier 1785, que la

    communauté s’est ruinée à en réparer le dégât  , qu’elle ne

    trouve aucun secours , que le chapitre de Lescar , à qui il a été

    demandé quelque contribution, à raison d’un droit de dîme qu’il

    possède depuis un temps immémorial dans ce lieu , a répondu

    ne pouvoir ni devoir rien faire , attendu que la fabrique devait

    fournir, qu’elle a environ dix pistoles de rente, puis ledit

    chapitre,  par une suite de zèle pour la décoration des églises ,

    détermina de donner 6 livres ; encore ne tomba-t-il pas

    d’accord, puisqu’elles n’ont jamais été envoyées ni savoir

    quand. »

     [6]

    Les paroissiens se devaient de fournir un logement au curé, le presbytère et de verser la dîme vouée à son entretien mais dont la majeure partie était détournée soit par l’évêque soit par l’abbé ou encore par un laïque, ne subsistant pour lui que la portion congrue.

          Pour ce qui concerne le logement du curé, il doit être

    « convenable » (article XXII de l’édit royal d’avril 1695), si cela

    est impossible, les paroissiens sont tenus de payer « le loyer

    de la maison qu’il occupe, & d’en avancer les deniers ». [7]

    Par contre si le curé a l’intention d’en « veut bâtir un plus

    considérable pour sa commodité ou pour son plaisir, les

    Paroissiens ne sont pas obligés l’entretenir. »

    Le bâtiment doit être meublé et, par conséquent, « convenable », ces critères sont imposés par plusieurs édits royaux datés de 1579 (ordonnance de Blois, article 52) -80, 1684 et 1695 (article 22).

    Les obligations imposent aux communautés d’entretenir la nef des églises (le chœur à la charge des décimateurs) , la clôture des cimetières, le logement des curés . Ces derniers sont tenus d’assurer l’entretien « courant » (montant pouvant s’élever à 200 livres au XVIIIe siècle) alors que le presbytère est dévolu aux paroissiens.

    On préconise que le curé doit  bénéficier au moins de deux chambres équipées de cheminées, d’un cabinet de travail, d’une cuisine, d’une cave, d’un cellier , d’une cave et des annexes comme l’écurie.

    Une servante, âgée de plus de cinquante ans, entretient son logis.

        Jean Tucat, dans sa monographie sur Pontacq, nous a

    dressé des comptes de la communauté sur les frais

    occasionnés par des enterrements. En ce qui concerne une

    femme indigente, le cercueil en bois est revenu à 4 livres 4 sols

    et 6 deniers, les clous à 3 sols, le creusement de la fosse à 10

    sols, les 12 pans de corde pour le cercueil à 2 sols et

    la « façon du Cercueil » .Le  total s’élève à 5 livres 9 sols et 6

    deniers. Pour ce qui est celui d’un enfant l’enterrement revient

    à 2 livres et 6 sols (sonneur à cloche = 5 sols, fosse = 5 sols,

    cercueil et planches = 1 livre, façon = 8 sols, 2 cierges et 15

    clous à tête = 8 sols). [8]

     En dehors des paroisses de petite dimension, les curés sont aidés par d’autres prêtres nommés vicaires. Ce sont eux qui les nomment et les rémunèrent en leur allouant une portion congrue d’un montant inférieur à  la moitié de celle qu’ils perçoivent eux-mêmes.

     Pour l’ épauler, on l’a vu, le curé a un assistant, le marguillier,  qui a la responsabilité de s’occuper de sonner les cloches, de louer les bancs aux fidèles, d’acquérir le vin de messe, les hosties… De ce fait, ils nomment  les enfants de chœur, les bedeaux,  Cette tâche peut-être dévolue également à un sacristain.

    A Mirepeix, Yves Suarez énumère d’autres individus autres que les marguilliers ayant des charges bien spécifiques, le « chanteur d’église »,  le « sonneur des cloches ».  De plus, la communauté  nomme et rémunère une famille  dans le but de faire « le pain à chanter » - « récompense régulière du chantre ».

     A Nay, c’est l’un des régents présents dans la localité qui est

    organiste ou chantre.

    Dans ses fonctions, il faut ajouter que c’est lui qui enseigne le

    catéchisme aux enfants et de les surveiller lors des offices

    comme le rappelle la délibération en date de 1756 : « …veiller

    sur leur conduite pendant les offices-divins et de les tenir

    rangés aux processions se tenant luy meme en leur bancq pour

    leur imposer par sa présence et les contenir. » [9]

    A Montaut, les jurats nomment les responsables qui ont la

    charge d’entretenir l’église  et ses biens. Outre la nomination

    d’un ou de deux marguillers,  ils désignent celui qui est chargé

    de distribuer le pain béni lors des messes du dimanche et du

    ramassage des dons en vue de la célébration de messes pour

    les défunts.

    Egalement, leur rôle est de nommer le carillonneur, sa fonction

    ne consiste pas seulement à sonner l’angélus, les messes, les

    mariages, les baptêmes… mais aussi d’ensevelir les morts

    après avoir creusé leurs tombes au cimetière Saint-Hilaire,

    nettoyer le sol de l’église en terre battue tous les quinze

    jours.[10] 

    Ces différentes tâches sont rétribuées modestement mais comme le souligne le registre  il est de coutume de pratiquer des « enchères ».

    Quelques rétributions sont notées. Le 3 mars 1777 il est

    consigné sur le registre que le marguiller est payé 4 livres (et

    pour augmenter ses gains, il est aussi noté qu’il doit blanchir,

    repasser le linge d’église pour un montant de cinq livres en

    plus) quant au carillonneur son salaire s’élève à 6 livres .[11]

          Comme le rappelle Ségolène de Dainville-Barbiche les fabriques opèrent  également dans la gestion d’institutions liées à l’église paroissiale : « assistance aux pauvres, confréries, écoles. »

     D’après Emile Sévestre, les fabriques sont attaquées à la veille de la Révolution. En effet, selon lui dès 1787 les municipalités sont à l’œuvre, suivies des comités nationaux de 1789. Le 14 décembre 1789 l’article 50 de la loi municipale votée par l’Assemblée nationale constituante précise que l’autorité municipale rurale doit administrer « les biens et les revenus communs des paroisses ».

    Les municipalités révolutionnaires chercheront à accaparer leurs attributions religieuses. En 1803, les fabriques deviennent de véritables établissements publics  et cela va perdurer jusqu’en 1905, date de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat qui mettra fin à leur existence.

     

     L’assistance des pauvres

          La paroisse, depuis le Moyen Age, a comme mission également d’assister les pauvres, d’entretenir les locaux liés au culte à travers la fabrique.

    Elle  alimentait un esprit de clocher. L’endogamie, les liens  quotidiens entretenus entre les habitants, la mémoire collective, les rites religieux effectués en commun, les travaux effectués ensemble, l’entraide contribuaient à développer cet esprit.

    Ségolène de Dainville-Barbiche note que « Des quêtes, des dons, les revenus de fondations, alimentaient les secours distribués aux pauvres domiciliés sur la paroisse. »

    Elle procurait des avantages comme la charité envers les nécessiteux mais également entretenait des relations de dépendance entre les notables et les autres, des  surveillances des conventions contraires aux bonnes mœurs…

    De nombreuses paroisses tant dans les villes que dans les

    campagnes destinent une partie de leurs revenus à

    l’assistance des pauvres. Des bureaux de charité sont alors

    chargés de les gérer. On y trouve le curé, souvent des  femmes

    désireuses de consacrer de leur temps pour aider leurs

    prochains jouant le rôle de trésorières ou Procureures de

    charité. Le curé préside les assemblées  , recueille "les

    suffrages, à la pluralité desquels doivent se faire les

    délibérations ; & et en cas de partage d’opinions, il a la voix

    prépondérante. En l’absence du Curé, c’est à l’ancien des

    Marguilliers à y présider… ». [12] Les marguilliers, selon le

    même auteur, qu’ils soient récemment ou anciennement

    nommés, « doivent être invités ». Le « Seigneur » dans

    certaines paroisses rurales y assiste mais peut également

    présider les séances.

    Le même auteur signale que les assemblées générales  de charité dans les paroisses rurales – de même que les assemblées ordinaires – sont « composées du Curé, des Seigneurs & dames du lieu , (s’il y en a) ainsi que du Juge & du Procureur fiscal, lorsqu’ils demeurent sur le lieu , ou qu’ils veulent y assister ; du procureur de charité , des Marguilliers , tant en charge qu’anciens , & des principaux habitants…ces assemblées seront préalablement indiquées au prône de la messe paroissiale le Dimanche précédent. »

    Ségolène de Dainville-Barbiche note que l’assistance paroissiale s’est généralisée dans la seconde moitié du XVIIIe siècle du fait des actions  de  ministres réformateurs comme Turgot, Necker ou d’intendants.

    Les séances ont lieu communément dans les presbytères « ou autre lieu destiné à cet effet ».

    Jousse nous informe que dans certaines grandes paroisses il

    peut exister deux assemblées de charité, l’une composée

    d’hommes de « considération…de condition honnête » tels des

    marchands, des officiers de justice…et l’autre de « Dames de

    Charité » c’est-à-dire « des dames & demoiselles de piété, qui

    sont aussi choisies par les Dames de cette assemblée. » [13] 

    Dans ce cas, c’est la « compagnie des messieurs de Charité »

    qui  « administre tous les revenus des

    biens appartenans aux pauvres, & c’est elle qui règle dans ces

    assemblées, de quelle manière la distribution des aumônes

    aux pauvres honteux de la Paroisse doit être faite, & de quoi

    doivent  composées lesdites aumônes. » Quant à la

    « compagnie des Dames de Charité » , elle est en charge de

    « …de tout qui concerne l’assistance & le soulagement  des

    pauvres malades de la Paroisse , et de l’assistance des Enfans

    au lait & à la farine, & de la distribution des linges ,

    lits, habits, meubles & autres choses qui par l’usage & la

    bienséance ne peuvent être administrées que par elles."

    [14] 

     

    Ces Dames de la charité se soucient d’aider les pauvres, les infirmes, les malades. Les revenus proviennent des quêtes effectuées lors des messes et des troncs ou les assemblées des charités.

    A Montaut, un officier municipal est chargé de gérer le bureau

    des pauvres, il porte le titre de « trésorier des pauvres ». Un

    dossier au titre « Pièces de comptabilité du bureau des

    pauvres » nous renseigne.  Le trésorier, aux côtés du

    curé,  a pour fonction de trouver l’argent et de recenser les

    miséreux. Ces sommes proviennent comme on vient de le voir

    de quêtes procédées lors des cérémonies comme le mariage,

    les messes, mais aussi de souscriptions de la part d’une partie

    des membres de la communauté s’engageant à  donner de

    l’argent. Ce dossier nous informe des raisons de ces dons,

    voici quelques exemples : « 4 livres à un malade dont il a

    besoin pour son bouillon, 4 livres à un homme dans le besoin

    pour acheter une culotte,…9 livres à un affligé de la vue

    pour aller consulter un médecin à Tarbes… ».[15]

     L’argent peut être utilisé à fournir du pain par le biais de cartes distribuées. La distribution est pratiquée  par le boulanger  aux pauvres. Ces subsides permettent également effectuer des distributions de bouillon, du vin, du lait, des vêtements, des médicaments, du bois, mais aussi de l’argent.

    L’assemblée de charité a le pouvoir de donner ou de « retirer »

    l’assistance. En effet, il n’est pas permis d’assister les pauvres

    « adonnés au vin ou à la débauche, les jureurs  &

    généralement ceux & celles qui seroient de mauvaises

    mœurs, ni pareillement ceux qui négligent d’envoyer leurs

    enfants à l’école, aux catéchismes & instructions. » [16]

    Jousse rappelle qu’il est parfois nécessaire de lever une taxe

    sur les paroissiens (même le curé) lors des disettes ou des

    famines lorsque les biens consacrés à la Charité ne suffisent

    plus.[17]

     Exemple de Montaut.

    En 1785, le curé de la paroisse Pommez adresse un courrier 

    au  trésorier des pauvres Matardonne-Bergé afin d’assister des

    nécessiteux  « Vous paierez trente six livres deux sols aux

    débiteurs de votre rôle de recette, scavoir , sept livres,

    treize sols   à Mateu, trois livres quatre sols à Clariot, sept

    livres, quatre sols à bergerot, cinq livres, quatre sols à Seriso,

    trois livres, sept sols à Soubiran et sept livres à Boué. Etant

    donné leur misère. » Viennent ensuite les signatures des

    jurats. [18]

     

     Les écoles paroissiales

         L’enseignement élémentaire dispensé dans les écoles par des maîtres (ou régents) ou maîtresses est surveillé par le curé de la paroisse. Deux mesures, l’édit d’avril 1695 et la déclaration du 13 décembre 1698 (plus tard en 1724), ont soin que les écoles paroissiales se multiplient à travers le royaume notamment dans le but d’éradiquer le protestantisme. Mais  l’effet est loin d’être acquis, toutes les paroisses ne sont pas pourvues de ces écoles gérées par les fabriques.

    Si la paroisse n’a pas pu recruter un laïc en tant que régent c’est le curé  ou le vicaire qui se charge de l’instruction.

    En ce qui concerne les écoles de charité, Jousse écrit que l’on distingue celle pour les garçons pauvres et celle des filles pauvres. Le curé est responsable de l’éducation, du choix des livres, de l’incitation d’assister aux leçons. Les biens consacrés sont gérés par les marguilliers.

    A l’opposé de personnalités opposées à l’instruction obligatoire

    comme l’Intendant d’Etigny, une lettre d’un desservant du

    diocèse d’Oloron datée du 25 mars 1737 démontre que des

    curés pensent le contraire. « Cet intendant a défendu , dans

    certaine paroisses du diocèse, de lever une modique somme

    d’argent sur les habitants pour payer les gages des maîtres

    d’école. Cette défense est directement opposée aux

    dispositions de la déclaration du roi, du 14 mai 1724, qui

    permet de lever sur les habitants des paroisses jusqu’à la

    somme de 50 écus pour ces gages. L’intendant dit que les

    curés suffisent à instruire les enfants de leur religion. Mais les

    curés ne peuvent tout faire. L’intendant trouve

    que, par le moyen de ces maîtres d’école, grand nombre

    d’enfants à lire et à écrire, ce qui aide à en former des

    praticiens qui désolent les paroisses, et que, d’ailleurs, ceux qui

    savent lire et écrire regardent la culture des terres comme au-

    dessous  d’eux. Mais ce n’est pas dans les petites écoles que

    se forment les patriciens, c’est chez les procureurs des villes et

    des bourgs ; et, à l’égard des laboureurs, ils n’en seraient pas

    moins assidus à leurs travaux quand  ils sauraient tous lire et

    écrire. Il est certain que la moitié de ceux qui font cette

    profession en Béarn savent fort bien lire et écrire et qu’ils ne

    sont pas d’avis pour cela de laisser leurs terres incultes ». [19]

    Des exemples

    Prenons d’abord celui de Billère.

    Lorsqu’il décrit la localité l’abbé Bonnecaze écrit ; « Ce village

    qui est petit ne fait qu’un soldat pour la milice. Sa situation est

    un peu aquatique et malsaine, excepté quelques maisons et

    l’église qui sont sur une éminence. Billère a pour

    patron Saint Laurent , diacre et martyr , et que le 10 août , jour

    consacré par l’Eglise à ce saint lévite, attire chaque année ,

    dans cette paroisse , un grand concours de fidèles . On y

    accourt de Pau et de tous les environs pour invoquer

    ce glorieux martyr. Parfois, de véritables prodiges s’opèrent

    dans cette église en faveur de ceux qui vont y prier le saint à

    qui elle est dédiée. » [20]

     Son statut de paroisse naît au VIIIe siècle sous le patronage de Saint Laurent. Ce diacre de l’Eglise de Rome – est responsable des biens -  est né en Aragon entre 220 et 225, exactement à Osca. Il meurt  en martyr à Rome en 258. Par suite de l’édit de persécution de l’empereur  Valérien  prohibant le culte chrétien, il est arrêté et condamné à être brûlé vif sur un gril sous le pape Sixte II. On le représente soit tenant un gril dans sa main soit couché dessus. Il est un des saints  les plus célèbres du Moyen Age. Pierre et lui étant les saints patrons de Rome, ceci explique que l’on donne son nom à des communes, rien qu’en France on en dénombre 84. On lui prête le pouvoir de guérir les brûlures. Dans le village de Denguin, l’église Saint Pierre renferme une copie d’un tableau de Rubens daté de 1622 représentant son martyre. Sa fête s’effectue le 10 août.

    La première paroisse de  Billère date probablement du Xe bien que l’historien Pierre de Marca remonterait plutôt son existence au XIIe siècle d’après les documents qu’il a compulsé. Elle est  rattachée au diocèse de Lescar. L’église  qui nous apparaît actuellement présente des éléments anciens  de construction du XIIIe siècle. Son plan est simple, une simple nef avec  un bas-côté méridional se terminant par une abside. La sacristie, construite en 1687,  se positionnait à l’Est du bâtiment tandis que l’entrée se pratiquait, à la même année, sous un porche situé à l’Ouest, où un mur-clocher à pignon fut élevé au XIXe siècle. Le premier cimetière se localisait au sud de l’église, ceci jusqu’à la fin du XVIIe siècle, époque à laquelle on décide de le remplacer par un autre au nord de l’église. Le presbytère se trouve en face de l’église.

    Les curés de Billère sont des congruistes (ne reçoivent que la « portion congrue » ou diminuée)  de la dîme qui est perçue par le chapitre de Lescar et les Barnabites localisées dans la même cité. Ils sont assistés par des vicaires ce qui démontrent une relative aisance de la communauté des paroissiens.

    Les curés dont nous avons de nombreux renseignements pour la période qui nous intéresse se nomment Louis de Serreseque qui officia de 1692 à 1736,  Guillaume Sepe , ancien secrétaire de l’évêque de Lescar et  Jean Casassus qui sera le dernier curé de la commune sous l’Ancien régime, exactement en 1791. Il s’avère qu’il acceptera, lui et le vicaire, un dénommé Baylou ou Baïlou originaire de Nay, de prêter serment à la Constitution civile du clergé. On a gardé de lui le serment prêté le 28 janvier 1791 : « Après avoir fait le signe de la croix, je déclare , curé de Billère, que je professe et fais professer à mes paroissiens la religion catholique, apostolique et romaine, hors de laquelle il n’y a pas de salut et dans laquelle je désire vivre et mourir et que je serai fidèle à la nation, à la loi, au Roi et à maintenir la Constitution. Ce 28 janvier 1791. » Sur sa tombe on peut lire ces mots : «  Cette sépulture a été faite en 1787. Ainsi passe la gloire du monde. Le pasteur de ce lieu ne vit plus.  Jean Casassus est enterré en ce lieu ténébreux. Brebis, priez pour lui. » Il est nécessaire de corriger la date du décès qui a eu lieu en réalité le 18 octobre 1791.

    Par la suite, un franciscain prend la relève, Larroche. On sait

    de lui qu’il fut chapelain de la confrérie des Pénitents gris de

    Pau, qu’il ne vint pas s’installer à Billère mais qu’il résida à Pau

    où il mourut en 1803. L’église Saint-Laurent perd alors son

    statut puisqu’elle dépend de celle de Saint-Martin de Pau. La

    fabrique, elle-même, est supprimée  en conformité des lois du

    19 août 1792 et du 3 novembre 1793. Plus haut on a

    mentionné le rôle des marguilliers. A Billère, le marguillier,

    comme par exemple un dénommé Pierre Barrère [21], afferme 

    le revenu de la fabrique pour trouver des subsides à quoi il faut

    ajouter les quêtes opérées lors des messes le dimanche et les

    jours de fêtes religieuses. Son budget doit être supervisé par

    les jurats billérois.

    Nous possédons un document en ce qui concerne la cité au

    sujet d’une action de la part de la fabrique  consistant à la

    réparation du presbytère, ceci en date du 10 janvier 1780. Les

    travaux concernent  les murs nécessitant d’être soit recrépis

    soit refaits comme celui attenant à la cheminée, la charpente et

    sa couverture, la mise en place d’une clôture. [22] Ils sont

    étudiés par l’ingénieur Duchesne qui avance un montant qui

    s’élève à 436 livres 15 sols. Ils sont cautionnés par

    l’Intendant de la Généralité d’Auch Gabriel Isaac Douet de La

    Boullaye.

    En 1783, autre décision de la paroisse de Billère, l’installation d’une cloche : « l’an 1783 et le 3 septembre a été fondue dans la grange du sieur de Caplane par un espagnol nommé Philippe la grande cloche, en présence des jurats, du sieur curé et de presque toute la paroisse. »

    Le 6 septembre de la même année on procède à sa

    bénédiction et on lui donne comme nom  Vincent et Victoire.

    Les parrains sont Victoire d’Assat , habitante de la localité et le

    baron de Gabaston et conseiller au Parlement de Navarre

    Vincent de Noguès.[23] 

    Le presbytère est vendu comme bien national en 1796 aux citoyens Pradel et Dabbadie.

    Ces prêtres veillaient avec la fabrique à entretenir le lieu de culte.

    Dans le registre paroissial concernant le XVIIIe siècle, le curé Louis de Serreseque  annote à la date du 24 septembre 1729 : « Du 24 septembre 1729, j’ay fait achepter et travailler aux dames religieuses de Notre Dame  de Pau des ornements complets, l’un blancq, l’autre noir et quatre corporaux avec leur dentelle. »

    En 1783, il est décidé de remplacer la cloche : « L’an 1783 et le trois septembre  a été fondue dans la grange du sieur de Caplane par un espagnol nommé Philippe la grande cloche en présence des jurats, du sieur curé et de presque toute la paroisse. »

       La paroisse et la communauté villageoise peuvent vivre des

    relations conflictuelles comme dans le village de Mirepeix. 

    Yves Suarez, auteur d’une monographie portant sur la localité,

    démontre que la communauté a cherché à supplanter son 

    autorité sur celle de la paroisse. Il écrit qu’elle a profité de

    l’ « absentéisme seigneurial »  afin de « bâtir la maison

    commune qui supplanta l’église dans la vie du village ». Il

    rajoute que c’est la communauté qui prévaut vu

    que c’est elle qui « supportait tout le poids financier »

    (« rétribuait la célébration de nombreuses messes »…)  et, de

    ce fait, surveille « de près le sieur curé. Il se méfiait de cet

     habitant singulier dont l’ascendant sur les fidèles était grand. » [24] 

    Ségolène de Dainville-Barbiche écrit, à ce sujet, que du fait que les curés administrent les paroisses avec des laïcs il est indéniable que des conflits éclatent entre eux  « portés auprès des évêques, ou des cours royales par voie d’appel comme d’abus. » 

    La rémunération du curé, un dénommé Jacques Lacroix, en

    1681, s’élève au « quart des droits décimaux de ladite paroisse

    de Mirepeix » ce qui correspond à « dix un, savoir du gros

    grain, millet, lin, agneaux et laine ». [25]

    Un incident se poursuit quelques années plus tard lorsqu’un curé « prétentieux »  se montre exigeant pécuniairement. En effet, il exige « six livres par année pour fournir le pain des hosties » ce qui entraîne la réaction des syndics Jean de Suberbielle et David de Rangole qui « ont poursuivi l’instance qui avait été formée par le sieur curé… ». Ceci se passe le 13 décembre 1725.

     


    [1] - Durand de Maillane, Dictionnaire canonique et de pratique bénéficiale, article Fabrique, Tome 1er,

          Imprimerie Jean-Baptiste Bauche, Paris, 1761.

    [2] - A.D.P.A., Montaut BB1.

    [3] - Suarez Yves, Mirepeix, la vitalité d’une communauté béarnaise au XVIIIe siècle, Revue de Pau et

         du Béarn, n° 10, 1982, p.170.

    4] - Cahiers de doléances d’Arance, BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.306.

    [5] - Cahiers de doléances d’Assat, BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.318.

    [6] - Cahiers de doléances d’Angaïs, BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.294.

    [7] - Jousse Daniel , Traité du gouvernement spirituel et temporel des paroisses, chez  Debure Père,  

          Saint Paul, 1769, p. 19.

    [8] - Tucat J, Histoire de la région de Pontacq (Béarn et Bigorre) de 1701 à 1789. Notes et

          documents », éditions Lacrampe , Lourdes, 1951, p 28.

    9] - A.D.P.A., Nay BB 14 f°9.

    [10] - A.D.P.A., Montaut, CCS f°19.

    [11] - A.D.P.A., Montaut, CC3.

    [12] - Jousse Daniel, op. ci.t, p 223.

    [13] - Idem., p. 226.

    [14] - Idem., p. 227.

    [15] - A.D.P.A., Montaut, BB2.

    [16] - Jousse Daniel, op. ci.t, p 219.

    [17] - Idem., p 239.

    [18] - A.D.P.A.,  Montaut, CC7.

    [19] - Arch. Nat°., G 8 643, lettre du 25 mars 1737.

    [20] - Abbé Bonnecaze, Etudes historiques et religieuses du diocèse de Bayonne, Année 1900 .p.130.

    [21] - AD.P.A. , III E 3026, f° 187. Année 1788.

    [22] - A.D.P.A.,  C 72.

    [23] - Arch com., Billère  GG2.

    [24] - Mirepeix, la vitalité d’une communauté béarnaise au XVIIIe siècle, Revue de Pau et du Béarn,

           n° 10, 1982, p.170.

    [25] - A.D.P.A., B 909.

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    3°) LE CURE

     

       Le curé se présente à ses paroissiens avec sa soutane préconisée par le Concile de Trente, à la fin du XVIe siècle (décrétale de Sixte V de 1569). Le noir de sa tenue correspond aux symboles de la simplicité, de sobriété. Il faut souligner que dans l’Eglise primitive le prêtre ne se distingue pas par un vêtement particulier. Quant à la tonsure elle est préconisée.

    C’est l’Assemblée Constituante qui supprime le costume religieux  suivi de la loi du 18 août 1792. Le port de la soutane reviendra lors de la Restauration.

    Ségolène de Dainville-Barbiche mentionne que toutes les cures des paroisses « n’étaient pas desservies par le clergé séculier ; certaines appelées aussi prieurés-cures, dépendaient d’un ordre monastique ou de l’ordre de Malte : le curé était un membre de l’ordre, nommé par celui-ci et institué par l’évêque. »

    Elle rajoute que les curés détenaient le « gouvernement spirituel de leur paroisse », les paroissiens devaient être baptisés, mariés, enterrés  dans la paroisse de leur résidence, excepté le jour des noces où elles devaient s’effectuer dans celle de l’épouse.

         Nous connaissons souvent le nom des curés en consultant les registres de délibérations des localités. Par exemple, pour le cas de Nay, nous savons qu’entre 1729 et 1734, le prêtre s’appelle Dupoux, et que dans la seconde moitié du XVIIIe siècle deux curés dénommés Marsan et Castaing vont se succéder.

     Il doit servir de porte-parole des décisions royales à la fin de la messe (c’est lui qui du haut de sa chaire annoncera la tenue des Etats généraux ), a l’obligation de placarder à la porte de l’église les affiches de nature judiciaire, doit donner les sacrements, participe à l’assemblée de la communauté villageoise, peut servir d’interlocuteur avec le reste du « monde » - notamment le seigneur - vu qu’il est un des individus les plus alphabétisés du village  . . ., annonce lors de la messe dominicale sur sa chaire  les mariages à travers la publication des bans, les jeûnes …, les mandements épiscopaux…, contrôle la catholicité des sages-femmes…

    Il s’occupe également de l’assistance aux pauvres, de l’enseignement par le choix du maître d’école par exemple, de désigner la sage-femme.

    En écoutant les confessions de ses paroissiens il connaît leurs secrets et peut détenir une mainmise sur la moralité de tous.

     

         Les cahiers de doléances d’Angaïs notent  dans le préambule,  après s’être plaints du mépris que subit le Tiers Etat – « surtout en Béarn » -,  que l’esprit de la philosophie des Lumières a touché le clergé béarnais ou du moins une partie. « les droits des curés mêmes, qui, par leurs lumières , leurs bons exemples, leur fidélité envers leurs souverains , apaisent leurs troubles et les séditions , font le bonheur du peuple , le consolent dans ses peines , l’aident dans ses nécessités , le visitent dans les maladies , terminent leurs procès, veillent et fournissent , au préjudice de leur petit nécessaire , à la décoration des églises , sont foulés et presque anéantis , tandis qu’un autre ordre d’ecclésiastiques , qui n’ont aucune surcharge , vivent dans le luxe et l’abondance. » 1

    La vie de tout individu à l’époque, répétons-le, est rythmée par la religion.

    Le juriste Jousse mentionne qu’on « entend par Paroisse, une Eglise dans laquelle le peuple d’une contrée limitée anciennement, est obligée de s’assembler les Dimanches & Fêtes , pour entendre la Messe, participer à la célébration de l’Office Divin , & pour y recevoir les instructions concernant les devoirs de Chrétiens. » 2

    Le curé veille à ce que ses ouailles soient présentes lors des messes dominicales et celles que l’on qualifie « d’obligation ».

    A Nay, une lettre du Procureur nous apprend qu’un problématique absentéisme des fidèles se produit lors des messes : de nombreux membres de « Naï ne font aucun exercice de Religion. ». 3

    Une lettre d’un curé du diocèse d’Oloron datée du 15 juillet 1755 est alarmiste en rapport avec les mœurs de ses concitoyens. « La dissolution des mœurs des gens de la campagne, pendant les dimanches et les fêtes, est portée à un tel point que, dans aucun temps, l’exécution des édits et ordonnances royaux se concernant  n’a été aussi nécessaire. On ne voit, en ces saints jours entièrement consacrés au culte  qu’on doit à Dieu, que danses publiques, jeux scandaleux, attroupements dans les cabarets, d’où s’ensuivent  mille désordres et excès. Il y a plus de quarante ans que je travaille dans le ministère  en qualité de curé, mais je n’avais jamais vu l’irréligion   et les débauches des gens de campagne portées  à un pareil excès. Les cabarets défendus  aux domiciliés, les fêtes et dimanches, sont remplis jusqu’aux basses-cours, tandis que les églises sont désertes, et les fêtes les plus solennelles sont les plus profanées.  On voit aux cabarets  d’un côté une bande de danseurs, une autre de joueurs  et une troisième d’ivrognes et de scandaleux, qui ensuite courent  toute la nuit, commettent des vols et portent l’alarme dans les paroisses. » . 4

     

          Au début du XVIIIe siècle leur nombre s’élève à une centaine de jours .Ne pas s’y astreindre équivaut à un péché mortel vu  que sanctifier le dimanche – jour du Seigneur -  fait partie des dix commandements.

    Bien entendu, le prêtre peut être amené à accepter que l’on ne puisse pas assister à cet acte pour des raisons valables (maladie, animaux sollicitant  des soins…), il accorde alors qu’au moins un membre de la famille vienne.

    Pour accommoder les paroissiens, le curé consent que deux messes (messe basse  tôt le matin, grand- messe ensuite) lors des dimanches et des jours fériés soient célébrées ceci pour des raisons pratiques. En effet, par peur d’être cambriolés ou de subir un incendie du fait de leurs absences, ils agréent   qu’il n’y ait  qu’un seul membre du couple  à la fois.

    Ils s’attachent  à qu’ils se comportent respectueusement, qu’ils chantent les cantiques en béarnais, qu’ils se  confessent et qu’ils communient si possible une fois dans l’année et ce à la fin de Carême, au  temps de Pâques.

    Au sujet de la confession individuelle, elle est crainte par les paroissiens  surtout dans les campagnes pour plusieurs raisons. On appréhende  que le curé ne respecte pas le secret de la confession, la honte de révéler des péchés peut aussi être un frein.

    Le meuble, le confessionnal, se répand surtout à partir du XVIe siècle , exactement en 1551 au  Concile de Trente lors de sa session sur le sacrement de Pénitence qui astreint tout fidèle à se confesser de tous ses péchés mortels  avant de communier  Le cardinal italien Charles Borromée – archevêque de Milan - aurait  été l’instigateur du meuble en le recommandant en 1565 au Concile. De Milan, il se répandit en Europe.  C’est également le dit concile qui obligera les fidèles à se confesser « au moins une fois l’an ».Son but est de permettre l’anonymat de la confession. De plus en plus sa décoration l’embellira de plus en plus.

     

         Ségolène de Dainville-Barbiche précise que pour son entretien le curé « jouissait des biens et revenus attachés à la cure et distincts de ceux de l’église paroissiale : dîmes, portion congrue (fixée à 300 l. en 1686, à 700 l. en 1786), casuel, fondations, sur les produits desquels il payait les décimes, impôt dû par le clergé au Roi. »

    Les curés font payer les messes, à Pontacq, par exemple, elles sont facturées 12 sols en 1775, 10 sols en 1778.5  

    Outre le casuel (paiement des services religieux), l’administration des sacrements, subsistent les dons comme les quêtes. Ces dernières dépendent de la générosité des donateurs possesseurs de numéraires qui ne sont pas nombreux comme les aristocrates et les bourgeois. Ils peuvent également compter sur des legs mais qui s’avèrent le plus souvent modestes.

     

         Michel Péronnet écrit que le gouvernement royal a cherché à uniformiser les conditions des curés. Si la portion congrue est fixée à 300 livres pour les curés de 1629 à 1768, celle des vicaires est de 150 livres. En mai 1768, les deux s’élèvent pour la première à 500 livres. Enfin, en septembre 1786, la portion congrue des curés passe à 700 livres et celle des vicaires à 350 livres.

    Le même auteur rappelle que les curés se sont battus pour une hausse de la portion congrue à partir de la deuxième partie du XVIIe siècle notamment par le biais des cahiers de doléances.6

     

     L’Intendant Lebret  écrit en 1704 que presque tous les curés des paroisses béarnaises jouissent de petits revenus et  « sont réduits à la portion congrue ». 7

     

         Christian Desplat analysant le recrutement des ecclésiastiques note que « les gradués emportaient sans difficultés les meilleures cures, moins par la vertu de leur titre que par celle de leur naissance. » Le concours n’est pas d’un usage courant comme cela se produit en Bretagne. Le même auteur précise que l’évêque de Lescar a nommé seulement 14,08% des cures durant tout le XVIIIe siècle. Une enquête datée de 1680 portant sur 21 cures du diocèse de Lescar montre que 87,5 % des curés sont nommés par des laïcs. 8 Le recrutement des curés s’établit également par choix du roi, d’abbés.

       Jean Tucat dans sa monographie sur Pontacq donne une explication de la dîme qui permet d’assurer le service du culte. Mais elle a été souvent  usurpée « en partie  par des féodaux  qui les gardèrent malgré la réforme grégorienne. La dîme varie suivant les temps et suivant les lieux. Deux catégories de dîme, celle « Ecclésiastique » et celle « Seigneuriale ». « Elle comprenait la grosse dîme et les petites dîmes  avec les novales prélevées sur les produits des terres nouvellement défrichées. » 9

    Il rajoute que les dîmes étaient affermées, il l’explique en énonçant plusieurs raisons. Il cite les convenances et les impossibilités matérielles. Le problème du recouvrement se posait, il fallait aller chercher  les produits dans les champs, les fermes,  ce qui posait parfois des réactions négatives de la part des gens qui étaient tentés de faire appel à la justice, parfois d’utiliser la violence… Il fallait alors stocker les parties de la récolte recouvrée, la traiter (dépiquer, vanner…). Ce qui explique que l’on afferme. Il explique que les paysans sont opposés à la dîme car sa part prélevée sur les récoltes est relativement élevée (sur le revenu brut) et qu’elle est soutirée par des « intérêts privés », ceci malgré le fait qu’elle a pour but de servir la religion. 10

         Christian Desplat, lui, écrit que le « principe de la dîme n’était pas remis en cause mais, dans une province  où cette redevance était presque totalement  usurpée par des laïques, la perception aurait dû soulever des tempêtes. Ce ne fut pas le cas. Quelques communautés seulement évoquèrent la question de la quotité … ». Il ajoute que les Béarnais s’opposent à la « multiplication des dîmes : prémices (offrande religieuse perçue sur les premiers fruits de la récolte) , la paccaire (sorte d’abonnement mensuel d’une partie de la récolte en plus de la dîme)  , la dîme des oisons (dîme payée avec des animaux  alimentés avec  des grains dont on avait payé déjà la dîme) et surtout les « dîmes novales » (terres nouvellement défrichées, mises en culture)  . Un constat est à avancer, le « poids de la dîme s’était alourdi et son revenu était détourné de sa destination légitime. » 11

    Dans les cahiers de doléances béarnais on retrouve souvent ce grief, notamment dans celui de la communauté d’Aubertin dans l’article 14 : « Qu’on ne payera la dîme  à l’avenir que distraction faite de la semence, attendu que, suivant l’usage actuel, on paye chaque année la dîme du même grain, celui qui a servi pour la semence. » 12

       Pour citer l’exemple de Barzun, la grosse dîme est divisée en deux, pour une moitié elle est versée à l’abbé laïque, tandis qu’une autre est divisée. Un quart est donné au curé qui l’afferme pour 184 livres en 1748 chaque année. Il l’augmentera par la suite fortement pour atteindre 600 livres en 1786. Un autre quart est destiné à l’abbé de Saint-Pierre-de-Bigorre qui lui-même l’afferme pour une somme moins importante c’est-à-dire 38 livres pour une durée de huit ans chaque année, ceci en 1703. 13

    Les décimateurs, comme on vient de le voir, ne la perçoivent pas directement, ils l’afferment à un fermier des dîmes. Cela se fait juridiquement par  le biais d’un contrat de bail écrit. Ce dit fermier se charge alors de sa perception après avoir décidé avec le décimateur de la somme. Il se fait rétrocéder ce montant négocié tout en ajoutant un certain gain. Le producteur peut s’acquitter en s’abonnant, un accord est conclu incluant  le montant qui sera versé chaque année dépendant de la surface du terrain.

     

     La part de la dîme prélevée sur les revenus des paysans était importante. Mirabeau démontrant les raisons de son impopularité déclare qu’elle doit être supprimée et ceci sans rachat vu qu’elle était « oppressive » Il argumente en donnant des exemples.

    « Supposons le produit d’une terre quelconque  à douze gerbes, les frais de culture, semences, avances, récolte, entretien, etc., emportent au moins la moitié ; ci (6). Les droits du roi  sont évalués à un huitième  de la récolte ; ci, une gerbe  et demie. (1et ½) Les droits du roi de nouveau, pour l’année de jachère ; (1 et ½) Reste au cultivateur s seulement trois gerbes. (3)Dont il donne au décimateur. (1) Il lui reste les deux tiers  de son produit net. (2) Il conclut par conséquent : « le décimateur emporte donc le tiers de la portion nette du cultivateur. » Cette démonstration chiffrée lui permet d’affirmer que cette redevance entraînait pour l’agriculture de incertitudes vu que cela lui retire de la paille , de l’engrais mais aussi d’autres produits touchés par elle comme le lin, les agneaux…Il finit par s’exclamer que la dîme n’est pas une « propriété ». 14 Non content de pénaliser le paysan sur  des produits agricoles cultivés sur des champs, la dîme est perçue aussi sur des denrées dites de basse-cour. De plus, il faut se rappeler que la volaille était nourrie par des aliments eux-aussi imposés.

    On ressent bien cette perception d’accablement  des paysans à ce sujet dans le cahier des griefs d’Arros. Article 5 : « Indépendamment de la prémice en grain, chaque habitant qui nourrit  des poulets, quoique nourris avec leur propre grain , duquel la dîme en a été payée, est obligée d’en donner un au sieur curé  et un autre au gros décimateur . Ne serait-il pas d’une justice souveraine de fixer la rétribution ? de rejeter l’entretien des curés  sur la dîme ecclésiastique  et subsidiairement sur la dîme inféodée, ou bien de rejeter la dîme des dits curés sur les gros bénéficiers  et décharger par là les pauvres habitants qui sont assez accablés  par le poids des impositions de l’Etat. » 15

     

         Il faut ajouter à ces prélèvements sur les céréales d’hiver (dominants) et l’élevage ce que l’on nomme la dîme verte (sur les fruits, les légumes, le lin…). En ce qui concerne les plantes nouvelles, par exemple le maïs en Béarn, la dîme novale est perçue. Par contre, les produits issus des jardins en sont exclus ce qui explique que les propriétaires vont accroître leur production ignorée dans cet espace  Cette exemption est d’ailleurs rappelée dans le cahier de doléances de la communauté d’Argagnon qui souhaite que cela perdurera dans le futur. Article 8 : « Que chaque habitant aura son jardin exempt d’aucune dîme ni prémice à y pouvoir prétendre sur aucune espèce de fruits ni légumages. »16  

     

         En théorie, dans le passé, les monastères n’imposent pas de dîme vu qu’ils sont autosuffisants de par leurs possessions foncières. Mais cette situation évoluera puisque les évêques, les couvents  la récupèreront.

    Cette évolution est alors d’autant plus mal  ressentie qu’elle peut prendre alors une connotation vindicative et même « révolutionnaire » de la part de ceux qui la payent (ici vis-à-vis des chanoines, de Lescar). Article 6 du cahier des doléances de Limendous : « Ils demandent à être déchargés d’une dîme que le chapitre de Lescar perçoit dans ledit lieu : attendu que ce corps est inutile dans la vigne du Seigneur, il doit être supprimé, attendu que dans les différentes calamités  qui ont affligé la communauté  de grêles  presque tous les ans, d’épizootie et charbon pestilentiel, elle n’a jamais ressenti les effets de ces riches bénéficiers. » 17   

    De même que des laïcs, dans ce cas-là on la nommera « dîme inféodée ».

     

        Christian Desplat mentionne que la « quotité de la dîme était variable mais plus souvent supérieure au dixième qu’inférieure… ». 18  

    Il indique que dans le diocèse de Lescar les dîmes étaient «  payées dans les maisons non dans les champs » pour la plupart  tandis que dans le diocèse d’Oloron c’est « sur le champ ».Les décimateurs laïques percevaient une grande part de la dîme ce qui rendait la condition des curés plus dramatique, les contraignant pour subvenir à se contenter que de la congrue.

    L’évêque d’Oloron conscient de ces difficultés écrit : « il en est peu où les revenus  des ecclésiastiques soient aussi modiques et les charges aussi fortes et où cette portion du clergé qui porte le poids de la chaleur et du jour se présente sous un aspect plus touchant et plus propre à intéresser. » 19 Mais comme le constate Christian Desplat , l’évêque « déclarait enfin toute restitution impossible , la  plupart des usurpateurs, petits domengers , tirant l’essentiel de leur revenu des abbayes laïques. » , ceci dans le but de ne pas se mettre à dos le Grand Corps.

    La congrue ne dépassait pas les 250 livres, selon le même auteur, sur les 80 vicaires du diocèse. De plus, « sur cent cinquante-six curés, quarante-sept  étaient à simple congrue, quarante et un disposaient de quelques revenus annexes. »

    Il termine par écrire : « c’était à une véritable indigence qu’était réduit le clergé qui ne pouvait compter ni sur les obits ni sur le casuel ».

    Prenons l’exemple du curé d’une ville, Pau, M. de Camplong, prêtre à la paroisse Saint-Martin de 1754 à 1780, qui déclare : Il n’y a qu’un seul curé, dans toute l’étendue de Pau…Le Sr curé a 4 vicaires. La modicité de ses revenus ne lui permet pas d’en avoir davantage ; toute la grosse de sa cure est affermée à 1.200 l., sur quoy il paye 300 l.de décimes  et l’honoraire de 4 vicaires , lequel payé il ne lui reste pour sa portion que 300 l. L’étendue de la paroisse et la modicité des revenus font que le secours des Ordres Religieux est nécessaire au sr curé…La fabrique de la paroisse  n’a pas assez de revenus pour fournir à ses charges ordinaires. On y supplée par des quêtes ; ainsy elle ne sçauroit rien fournir pour payer le prédicateur. » 20

     

       Le cahier des griefs des Etats de Béarn de 1789  nous donne une image donnée de ce que pensent les habitants sur les conditions de vie des curés. Dans la partie concernant « la religion, les mœurs et l’éducation » et plus spécialement l’article 5, on lit : «  Qu’il soit pourvu à l’amélioration du sort des curés , chacun à raison de sa situation locale ; qu’il leur soit accordé un traitement suffisant pour les entretenir avec décence et les mettre à portée de soulager les pauvres de leur paroisse ; que pour leur procurer cette augmentation de revenu , il soit réuni des bénéfices consistoriaux ; et comme il est justement d’assurer une retraite aux prêtres qui ont vieilli dans l’exercice de leur ministère , qu’il plaise à Votre Majesté d’y pourvoir  par les moyens convenables. » 21 

        En ce qui concerne leur recrutement, les ecclésiastiques de la province sont issus davantage du milieu urbain que rural. On constate qu’une infime minorité des prêtres démissionna de leurs cures.

    Leur formation se réalise pour la majorité d’entre eux dans un séminaire. Certains ont au préalable suivi des études au Collège des Jésuites de Pau.

    Mais le séminaire du diocèse de Lescar n’a pas pu remplir complètement ses  fonctions (en effet si l’enseignement théologique est accompli)  l’encadrement et le recrutement ne sont nullement atteints. A la veille de la Révolution plusieurs paroisses ne sont pas pourvues de clercs. On estime globalement qu’un tiers environ des prêtres sont originaires d’autres diocèses. Par contre celui d’Oloron n’a pas autant souffert de ce problème.   

    Le séminaire de Pau est tenu par les Lazaristes - congrégation fondée par Saint-Vincent de Paul-  et s’adresse au début aux futurs prêtres relevant des diocèses de Lescar et d’Oloron puis, par la suite, uniquement au diocèse de Lescar. A Pau, il est implanté à la rue Serviez. 

    Le séminaire, reconstruit en 1731 à la suite d’un incendie qui a détruit complètement le précédent, depuis sa création souffre de problèmes financiers, son budget est peu important vu que les donateurs sont peu nombreux. Il réussit à subsister surtout grâce à l’intervention de l’évêque de Lescar, monseigneur de Noé qui, après avoir supprimé le monastère de Larreule – de l’ordre religieux bénédictin -, lui attribue en 1773 le revenu de la manse. Deux dates démontreront l’augmentation lente des revenus, ceci quasiment en une génération : 1776, les recettes s’élèvent à 2 620 livres et les dépenses à 2 302 livres, en 1790, les recettes sont de 4 444 livres alors que les dépenses sont de 1 875 livres. Pas de dettes à signaler.

     

       A la veille de la Révolution, en 1789, le séminaire se présente comme un bâtiment composé d’un double corps de logis, d’une église. Cette dernière est consacrée le 18 juin 1702, on sait que l’unique nef se terminait par une abside  et mesurait 28 m de long pour une largeur de 12 m. Sa hauteur atteignait les 13 m. Le bâtiment connaît un incendie partiel en 1731. 22

    Actuellement son emplacement se situe place Georges Clémenceau.

    Cécile  Devos, dans son article sur ce séminaire, mentionne que sa donatrice se nomme Françoise-Marguerite de Chivré. Epouse du duc de Gramont et gouverneur de la Basse-Navarre et du Béarn Antoine III, elle concède 44 000 livres « pour la direction du séminaire », le 2 novembre 1683 lors de la signature d’un contrat « devant notaire avec le supérieur général de la mission des Lazaristes, Edme Jolly ».

    L’Intendant Lebret nous apprend en 1701 que le séminaire est tenu par « …4 prêtres, 2 frères et ordinairement 25 ou 30 ecclésiastiques qui s’y forment aux exercices de piété… ». A la veille de la Révolution, exactement en 1786, les maîtres ne sont plus que trois et les élèves séminaristes à six.

    La naissance du séminaire est acceptée à la fois par l’évêque de Lescar Dominique Desclaux de Mesplès et le Parlement de Navarre le 4 mai 1685.  Il est à noter que cette fondation est à relier également  dans la volonté de « faire de la ville une capitale de la Contre-Réforme, juste après la révocation de l’édit de Nantes…Cela se fait au détriment de la ville épiscopale de Lescar. » L’évêché d’Oloron dispose de son propre séminaire en 1712 qui est édifié dans la ville basse sous l’instigation de Mgr Joseph de Révol . Il le dote de 70 000 francs puis soumet en 1716 aux paroissiens l’obligation de donner une aumône pascale de 6 liards pour chacun d’eux, en échange il leur permet de se nourrir d’œufs, de beurre et du fromage lors du Carême. L’achat du terrain se réalise en 1719 auprès d’un négociant, l’édification du  corps central a lieu en 1738. .

     Le bâtiment est enrichi de deux ailes par François de Révol, son petit-neveu, en 1772. Ce dernier ajoute également une chapelle en 1762. Afin de financer le tout il utilise le même procédé que son grand-oncle. L’aile gauche est achevée en 1772 tandis que l’aide droite le sera en 1783.  Le séminaire remplit sa fonction jusqu’en 1791. Actuellement son emplacement correspond au 14 rue Adoué.

    Celui de Pau sera démoli en 1789.

     

         Dans le premier article du dit séminaire, il est spécifié : « Le Séminaire est institué pour honorer le sacerdoce de Notre Seigneur Jésus-Christ et pour former Messieurs les ecclésiastiques à la vertu et à la science que leur Ordre et leur vocation demande d’eux. C’est pour cela que l’on y enseigne la théologie, la manière d’administrer les sacrements, le plainchant, les cérémonies de l’Eglise, la méthode de faire le catéchisme, de prêcher, de confesser et les moyens de le faire apprendre par pratique, la science des saints. C’est-à-dire les vertus chrétiennes et la vraye dévotion et les autres exercices semblables  qui s’y font et le bon exemple qu’on se donne les uns aux autres. » Quant aux « dispositions » requises  pour y entrer, ils sont mentionnés dans l’article 2, seulement « avoir premièrement une bonne volonté et une forte résolution de s’avancer dans la vertu et dans la science et d’y demeurer à cet effet du moins une année. Secondement une grande humilité et soumission à l’égard du supérieur et des autres qui seront destinés à les diriger et enseigner. Troisièmement, un grand courage et une ferme confiance en Dieu pour surmonter les difficultés qu’ils pourront y rencontrer, surtout au commencement. »  Leur vie dans le séminaire s’apparente à celle menée par les moines puisqu’il est spécifié par exemple qu’ils ne doivent pas contester (article 10), être soumis, rappelant le vœu d’obéissance des réguliers. De plus, ils sont tenus de garder le silence « hors le temps de récréation » et si le besoin se fait sentir de converser à un autre il doit le faire « à voix basse, et jamais avant l’oraison, du matin, ni après la prière du soir. » (Article 24). A nouveau, lors de la récréation, ils s’abstiennent de railler, de chanter les chansons légères ou «  peu honnêtes », de parler des « nouvelles du monde », des médisances. (Article 28).

     Il est contraint de se confesser au moins deux fois par semaine (article 8). Leur attitude à l’extérieur et leur tenue ne doivent  pas ressentir « l’esprit du monde particulièrement aux habits, à la barbe et aux cheveux qu’ils porteront dans la modestie et la simplicité ecclésiastique. » (Article 16). Ils éviteront les cabarets, les lieux de plaisir où on joue au billard, aux cartes. S’ils sont contraints de manger ou de coucher au-dehors, ils devront demander la permission (article 31).

     Face à la gent féminine, ils doivent tâcher d’éviter « la conversation des femmes…que dans la nécessité en lieu où ils pourront être vus et le plus courtement qu’il se pourra. » afin de conserver « avec un grand soin la pureté requise aux ecclésiastiques. » (Article 19).Afin de leur apprendre l’humilité et « Dans la vue des humiliations que Notre seigneur a pratiquées » ils sont contraints à « faire les offices les plus bas, jusqu’à balayer la chambre et la maison où il était avec la Ste Vierge et St Joseph, chacun faira son lit tous les jours au matin, balayera sa chambre deux fois la  semaine et aura soin de la tenir bien propre et bien rangée. » (Article 23).

    Même les amitiés « particulières » sont à éviter vu qu’elles sont « préjudiciables à la charité, qui doit être universelle et commune à tous. », de même que les visites et les sorties. Si une affaire requiert sa présence à l’extérieur, l’accord du supérieur est requis, de même que son salut  au très Saint- Sacrement, avant et après. (Article 30).

    Leur journée débute à 5h, puis suivent « la méditation », la messe…, à 9h 30 débute

    la conférence de théologie jusqu’ après 10h suivie d’un examen particulier et le dîner. Viennent ensuite le salut au Très Saint Sacrement de la récréation. A midi trois quarts, direction la salle des exercices pour lire un chapitre du Nouveau Testament. A partir de 13h chant,  lecture spirituelle, étude dans la chambre. A 16h jusqu’à 17h30, de nouveau Conférence de théologie. Par la suite s’enchaîneront, études, examen particulier, souper, récréation, prière du soir, examen général de conférence…Le coucher a lieu à 9h du soir après l’extinction des chandelles. Si l’on comptabilise les heures d’études on en  dénombre deux. 31Christian Desplat  critique l’enseignement donné dans ce lieu  et le trouve « peu susceptible de compenser les carences de l’instruction générale du postulat, s’il en avait. » 23

       Si on se penche sur la bibliothèque des ecclésiastiques béarnais,  le même auteur nous informe que nous possédons seulement  le contenu de cinquante-et-un livres . En pourcentage, la majorité des titres concerne des ouvrages de littérature pour 50,4 %, suivi de la théologie (11%) et d’autres s’y rattachant comme l’Homilétique (se rapporte à la prédication du pasteur aux croyants), la pastorale …, en tous derniers genres  on trouve auprès de ceux consacrés à la controverse (0,4%)  des livres d’histoire (0,9%) et de géographie (1,9%).

    Pour Christian Desplat ce contenu diffère peu de ceux des laïcs c’est-à-dire que « la littérature profane y domine et la part de la culture professionnelle y est limitée… ». 24 Il rajoute que « L’éloignement pour les lectures sacrées ne peut être à mettre au compte de la hiérarchie » peu soucieuse  de « guider les pasteurs dans le choix de leurs lectures… ».24

    Quant à ce siècle dit  des Lumières, le XVIIIe siècle, les bibliothèques de ces prêtres ne contiennent que 2,2 % d’ouvrages de philosophie. Et à propos du droit, seuls les livres portant sur les Fors de Béarn et les « Petits procès ou juridiction particulière, principalement pour les peuples de la campagne » sont présents.

    Le même auteur finit par constater néanmoins que si « la compétence théologique n’était pas toujours grande, le niveau culturel du clergé béarnais paraît avoir été satisfaisant «  l’administration royale le reconnaissait volontiers qui en 1774 préférait s’adresser aux curés qu’aux jurats pour dresser un état des pertes agricoles » lors de l’épizootie. Quant à sa moralité « moins de 3% des prêtres furent accusés de mauvaises mœurs par l’enquête de 1802 ». 25 Si on se réfère aux cahiers de doléances, aucune allusion à leurs mœurs n’est observée.

     

    Ces mêmes cahiers de griefs font état du souhait de voir les conditions de vie des curés s’améliorer.

     

       Mais, à l’opposé, les plaignants revendiquent la gratuité des actes relatifs à la religion. Ainsi comme on peut le lire dans l’article 5 du cahier des Etats de Béarn sous la rubrique « Objets généraux qui regardent la religion, les mœurs l’éducation… » : « Que les dispenses de parenté et de publication de bans soient accordées sans frais ; que les visites des paroisses soient pareillement faites sans frais, et  que les curés des campagnes ne puissent exiger aucune rétribution ni pour les baptêmes, ni pour les mariages, ni pour les sépultures. » De plus, ce qui revient souvent est le rejet de toute appropriation de la dîme. L’article 27 du cahier des Griefs particuliers au Tiers Etat le spécifie bien : « Certains curés et autres décimateurs  ont porté leurs prétentions au point d’exiger la dîme des œufs, des poules, des oies et des cochons, qu’on ne nourrit  qu’avec des fruits qui ont déjà payé la dîme. Cette prétention est des plus abusives, et il plaira à Votre majesté d’ordonner qu’on ne pourra prétendre aucun droit de dîme sur les œufs, les poulets, les oies et les cochons. » 26 Pour parer à cette usurpation, plusieurs cahiers de doléances béarnais, comme par exemple celui d’Angaïs dans l’article 13, sollicitent : « Il sera demandé qu’avant de payer la dixme , il soit permis aux laboureurs d’en prélever la semence. » 27

     Toujours dans les cahiers de doléances, on pointe d’autres abus notamment d’autres droits perçus comme injustes car s’additionnant à la dîme. La communauté d’Aressy note dans l’article 15 : « Plusieurs habitants d’Aressy, payent un droit au curé du lieu appelé paccaire  , en orge et millet , qui s’élève à environ dix-huit quartaux , qui sont retirés par ledit seigneur abbé , qui représente le curé, comme lui payant la congrue, ce qui est un droit exorbitant , en ce que le curé a le quart de la dîme sur tous les fruits  et le casuel, ce qui lui suffirait pour sa subsistance. » 28  

     La dîme est supprimée le 13 août 1789.

          Autre prétention commune aux autres   de la plupart des cahiers du royaume et du Béarn, celle de l’égalité fiscale.  Dans les cahiers des griefs, doléances et réclamations de la ville de Pau, l’article 3 tiré des Doléances et réclamations particulières au Béarn et à la ville de Pau stipule bien  « Déclarer l’impôt réel par sa nature, et établir entre le clergé, la noblesse et le Tiers Etat l’égalité de contribution pour toute sorte d’impôts et charges du pays sans exception … ». 29

         Selon l’usage, les paroissiens devaient assurer le logement du curé au presbytère, avec lequel l’église et le cimetière formaient les bâtiments paroissiaux. »

    Des conflits éclatent entre les paroissiens et leurs curés lorsque ses derniers sont perçus comme des absentéistes. Pierre-Antoine de Laussat, curé de Lagor, est attaqué pour ce motif vu qu’on lui reproche de ne pas célébrer les deux messes dominicales. Un jurat de Lagor, durant une assemblée du Corps municipal du 13 août 1784, fait référence à un acte « …de la part des sieurs de Veguier et de Seignor, dans lequel ils se plaignent que les officiers municipaux n’ont point voulu se donner la peine de représenter au sr de Laussat, curé, que le trois-quart des habitants manquent la messe les jours de dimanche et fêtes faute d’en avoir deux comme il étoit d’usage, quoy  qu’ils ne puissent pas ignorer qu’ils ont eu toute la satisfaction de leur part , même obtenu du sr de Laussat , leur pasteur, une réponse favorable à leurs désirs. Mais, comme les sieurs requérants concluent dans leur acte en sommant lesdits sieurs officiers municipaux d’assembler la Communauté dans trois jours , ils ont délibéré , par unité de suffrages, qu’on suspendroit de faire assembler toute la Communauté attendu le désir ardent que le sr curé leur a témoigné avoir de reprendre ses fonctions précédentes dés que sa santé le permettra , s’en rapportant à sa prudence ». Le Corps de Ville prend une décision qui déplaît aux plaignants qui souhaitent qu’un vicaire soit nommé  traînent l’affaire en justice.  Le tribunal prend un arrêt qui impose aux jurats de se réunir « …dans trois jours pour délibérer sur le party qu’elle doit prendre afin d’avoir un vicaire et procurer à chaque habitant le moyen d’entendre la messe chaque jour de dimanche et de fête. » 30

         Le séminaire n’est pas le seul moyen pour un prêtre d’acquérir des connaissances  dans le but d’agir correctement lors de son activité pastorale. En effet, les ordonnances épiscopales peuvent combler des lacunes. Deux évêques d’Oloron se sont astreints à remplir cette tâche, Joseph (1705-1735)  et François (1742-1783) de Révol. De plus, notamment le premier, l’évêque tente en publiant son Catéchisme à l’usage du diocèse d’Oléron » en 1706 d’aider les prêtres de sa circonscription. Pour y parvenir pleinement il a l’idée de le faire publier en français, en béarnais et en basque. Il sera remanié par la suite par François de Révol en 1743.

        Pour les assister, comme on l’a vu précédemment, des vicaires. Toutes les paroisses n’en sont pas pourvues comme on le voit à Nay en 1758.Ils sont mécontents   d’assister aux messes et aux fêtes religieuses alors que le curé nommé Marsan est absent. Il  n’est pas remplacé par un éventuel vicaire,  une plainte est déposée contre lui.  Celui-ci leur rétorque qu’il n’en  est pas responsable, que les grands vicaires sont uniquement habilités à toute nomination (ces grands-vicaires ou vicaires généraux  ont comme fonction de seconder les évêques dans leur diocèse). Le problème perdure vu que les jurats notent toujours l’absence de vicaire  sur le registre, en 1764. On se plaint que les fidèles ne peuvent plus assister à la messe du matin et surtout  que les enfants ne pouvaient plus bénéficier de l’instruction qui « tombait dans l’oubli ».

     La paroisse peut contenir des établissements congréganistes qui se chargent des écoles et des hôpitaux.

       Nous possédons les mémoires d’un curé, Jean Bonnecaze  né à Pardies et qui sera prêtre à Igos. Il naît en 1726. Son frère aîné meurt à l’âge de dix-huit mois. Lui-même était de condition fragile poussant sa mère à faire « dire des messes et des prières pour ma conservation » Puis, comme tous les enfants de son âge et de son milieu social, il aide ses parents, son père dans « les travaux ordinaires » et sa mère « dans le ménage ». Il apprend à lire auprès d’un régent nommé Augustin de Souberbielle durant deux mois. Il lui transmet  le goût de lire. Puis un autre homme, ancien régent lui aussi, prend le relais. Il se nomme Claverie – « avait étudié le latin et fait sa théologie » -. Au même, le chant devient une passion. Ses goûts s’orientent vers les cantiques, les « guerrières ». C’est sa mère qui le conseille d’opter pour le poste de marguiller à Notre-Dame-de-Piétat. Il y reste « trois ans avec tout le zèle possible ». Le vicaire de Piétat , M. de Castain, reconnaît en lui « la vocation » de devenir prêtre. Ses parents et ses frères comptent sur lui pour les travaux  et à vingt ans il fait part de sa décision à son père et sa mère « qui s’en moquèrent ». Il décide alors d’aller étudier en Espagne et se sert du prétexte du pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle pour convaincre ses parents d’accepter mais il ne recueille que des propos injurieux et méprisants. Il quitte en cachette le foyer familial aidé par des amis avec seulement trois livres d’argent sur lui, direction Saint-Jacques de Compostelle. Nous sommes le 1er mai 1748, à minuit. Lors de son pèlerinage, au retour, il contracte la « fièvre » et une « inflammation », il est à deux doigts de mourir. Pour subsister, il est contraint de vendre ses chemises. Ses parents lui pardonnent, le croyant mort d’après la rumeur. Mais on veut l’obliger à se marier ce qu’il refuse en invoquant son souhait de  « parvenir à  l’état ecclésiastique ». A nouveau, ses parents s’opposent violemment à son choix prétextant qu’il était l’aîné et, par conséquent, qu’il « devait tenir et travailler le bien ».Il doit s’assurer l’aide de l’abbé d’Arette de Lescar et vicaire de Pardies pour qu’il défende sa cause. Lui donner du « secours » durant une année, aller en Espagne, à Huesca, pour étudier afin de leur « épargner la dépense ». Ils acceptent à contrecœur, en échange il doit s’engager à les aider dans les travaux. Mais comme tout ne se passe pas comme voulu, il faut l’appui d’un autre prêtre, M. de Rouset, nouvellement nommé à Pardies, qui l’oriente au collège de Saint-Pé-de-Bigorre où exerce un Père régent bénédictin nommé Mérigon aux exigences très dures (ne pas fréquenter les bourgeois, se confesser quatre fois dans l’année, de jouer…de subir le fouet si elles ne sont respectées). Les leçons sont gratuites toutefois. Notre auteur étudie comme un « forçat ». Son père vient le voir deux fois durant tout son séjour au collège. Par la suite, il entre en philosophie à Pau chez les Jésuites et il est fier de porter la soutane de noir, ceci en 1751 .Il étudie la philosophie  avec le statut d’externe. Il est précepteur en même temps de l’enfant du procureur du sénéchal de Pau. Il y est mal nourri, il y reste dix-huit mois. Il continue le préceptorat et reçoit la tonsure à la cathédrale de Sainte-Marie par l’évêque d’Oloron, Mgr de Révol, le 22 septembre 1753. Il subsiste par le biais du préceptorat et des services donnés à la paroisse de Pau (chants…). Il entre au séminaire en 1758.Le 23 décembre de la même année  il reçoit les quatre petits ordres dits mineurs à Sainte-Marie, puis le 9 juin 159  l’ordre de sous-diacre toujours à Sainte-Marie. Toujours en 1758, le 22 décembre, il reçoit l’ordre de diacre, toujours au même endroit. Le 31 mai 1760, des mains de l’évêque Mgr  de Révol,  il est ordonné prêtre. L’auteur se plaint alors de l’attitude du dit évêque envers lui. N’ayant plus d’argent, il sollicite de sa part de lui faire grâce de 3 livres « des lettres de cet ordre ». Deux autres hommes vont tenter d’infléchir l’évêque (son aumônier l’abbé Casenave et son vicaire-général Laporte), rien n’y fait, l’évêque refuse, « insensible à ma misère » prétextant « que c’était son casuel ; il prenait trois livres, tandis qu’il ne pouvait exiger que 7s.6 deniers, selon le Concile de Trente, et un cierge, que je lui avais porté à l’offrande, pesant demi livre.»

    Il commence son vicariat à Asson le 15 juin 1760 et dans sa biographie il fait les louanges de sa voix lors des chants, il a trente-deux ans. Détenteur de deux cents livres d’économie amassés lors des préceptorats et des assistances aux enterrements, sa mère lui prête sept ou huit serviettes , une couette et coussin qu’il rendra, un pain et un pot de graisse. A partir de là, il sent qu’il doit se débrouiller seul, qu’il « doit acheter tout et de me mêler de tout… ».Il écrit qu’il ne s’est pas enrichi car tel a été son souhait car s’il avait « voulu être charlatan, flatteur, intrigant et demandeur, j’aurais amassé beaucoup de bien… » et  qu’il a suivi l’exemple de Saint Paul. Il continue de prendre des écoliers. Il reste dix ans dans la paroisse. Ses actions ont été de corriger des abus des paroissiens comme celui d’amener douze moutons dans  l’église le jour des noces , gardés alors par un pasteur au fond ou dans une chapelle , en ayant pris soin de mettre des clochettes à cinq ou six d’entre eux(ceci malgré des menaces proférées à son encontre). Il acquiert en 1762 « une pièce de terre touya, appelée Serrepta, de contenance de dix arpents, grosse perche, en vue de faire du bien à ma famille… » mais cet acte se révèle être une erreur vu que cela ne lui donnera que des problèmes.  Cinq ans plus tard, en 1767 il est nommé vicaire en chef à Moncaup mais n’y demeure que deux mois et demi, restant par la suite sans emploi pendant presque un an. En 1768, il continue d’acheter de la terre, appelée « lou Camp de l’homi », d’un prix excessif. En 1770, il se plaint à la fois de la lassitude due à la paroisse et à la correction des écoliers mais aussi du curé qu’il juge ingrat. Il quitte la paroisse pour la chapellenie des forges d’Asson que le marquis de Louvie, M. d’Angosse, lui donne. C’est son « poste » définitif.  Il en retire 500 livres par an. Mais son attitude « larmoyante » persiste puisqu’il s’apitoie sur les « ennemis » qui s’acharnent sur lui durant les années 1770-1771car ils sont « jaloux de ma petite fortune, de mon avancement dans les affaires et de ce que je faisais des acquisitions utiles et avantageuses pour l’augmentation de ma famille… ». Son père, malade, ne pouvant « gérer les affaires domestiques », cette situation force le prêtre à les diriger lui-même. Il est fier de mentionner que sa famille « ne subsistait que par mon secours ».

    Ces dits ennemis utilisent, pour arriver à leurs fins, la calomnie et l’attaque en justice. Il les nomme.

    Son principal adversaire est le dénommé Peborde , seigneur de Pardies et syndic des Etats de Béarn. On peut également citer le seigneur d’Arros « prétendant la propriété en qualité de seigneur ». Son intention étant y « faire des garennes de lapin qui auraient ruiné tous les fruits des habitants ».

    Son affaire prend de grandes proportions puisqu’ un ordre royal lui interdit de venir à Pardies et de « s’immiscer …dans les affaires qui intéressent cette communauté… », le 9 avril 1771.Il innocente le roi Louis XV,  ce serait les ministres qui profiteraient de sa faiblesse.

    Par exemple, des communautés comme celle de Narcastet - qui  prétend à la « jouissance du pacage » - se dressent contre lui et le traînent en justice.

    Le curé est accusé de fournir des « conseils de révolte et de sédition ». La jalousie n’est pas absente puisque les notables craignent que sa « famille pourrait être la plus riche de la paroisse ».

    Ce dernier sollicite le recours, entre autres,  à deux nobles, le comte de Baillenx et le chevalier de Béla.

    Le 25 novembre 1772 le roi lui adresse une lettre lui signifiant son autorisation de revenir à Pardies en tant qu’habitant.

     Autre source de déception, il regrette que son père et son frère l’aient « abandonné » à son « triste sort » en refusant « de signer un placet que je voulais présenter en leur nom pour obtenir plus tôt ma liberté sous la réclamation de mon père. » Son discours victimaire se traduit jusqu’à écrire que son père avait oublié « qu’il était mon père et que j’étais son fils ». Il rajoute même que son frère –« premier cadet » - avait eu quelque secrète satisfaction de ma disgrâce…cela pourrait venir de l’intérêt de jouir de mes biens…néanmoins j’ai excusé son ignorance …il y avait en cela plus de bêtise que de malice… ».De plus, il reproche à sa famille ne pas s’être déplacé pour venir le voir à Asson lors de sa « disgrâce ». Par contre, il reconnaît que Pierre, son dernier cadet, l’a défendu auprès du reste de la famille. Devenu paranoïaque, il se méfie de tous – voyant des espions de ses ennemis tout autour de lui-, prenant même ses parents pour des suspects. Il se décidera à rejoindre Pardies seulement  deux mois plus tard.

    Magnanime  avec  un  de ses ennemis, le sieur Péborde, une correspondance s’établit ceci « quoiqu’il eût voulu me perdre, je ne le haïssais pas, je voyais que Dieu se servait de lui pour m’éprouver, mais je ne succombai pas à la tentation…et je priai pour Dieu tous les jours pour mes ennemis… ».   Néanmoins, il ne peut s’empêcher de rajouter que « Dieu a permis » à  ses dits ennemis de subir à leur tour des déboires par la suite – « des croix aussi pesantes » et de les détailler  avec force détails…

    Obtenant la cure à Angos et Argelos avec l’appui de Jean-Paul d’Angosse dont il a été le précepteur de ses enfants .Acceptant la constitution civile du clergé, il est prêtre assermenté ou jureur. En 1795, il s’implante à Pardies où il se fait bâtir une chapelle privée qui nous allons voir lui apportera également des problèmes.

    L’abbé Salles, curé de Pardies, rapporte dans son historique de la fondation de la chapelle de Notre-Dame de la Purification  que le fondateur de la nouvelle chapelle (bénie le 7 mars 1795)  , Jean Bonnecaze ,  est aussi accusé d’avoir été « agent de la commune pendant la Révolution . Son agence donna lieu à de nombreuses plaintes de malversations des deniers publics. » Il s’agit de l’administration de la chapelle de Notre-Dame de Piétat . Un commissaire est  diligenté par le préfet  afin d’enquêter et, à cette fin, on rassemble les habitants et Jean Bonnecaze est obligé de « représenter devant le commissaire la somme de 750 l. 2s.6d., produits de ventes du bois communal faites pendant son administration. » Nous sommes le 9 prairial an X (29 mai 1802).Il a des prétentions sur les offrandes pratiquées à la chapelle, sur les revenus des terres mais aussi sur «  propriété toute entière. Il soutenait que tout lui appartenait, parce qu’il avait tout payé de ses deniers. » Les marguillers de la chapelle portent plainte contre Jean Bonnecaze , les frais de justice sont supportés par ladite chapelle.   Le préfet en décida autrement et décréta que la chapelle appartenait à « tous les habitants », mais aucun document auprès des Archives de la commune et des registres  n’a été retrouvé depuis l’attestant. Serait-ce une preuve de la mauvaise gestion de la chapelle par le conseil municipal ? 31

    Autre griefs qui lui sont échus, d’abord celui d’avoir   élaboré un « catéchisme évangélique  de la doctrine chrétienne puisé dans l’Ecriture Sainte »  républicain puisqu’il  a pris fait et cause pour la Révolution. Dans cet ouvrage, il fait l’apologie de la liberté – « après douze siècles de servitudes » -  et attaque ceux que l’on distinguait par des titres comme ceux Sa Grandeur, Sa Majesté, Son Excellence et les surnomme  les « demi-dieux ».

     

    Ensuite, autre faute, celui d’avoir épousé Jeanne Malet. Il a 67 ans, nous sommes le 3 brumaire an VII (24 octobre 1793). Son geste plaît aux Révolutionnaires car il est remarqué et publié par la « Société des Amis de la Liberté et de l’Egalité » de Pau qui voit en son mariage un « acte de civisme de ce citoyen qui ne reconnoit pour son culte que la Raison et pour morale, la Liberté et l’Égalité ». 32

    Lors du Consulat, il n’apparaît pas dans la liste du personnel ecclésiastique.

    L’abbé M.V. Dubarat  pense que ce faux mariage a été une stratégie pour éviter des problèmes vu que la Convention décrète le 13 novembre 1793 que tous les prêtres mariés ou en instance d’une déposition des bans « échapperaient à la déportation et à la réclusion ». Ceci d’autant plus que  tous les actes signés par Jean Bonnecaze depuis 1795 sont réalisés en tant que prêtre, notamment le procès-verbal de la bénédiction de la chapelle qu’il s’est faite construite à Pardies.

    Il meurt le 16 brumaire an VIII (7 novembre 1804), sur son acte de décès  on lit : «  prêtre domicilié à Pardies ». 33

    A travers cette biographie  Jean Bonnecaze  démontre que la prêtrise bien qu’elle soit ressentie  provenant de la volonté divine soit un moyen de gravir les échelles de la promotion sociale. Il s’est enrichi, les terres acquises le prouve bien, la terre constituant à l’époque un enjeu social et une source de richesse quoique ces achats lui aient apporté beaucoup de déboires. En 1789, veille de la Révolution, il peut s’enorgueillir de disposer approximativement  d’un millier de livres de revenu annuel, somme importante pour l’époque. Autre action qui révèle son ambition sociale est sa candidature comme juge lorsque le Parlement de Navarre fut abrogé en 1771(comme tous les Parlements en France du fait de leur résistance face au roi). Il écrit alors le 9 juin de la même année au chancelier Maupéou mû par « l’ambition et la folie » : « …obéissant et soumis à mon roi, prêt à verser tout mon sang pour le service de Louis le Bien-Aimé, le meilleur des rois , grand monarque, grand conquérant, faisant le bonheur des peuples  en leur donnant une justice gracieuse, en les délivrant du labyrinthe de la chicane et des sangsues qui la dévoraient  par des longueurs énormes. Je ne suis ni juge, ni soldat,  mais j’en ai les sentiments et le courage…Je tâcherai de me rendre digne de l’état de juge par l’étude des lois, guides assurés de l’équité des jugements… ».

    Malheureusement pour lui, sa candidature ne fut pas retenue.31

     

         D’autres sources montrent que plusieurs  curés laissent à leur mort des biens relativement importants comme celui de Lasseube, Jean Lacassaigne décédé en 1769. Ils s’élèvent à 2 660 livres, les biens meubles sont vendus et l’argent (2 507 livres) est donné  aux pauvres. 34

     

         Nous possédons également la biographie d’un autre curé nommé Pierre-Antoine de Laussat né en 1724 et mort à une date inconnue.

    Il naît à Oloron exactement le 1er juillet 1724 dans une famille bourgeoise, son père est négociant. Il quitte le Béarn pour aller entreprendre des études  à Toulouse à la Faculté des Arts. Durant deux ans, de 1740 à 1742, il suit des cours de philosophie. Ensuite, il part pour Paris où il reçoit la tonsure le 9 juin 1743, il continue ses études à la Sorbonne de 1743 à 1746. De nouveau, à Toulouse il obtient le titre de maître-ès-arts, le 21 mars 1748. Plus tard, le 4 avril 1752, l’évêque de Lescar, Hardouin de Chalon de Maisonnoble, lui attribue la cure de Lagor vu que le curé Laborde, le titulaire, vient de décéder. A cet effet, il a été appuyé par les Révérends Pères Barnabites de Lescar. Il commence à remplir sa charge le 6 avril. Il sera un prêtre exemplaire, présent, ne bénéficiant de l’assistance d’un vicaire seulement  lors de  quelques périodes.

    Dans les registres de  délibérations de Lagor, il est mentionné sur plusieurs passages  démontrant l’attachement de la localité pour le prêtre. Par exemple, le 30 novembre 1758 : « L’an 1758 et le 30 mois de novembre, la Communauté de Lagor a été convoquée sous la halle aux formes ordinaires, de l’ordre du sieur de Larrère, jurat, qui a dit à l’assemblée que le sieur Laussat, curé…a représenté au Corps de ville que la porte de l’église scituée directement au Nord est très incommode pour la célébration des divins offices par raport au vend et au froit qui entre par ladite porte ; il n’est d’ailleurs guière possible de monter en chaire que le prédicateur ne ressente les effets de l’air, que luy procurent très souvent des rumes considérables, que pour rermédier à ces inconvénients, il serait convenable de faire un petit tambour à l’entrée de ladite église avec une pettite porte à cotté opposée aux mauvais temps, qui ne sera pas d’une grande dépence…il est donc de l’intérêt d’un chacun de contribuer, autant que faire ce pourra n à la concervation d’un pasteur qui remplit sy dignement les devoirs de son état et qui épargne à la Communauté les frais d’un prédicateur qu’elle étoit obligée de payer avant il n’a été nommé en bénéffice… ».

         A une autre date, le 9 janvier 1787, les jurats font part de leur accablement à l’annonce du départ du curé. « L’an 1787 et le 9 janvier, le 9 janvier, le Corps de ville assemblé aux formes  ordinaires ainsi que Messieurs les notables de l’ordre  du sr de Chesnelong, maire, qui a dit que la Communauté a été mise dans la plus grande consternation par un bruit qui s’est répandu que Mr de Laussat, curé, étoit dans l’intention de quitter la cure et d’exercer son ministère ailleurs. La manière édifiante dont le sr de Laussat a travaillé pendant 36 ans ou davantage à la santification de son troupeau , toutes les peines et les solicitudes qu’il s’est donné pour le conduire dans la voye du salut, la charité qu’il a exercée envers les pauvres , enfin son amour pour tous ses parroissiens en général sont des monuments qui doivent emporter avec lui nos regrets et nos larmes…Les larmes de tous les parroissiens , particulièrement des pauvres , qui pleurent à juste titre un père tendre et généreux , a engagé le sr maire à assembler le Corps et M.M. les notables pour tâcher de prendre des moyens afin d’engager le sr de Laussat de retarder encore de quelques années l’exécution de son projet et de se rendre aux désirs les plus sincères de toute la Communauté… » . On délègue alors quatre commissaires afin de le faire changer d’avis.35

    Quand la Révolution éclate, à l’opposé de Jean Bonnecaze, il refuse de prêter serment à la Constitution civile du Clergé et s’exile en Espagne où il meurt. Il a écrit les «  Mémoires sur les protestants, la danse et les cabarets ».

      Ces prêtres avaient-ils de bonnes relations avec leurs fidèles ? La plupart d’entre eux sont appréciés surtout s’ils prennent parti pour eux lorsqu’ils sont confrontés à leurs seigneurs. Tel le curé  nommé Jean Meslier, « rigide partisan de la justice », qui se heurte au « Seigneur de son village nommé le Sr de Touilly, ayant maltraité quelques Paysans, il ne voulut pas le recommander nommément au Prône : Mr. De Mailly Archevêque de Reims, devant qui la contestation fut portée, l’y condamna. Mais le Dimanche qui suivit cette décision, ce Curé monta en Chaire & se plaignit de la sentence du Cardinal. »  Le dit curé se plaint du « sort ordinaire des pauvres Curés de Campagne ; les Archevêques, qui sont de grands Seigneurs, les méprisent & ne les écoutent pas. Recommandons donc le Seigneur de ce lieu. Nous prierons Dieu pour Antoine De Touilly ; qu’il le convertisse, &  lui fasse la grace de ne point maltraiter le pauvre, & dépouiller l’orphelin. » Jean Meslier, meurt en 1733 à l’âge de 55 ans. « Par son testament, il a donné tout ce qu’il possédoit, qui n’étoit pas considérable, à ses Paroissiens, & il a prié qu’on l’enterrât dans son Jardin. »36

    D’autres, de par leurs modes de vie, sont très liés aux paroissiens. Un prêtre nommé Mazet se fait remarquer pour son goût pour le jeu de boules et de la bouteille. Sa présence dans les cabarets du village de Barnave, dans la Drôme,  était quasiment constante. Un jour, un homme, nouvellement converti, se présente à lui et lui quémande une messe moyennant une certaine somme d’argent. Il rejette, préférant vider une bouteille avec ses compères du cabaret, où on dénombrait des journaliers, des domestiques…37

        Le curé avait-il une bonne opinion de ses ouailles ? Un prêtre du diocèse d’Oloron, le 15 juillet 1755,  se plaint du déroulement des fêtes dans lesquelles il ne voit que des occasions de se vautrer dans le pêché. « La dissolution des mœurs des gens de la campagne, pendant les dimanches et les fêtes, est portée à un tel point que, dans aucun temps, l’exécution des édits et ordonnances royaux ce concernant n’a été aussi nécessaire. On ne voit, en ces saints jours entièrement consacrés au culte qu’on doit à Dieu, que danses publiques, jeux scandaleux, attroupements dans les cabarets, d’où s’ensuivent mille désordres et excès. Il y a plus de quarante ans que je travaille dans le ministère en qualité de curé, mais je n’avais vu l’irréligion et les débauches des gens de campagne portées  à un pareil excès. Les cabarets défendus aux domiciliés, les fêtes et dimanches, sont remplis jusqu’aux basses-cours, tandis que les églises sont désertes, et les fêtes les plus solennelles sont les plus profanées. On voit aux cabarets d’un côté une bande de danseurs, une autre de joueurs et une autre d’ivrognes et de scandaleux, qui ensuite courent toute la nuit, commettent des vols et portent l’alarme dans les paroisses. » 38

    Le curé de Lay, en 1759, se dresse contre les agissements de seize individus qui ne respectent point les rites religieux. On trouve parmi eux  des gens issus de différentes catégories socio-professionnelles comme des laboureurs, des artisans (tisserands), des charpentiers, des musiciens originaires de villages différents  tels Dognen, Jasses, Lamidou, Lay.39  Nous sommes en présence d’une zone à forte présence protestante, ceci malgré que cette religion soit interdite depuis l’Edit de Fontainebleau de 1685. Les fêtes sont également  le moment propice pour se moquer des rites et des offices religieux  catholiques. A Salies-de-Béarn, un texte signale que « les désordres du Carnaval sont portés à un excès sur lequel il n’est pas possible de fermer les yeux ; qu’une multitude considérables de gens masqués courent les rües pendant la nuit avec des tambours, enfoncent les portes des maisons et y pillent ver qu’ils jugent à propos ; que les jours de fettes et de dimanche les offices divins sont abandonnés et que pendant leur durée les cabarets, les rues et les places de la ville  sont remplis de gens masqués, qu’ils entourent même souvent les églises et empêchent par leur tumulte la célébration de l’office… ».40

    A l’inverse, il arrive que certains paroissiens se plaignent de leurs curés et les assignent en justice. En Champagne, le desservant du village de Fagnières, le 10 septembre 1769,  ayant été déplaisant vis-à-vis de deux paroissiens est contraint par le baillage  de verser 10 livres d’aumônes, 400 livres de dommages et intérêts. Outre ces sanctions pécuniaires, il est doit abandonner sa charge durant un mois.41

         Autre personnage perçu comme un individu important dans les paroisses ayant un lien avec la religion, l’abbé laïc. Lors de la naissance des paroisses au Moyen Age, des autorités locales apparaissent parallèlement comme par exemple les seigneurs. Au même moment, l’intérêt de nommer les prêtres desservants et d’accaparer la dîme se manifeste.

    L’abbé laïque est l’héritier d’un propriétaire ayant construit une chapelle, une oratoire sur ses terres au Moyen Age lors de la christianisation. Usant de son droit de propriété , il s’arroge le droit de nommer le prêtre local, de recouvrir une part du budget destiné à l’entretien de l’église – la dîme. Les abbayes laïques ne sont donc point des bâtiments religieux, ce sont des édifices où vivent l’abbé laïque et sa famille. Souvent elles prennent un caractère militaire même si le propriétaire n’a aucune ascendance noble, elles sont bâties généralement proche de l’église.

     

     Références :

     1- Cahiers des doléances d’Angaïs, BULL.SSLA, 1886-87, 2e série, tome 16, p. 291.

    2- Jousse Daniel, Traité du gouvernement spirituel et temporel des paroisses, chez Debure père, 1774, p. 17.

    3- A.D.P.A., Nay BB 10, f° 255 v°.

    4- Lettre d’un curé du diocèse d’Oloron, 15 juillet 1755, Archives nationales, G643.

    5- A.D.P.A., III E 5395.

    6- Péronnet Michel, article « curés », Dictionnaire de l’Ancien Régime (dir. Par Lucien Bély), Editions Puf ,1996.

    7- Intendant Lebret, Mémoires sur le Béarn, BULL.SSLA, 1905, tome 33, 2e série, p.80-84.

    8- A.D.P.A.,  B 899, 900, 901.

    9- Tucat Jean, Histoire de la région de Pontacq (Béarn et Bigorre) de 1701 à 1789, Editions

          Lacrampe, Lourdes, 1951, p.19.

    10- Idem., p. 25.

    11-  Desplat Christian, Les cahiers des doléances des communautés de Béarn, Revue de

           Pau et du Béarn, n°25, 1998, p.217.

    12- Cahiers de doléances d’Aubertin, BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.322

    13- A.D.P.A., III E 5386.

    14- Œuvres de Mirabeau : discours et opinions, Honoré-Gabriel de Riqueti comte de

          Mirabeau,  Brissot-Thivars, 1825, p.204.

    15- Cahiers de doléances d’Arros, BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.307-308.

    16- Cahiers de doléances d’Argagnon, BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.306.

    17- Cahiers de doléances de Limendous, BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.405.

    18- Desplat Christian, Pau et le Béarn au XVIIIe siècle, tome 1, J & D Editions,  p. 614.

    19- A.D.P.A., G 350.

    20- Déclaration  de M de Camplong , curé de S Martin de Pau (1754-1780), sur sa

         paroisse, BULL.SSLA, 1927, 2e série,  tome 50, p. 159.

    21- Cahier des griefs, plaintes et doléances des Etats de Béarn [cahier de doléances]

           Archives Parlementaires de la Révolution Française, Année 1879 /6/p.499.

    22- A.D.P.A., Q 120, Q 353.

          Devos Cécile, Atlas historique des villes de France, Pau, volume 51, Ausonius, 2017,

           p. 190.

          Intendant Lebret, Mémoire de l’état présent des royaumes de Basse Navarre et pais

          souverain de Béarn, 31 décembre 1700.

    23- Règlements du Séminaire de Pau, BULL.SSLA ,2e série, 1906,  tome 34,    p.60 à 78.

    24- Desplat Christian, Pau et le Béarn au XVIIIe siècle, tome 1, J & D Editions,  p. 623.

    25-Idem., p. 625.

    26-A.D.P.A., C 1374.

    27- Cahiers de doléances d’Angaïs ,  BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.294.

    28- Cahiers de doléances d’Aressy,BULL.SSLA, 1886-1887, 2e série, tome 16, p.303.

    29- A.D.P.A., E 2355.

    30- A.D.P.A., Registres paroissiaux de Lagor, E dépôt GG 4 à GG et registres de délibérations

          de Lagor, E dépôt BB6 à BB 10.

    31- https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k34697d/f294.item, site BNF, Etudes historiques et

         religieuses du Diocèse de Bayonne, autobiographie de Jean Bonnecaze, 5e année, 1892.

    32- Arch.com. de Pau, f°160.

    33- Les Variétés béarnaises de l’abbé Bonnecaze publiés par le curé MV Dubarat, curé de

          Saint-Martin de Pau, BULL.SSLA, 1906.

    34- A.D.P.A., 1.J.24/7.

    35- A.D.P.A., E  dépôt Lagor BB6 à BB 10.

    36- Testament de Jean Meslier (avec un Abrégé de la vie de l’auteur et un Avant-propos)

          édition 1762.     http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k71566z  

    37- Officialité 6 G 14 aff. Mazet. Add. d'Inf. quatrième témoin.2

    38- Arch. Nat. G. 8 643.

    39- A.D.P.A.,  B 5436.

    40- A.D.P.A.,  B 5436 f° 124.

    41- Arch. Nat.  G631.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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  • 2) PRATIQUE DE LA RELIGION DANS LA PAROISSE

     

    LA RELIGION

     

     

     

    On a vu que la religion donne le ton pour tous les moments de la vie d’un paroissien, prenons l’exemple du mois de février, il correspond à la fête des chandelles, exactement le 2 février, soit 40 jours après Noël. Elle a comme origine la purification de Marie, la présentation de Jésus au temple dans la ville de Jérusalem mais elle symbolise également une ode à la lumière et à la nature vu que la durée de la journée s’allonge; les gens allumaient pour l’occasion toutes les bougies chez eux préalablement bénites par le prêtre. Bénédiction opérée dans d’autres circonstances comme lors des semences, les départs aux estives…On pourrait citer la semaine sainte…Les hommes sont tenus de suivre tous les préceptes religieux et les sacrements de la naissance à leur mort. Durant la journée, on se signe de la croix plusieurs fois, on procède de la même façon sur le pain que l’on va consommer, on formule les prières comme celle d’avant de manger, le bénédicité. N’importe quel acte entrepris peut devenir un événement sollicitant une bénédiction comme par exemple la femme qui vient d’accoucher se doit alors de se faire bénir par le curé afin d’être purifiée du péché de chair. L’image de Dieu et de tous les saints est omniprésente à la fois dans le paysage à travers bien sûr l’église, le cimetière, les croix dans les carrefours, des oratoires mais aussi chez soi avec les crucifix, les illustrations et les livres pieux.

     

    Surtout dans le monde des campagnes, la vie des individus est rythmée par le calendrier religieux. Les travaux agricoles sont très liés, par exemple, aux fêtes des saints et des fêtes liturgiques. La morte-saison correspond à Noël et à Pâques. A la Pentecôte, on bénit les semences. Au mois de mai, les agriculteurs invoquent des protecteurs, les « saints de glace », pour écarter tous les aléas climatiques liés comme le gel. Ces saints sont Mamert (évêque de Vienne sur le Rhône du Vème siècle qui a écarté la ville de nombreuses calamités) , Pancrace de Rome (protecteur de la fin IIIème siècle et du début IVème siècle des animaux domestiques dans plusieurs régions françaises) et Servais (évêque de Tongres du IVème siècle dont son tombeau connut un prodige, celui de ne pas être couvert de neige alors que la région en reçut toute la nuit) que l’on célèbre les 11, 12 et 13 mai.

     

     

     

    Si la religion est omniprésente dans l’univers mental de tous les paroissiens comme on vient de le voir, des curés se plaignent avant 1789 que les fidèles montrent des sites d’incroyance. En même temps, ils constatent que les superstitions et les récits « merveilleux » restent encore bien présents. Par exemple, à Paris, des comètes et des météores (17 juillet, un météore appelé le bolide de Melun est observé dans le sud de l’Angleterre et une large partie de la France) effraient tant les Parisiens que les prêtres voient affluer nombre d’entre eux dans leurs confessionnaux.

     

     

     

    Si avant la fin de l’Ancien Régime, le territoire d’une paroisse correspond plutôt à un village ou un quartier dans une ville, après la Révolution, nombre de paroisses deviendront des communes.

     

     

     

    Les confréries jouent également un rôle important dans les manifestations populaires de la croyance. En effet, il ne faut guère omettre ces associations de dévotion et de bienfaisance dont sont affiliés de nombreux paroissiens. Elles sont facultatives.

     

    Quel est le but d’une confrérie ? C’est une association de laïcs qui s’engagent à remplir des rites religieux sous l’invocation de saints patrons qui serviront d’intercesseurs à leur mort. Par conséquent, ils cherchent à garantir leur salut éternel. Installée dans une chapelle à l’intérieur d’une église, on la dote de statuts qui ont été approuvés par l’évêque. Parmi elles, certaines outre leurs rôles religieux et funéraires servent de cadre à des institutions charitables ou professionnelles. 

     

     

     

    François Bluche cite une localité dont on dénombre 112 feux en 1789 et qui détient trois confréries actives, la confrérie du Saint-Sacrement, celle de la Vierge et celle des trépassés.1 Dans les provinces du Midi, les confréries de Pénitents se répandent des villes vers les campagnes.2

     

    Les confréries les plus communes sont celles du Saint-Sacrement et du Rosaire. Le même auteur écrit qu’elles augmentent en nombre dans tous les diocèses durant le XVIIème et le début du XVIIIème siècle. Leur objectif consiste à « favoriser parmi leurs membres la dévotion à l’eucharistie, notamment par la pratique de l’exposition et du salut du saint sacrement. Et de rajouter que les points communs de toutes les confréries résident dans le fait d’être des « sociétés de secours mutuel » » (spirituel et matériel) et d’assurer aux membres une « bonne mort » c’est-à-dire s’assurer que les confrères veillent à ce que le défunt ait des services funèbres, qu’ils prient pour le repos de son âme. En ce qui concerne le Béarn, la quasi-totalité des confréries nait à la suite du concile de Trente puisque celles qui existaient au Moyen Age à caractère corporatif étaient inexistantes au XVIIIème si on exclut celle des tisserands palois, ceci à la suite de la réforme protestante implantée par Jeanne d’Albret. Lors de sa venue en Béarn, Louis XIII ne fut pas étranger non plus à un renouveau du catholicisme. Christian Desplat 3 cite le nombre de quarante-quatre, la plus importante dédiée au Saint-Sacrement pour 43,1% d’entre elles.

     

    Le même auteur précise qu’il y aurait entre les XVIIème et XVIIIème siècles environ une cinquantaine de confréries véhiculant le message de la Contre-Réforme. « Plus de la moitié étaient sous l’invocation du Saint-Sacrement, ensuite venait la dévotion mariale, Saint-Jacques-de-Compostelle, les Ames du Purgatoire, les Compagnies de Pénitents, les Congrégations de bourgeois et artisans, les Saints intercesseurs et enfin les Charités. » 4 La venue de Louis XIII en 1620 en Béarn contribue aussi à leur diffusion. La durée de vie de ces confréries n’est pas élevée pour celles qui sont nées dans la première moitié du XVIIème siècle du fait de la désaffection des notables et de leur refus de participer à « des manifestations publiques ».

     

    Le XVIIIème siècle est une période florissante, on peut citer par exemple la naissance de confréries à Labastide Céseracq en 1703 ou celle de Nay en 1779.Celles qui perdurèrent sont celles qui revêtaient un caractère populaire dans les campagnes.

     

     

     

    En comparaison du milieu rural, la distinction sociale est plus nette en milieu urbain. La ségrégation sociale était de mise, Christian Desplat mentionne qu’à Nay, la confrérie Saint-Jacques était composée d’officiers issus des notables « les plus imposés des artisans de la laine » et rejetait les domestiques. Si on prend un autre exemple, celui de la confrérie des Pénitents Bleus, au moment de sa fondation et l’autorisation accordée par l’évêque Sr de Vigneau par l’ordonnance de février 1635 et par le Parlement de  Navarre, on y trouve « huit dévots…recommandables par leur piété » (sous l’invocation de Saint Hiérôme ou Jérôme) c’est-à-dire des jurats, des bourgeois, des avocats au Parlement, tous habitant Pau. Ils acquièrent un terrain pour une valeur de douze cents livres tournois en 1639 dans le faubourg de Pau et édifient une chapelle dont les travaux dureront de 1639 à 1642. Ils sollicitent une participation du Corps de Ville de Pau soit dix ou douze pieds d’arbres en argumentant sur le bien-fondé de leur action puisque le lieu de culte servirait à la fois aux croyants du quartier et offrirait un ornement pour la vue. On ne leur octroya que 6. Pour donner une idée de l’importance de cette chapelle, il faut s’imaginer un bâtiment de 26,30 m de long sur 15,60 m de large, l’ensemble couvrant environ 500 m2. L’intérieur est divisé en une nef centrale et de deux bas-côtés sur lesquels se dressent deux tribunes, à l’extrémité de l’un des collatéraux une cheminée trône sur un mur d’une petite chambre alors que sur l’autre une petite chambre n’en détient pas. Une chambre sert d’accueil aux prédicateurs qui sont sollicités par les pénitents. Un clocher et une sacristie réunis en un corps campent derrière le chœur qui peut être visible aussi par une tribune élevée au-dessus de la sacristie. Les murs sont faits de pierres de taille et de cailloux, les ardoises couvrent le toit. Dans la chapelle, la présence de sépultures nécessite le nivellement régulier du sol. La rue dans laquelle est édifiée ladite chapelle porta plusieurs noms d’abord rue Saint-Jérôme pour finir avant la Révolution par la rue des Pénitents. Pour la tenue l’article 2 des statuts de 1603 nous en donne une description détaillée. « L’habit ou sac sera de couleur bleuë approchant du violet, pour mieux représenter le deuïl de la pénitence, ainsi que les Prélats et Princes sont ordinairement les jours des Advents et Carême. L’étoffe sera de treillis, la ceinture de la même couleur avec un dizain blanc qu’ils porteront sans aucun excez , ni superfluité , et les habits seront faits par un coûturier exprez sans aucun ply, tous d’une façon et sur l’épaule gauche chacun portera une petite image de S. Jerôme ». Le droit d’entrée, énoncé dans l’article 14, s’élève à deux écus que l’on verse au Trésorier plus un écu le Jeudi Saint de chaque année. Cette contribution sert à la fois à gérer les frais de la Compagnie, à célébrer le « service ordinaire » de l’autel et les messes pour les membres défunts. L’article 17 prescrit la présence des membres de la Confrérie à trois heures du matin des trois premiers Vendredi du mois afin d’effectuer les dévotions (comme les Matines) avec un cierge à la main. Puis ils se rassembleront à nouveau l’après-midi « pour dire leurs Vêpres de la Croix, à voix pleine…». Ce rituel se pratique à huis clos excepté les Vendredi de Carême « qui est le temps destiné à la Pénitence ». L’article 18 fait référence au jeudi saint, les confrères sont tenus, pieds nus, munis de torches, de parcourir, vers six heures du soir, les différents «  saints monuments de la ville par les quatre paroisses et Couvents de la Ville…en chantant choses de la Passion». Autre procession réglementée le « Dimanche à la Procession dans l’octave de la Fête-Dieu à sept heures du matin portant le S. Sacrement » toujours pieds nus et chantant des psaumes. Le règlement stipule dans l’article 16 que si un membre se comporte mal il sera admonesté une fois – le menacer d’une amende -, s’il récidive encore il devra s’en amender selon « la discrétion des Supérieurs », par contre à la troisième fois il sera exclu de la Confrérie.5   

     

     

     

    Les membres, globalement,  sont peu nombreux. Christian Desplat écrit qu’à Pau « au milieu du XVIIIe siècle le nombre des confrères représentait à peine 10 % des Palois inscrits sur les rôles de la capitation. » De plus, il précise que les confréries se sont féminisées « largement jusqu’à la Révolution française et cela en dépit de leurs statuts, généralement hostiles à la présence de « confréresses ».

     

     

     

     

     

    Géographiquement, l’auteur les situe majoritairement aux environs de Pau, dans la vallée inférieure du gave de Pau, par contre il constate qu’elles sont moins nombreuses dans le Piémont des Pyrénées, en Vic-Bilh et à l’Ouest de par la « survivance » du protestantisme. Ces confréries, datant pour la plupart d’entre de la fin du XVIIe jusqu’à la fin du XVIIIe, sont le résultat le plus souvent de la volonté du clergé. Elles incarnaient à ses yeux une affirmation envers les doctrines protestantes et leur interdiction de toutes processions (interdiction d’images pieuses, de reliques…).

     

    Autre constat, la féminisation des membres, par exemple en prenant le cas de la confrérie des Pénitents bleus de Pau, Christian Desplat dénombre un pourcentage de 8 % en 1754 tandis qu’entre 1779 et 1789 elles représentent 63,6 %. Il faut rajouter que si l’idée d’accepter des femmes dans la Confrérie est approuvée par l’ordonnance du pape Urbain VIII le 5 septembre 1641, il faut attendre le 14 mai 1733 pour que le Corps de ladite Confrérie dresse les règlements à cet effet. Il est alors prévu une tenue adéquate c’est-à-dire de « deux aulnes de taffetas bleu, elles le porteront sur la tête en forme d’écharpe avec une petite plissure sur le derrière et les bouts pendants des deux côtés », on remarque que leur tenue est incomplète puisque, par exemple, elles ne portent point de cagoule. Il leur est assigné, dans la chapelle, une « tribune particulière où elles se tiendront avec la modestie convenable », elles sont dirigées par des hommes – exclusion d’autonomie propre-, elles sont exemptées de marcher pieds nus lors des processions et sont tenues de ne guère chanter avec les membres masculins. Pour finir, il faut attendre 1746 pour que l’acte officiel soit appliqué et , autre point, et pas des moindres, le droit de réception s’élève à trente livres plus deux cierges d’un poids d’une demie livre à quoi il faut ajouter une cotisation annuelle de quatre livres  ce qui montre bien le caractère quelque peu élitiste de l’admission.6

     

    Christian Desplat explique cette évolution par un « reflux de la piété des élites sociales ».Il note toutefois que le pouvoir décisionnel reste entre les mains des hommes. Il continue de préciser que les femmes sont plus nombreuses dans les confréries de type marial dans lesquelles le caractère social est important.

     

    Pour assurer leur mission, les confréries possédaient une chapelle dans les églises, par contre ne détenaient guère de propriétés foncières vivant des contributions des adhérents, des dons.7

     

    Sous la Révolution, les confréries sont supprimées, leurs biens confisqués et vendus.

     

     

     

    Afin d’illustrer cette analyse citons en exemple celle de Mirepeix nommée « Notre-Dame des Agonisants et du très Saint Sacrement » dans le but de préparer les malades à entrer au Paradis. A la fin de l’Ancien Régime, les adhésions augmentent. Périodiquement, on procède à des processions et à des pèlerinages notamment le 1er mars, le jour de la Saint-Aubin, ancien évêque d’Angers que l’on invoque pour guérir les enfants. Autre période de ferveur collective, l’été, exactement au mois de juillet, les Mirepeixois  vont se recueillir au sanctuaire de Notre-Dame de Pietat, faire des dons. Les mêmes convient les marguilliers à préparer plusieurs événements festifs comme les feux de la Saint-Jean.

     

    Pour que ces processions puissent avoir lieu, les communautés se doivent de payer les déplacements des magistrats pour affaires communales. Par exemple, le garde de Gélos, le 20 mai 1694, mentionne  sur le registre  les sommes versées aux jurats, gardes, régent, chantre et sonneur de cloches afin de les dédommager lors de la procession de L’Ascension s’effectuant en direction du bois de la même localité. Toujours, en 1694, les mêmes sommes sont reversées pour la procession de la Fête-Dieu.8

     

     

     

                                       

     

     

     

    Références:

     

     

     

    1- Bluche François, La vie quotidienne  au temps de Louis XVI, Hachette littéraire, 1980, p 178.

     

    2- Lebrun François, Histoire de la vie privé, de la Renaissance aux Lumières, Editions Seuil, 1986,   tome  3, p. 90.

     

    3- Desplat Christian, Pau et le Béarn au XVIIIe, thèse doctorat Pau, collection « Terres et Hommes du Sud », tome 2, 1992, p.1161.

     

    4- Desplat Christian, La Principauté de Béarn, Société Nouvelle d’Editions Régionales et de Diffusion,  Pau, 1980, p.339.

     

    5- Laborde J.B. abbé, la Compagnie de Messieurs les Pénitents Bleus de la ville de Pau (1635- 1799), Bull.SSLA, 2e série tome 40, 1912-1913, p. 8 à 10, 14, 16, 27-28.

     

        Voir aussi: article intitulé « Chapelle des pénitents bleus » de Cécile Devos tiré de l’ « Atlas historique des villes de France », p.128.

     

    6-  A. C. de Pau, GG 207-GG 209      

     

    7- Desplat Christian, Pau et le Béarn au XVIIIe, op.cit., p. 1161 à 1173.

     

    8- Loubergé J., Quelques aspects de la vie à Gélos dans les siècles passés, Revue de Pau et du   Béarn, n°15, 1988, p.69.

     

     

     

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     PAROISSE, PREAMBULE

     

     

         La paroisse est la cellule de base de la vie religieuse, de la communauté des fidèles, ceci depuis le concile du Latran (1215).

    On en décompte approximativement 35 000 à 40 000 en France au XVIIIe siècle. Elle correspond à la subdivision d’un évêché et donc à l’élément de base  de l’organisation de l’Eglise. Si tout individu est capable de nommer la paroisse où il habite ce n’est pas toujours le cas en ce qui concerne les autres circonscriptions comme le baillage, la sénéchaussée.

    Cette sensation d’appartenir à la même communauté entraîne malheureusement parfois un sentiment d’exclusion vis-à-vis de ceux que l’on considère comme des étrangers , le horsain.

     

    En 1789, Jean Bonvallet-Desbrosses 1 mentionne que le clergé béarnais, tant séculier que régulier, comprend quatorze cents individus. Il dresse le tableau ci-dessous :

    - Evêques, dignitaires de chapitres, chanoines, prieurs, curés, vicaires… : 800 membres

    - Religieux réguliers : 360 membres

    - Religieuses régulières : 240 membres

     

    Les curés, proprement dits, s’élèvent à trois-cent-quatre-vingt-seize.

     

       La carte de l’organisation de l’Eglise dans le Béarn ne correspond pas exactement avec les frontières politico-administratives de la province. L’Intendant  Pinon 2 précise en 1698  que la majorité des paroisses qui dépendent du diocèse de Lescar s’élèvent à 178 tandis que celles relevant de celui d’Oloron sont de 209.Mais il ajoute que ce dernier « s’étend dans toute la Soule, qui est composé de 64 paroisses ». Pour compliquer le tout, certaines paroisses béarnaises relèvent alors à des  diocèses tels ceux de Dax et de Tarbes. En ce qui concerne celui de Dax quinze paroisses des environs d’Orthez en dépendent, quant au diocèse de Tarbes ce sont vingt et une paroisses du Vic-Bilh et des alentours de Pontacq. Mais selon Christian Desplat  cela n’a guère de conséquences sur la vie religieuse des fidèles, de plus « les quatre évêchés tutélaires, tous bien minces, restèrent suffragants de l’archevêché  d’Auch. » 3

    Selon l’Intendant Pinon  le chapitre d’Oloron, au début du XVIIIe siècle,  est constitué de seize chanoines (prêtres membres d’un conseil de l’évêque qui célèbrent l’office),  d’un archidiacre (administrateur du temporel de l’évêché) désignés par l’évêque et l’assemblée des chanoines et de huit prébendiers. L’évêque d’Oloron, qui réside à Sainte-Marie,  perçoit des revenus relativement peu importants, en 1786 ils s’élèvent à 13 000 livres. A ce montant, il faut ajouter ceux qui sont issus des seigneuries dont ils sont possesseurs et de la dîme. Le poste lui doit l’entrée aux Etats de Béarn.

    L’Intendant Pinon  écrit au début du XVIIIe siècle que le revenu du chapitre monte à 10 000 livres. 1 L’Intendant Lebret, plus tard, mentionne 12 000 livres.

     

    Quant au chapitre de Lescar le même Intendant Pinon   nous apprend qu’il était composé de seize chanoines et de huit prébendiers (ecclésiastique qui prend rang au chœur après les chanoines) et évalue ses revenus à 13 à 14 000 livres. L’Intendant Lebret, plus tard, mentionne 24 000 livres, en rajoutant qu’il était endetté. Il précise aussi qu’il y avait en plus quatre musiciens et trois enfants de chœur. 4 En 1789, ce budget s’élève à 71 880 livres (les dépenses : 88 508 livres). .

    L’évêque est détenteur de plusieurs seigneuries (Bénéjacq, Bordères, Bourdettes…), dix en tout, et plusieurs dîmes, trente-neuf. En comparaison, le budget de l’évêché en 1762 est de 44 891 livres (dépenses : 28 345 livres) alors qu’en 1788 il monte à 46 119 livres (dépenses : 35 785 livres). 5

     

    Si le plus souvent paroisse et communauté coïncident, il arrive qu’une paroisse corresponde à plusieurs communautés, ou, à l’opposé, qu’une seule communauté soit divisée  entre plusieurs paroisses. C’est le cas par exemple des communes de   Lacommande et d’Aubertin qui durant plusieurs siècles ont délégué leur vie religieuse dans une unique paroisse ce qui a  d’ailleurs suscité la saisine d’une requête auprès de la Cour de la part des marguilliers au sujet  des frais engagés par eux  à l’église et  au presbytère en 1783, notamment la refonte de 2 cloches fêlées.Nous sommes le 13 décembre exactement lors de la séance de la communauté de Lacommande  lorsque le conseil prend acte de cette dite saisine. Déjà en procès avec cette communauté, celle d’Aubertin est déléguée par un syndic. Un des membres du conseil est étonné d’apprendre que le budget de la fabrique peut être consacré à cet usage. Il blâme les Aubertins  d’avoir engagé des dépenses, ils n’ont  qu’en assumer les conséquences. Les Lacommandais se sont acquittés de leur quotité. Il est suivi dans son raisonnement par les autres membres de l’assemblée qui optent pour la désignation d’un syndic afin de suivre le procès. Il faudra que l’évêque lors de sa visite tranche l’affaire, il décide que l’on refonde les cloches. Les deux communautés s’inclinent et lors de la délibération datée du 5 avril 1788 elles décrètent que chacune d’entre elles subventionne, pour 7/8 pour Aubertin et 1/8 pour Lacommande. Mais en réalité l’affaire ne s’arrête pas là comme le démontre Jean-Claude Lassègues 6

     

    Cette attitude procédurière se retrouve également dans les relations entretenues par  les conseils de fabrique et les conseils municipaux.

     

         L’édit d’avril 1695 permet aux évêques de créer de nouvelles paroisses.

    Selon le juriste Jousse (conseiller au Présidial d’Orléans) « la marque principale qui caractérise les Paroisses & qui les différencie des autres Eglises, est lorsqu’il y a des Fonts Baptismaux & un Curé qui exerce toutes les fonctions curiales. » 7

    La présence d’un curé est « la marque distinctive d’une paroisse. Il pouvait être soit une personne physique, soit une personne morale, comme un chapitre collégial, appelée alors curé primitif. » 8

    Elle possède ses institutions, son lieu de culte l’église (dont la cloche rythme le temps), son guide religieux le curé qui depuis l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539 et le concile de Trente de 1563 doit tenir le registre des baptêmes – pour contrôler la majorité ou la minorité (article 51), des mariages - afin de surveiller la vacance des bénéfices -  et  des sépultures. Les curés sont obligés de déposer ces registres au greffe du bailli ou du sénéchal royal. Un des canons du Concile de Trente ajoute qu’il faut y adjoindre les noms des parrains et des marraines. L’ordonnance de Blois de 1579 lui succède, imposant que les registres soient déposés au greffe au tribunal royal. De même, le For d’Henri II d’Albret de 1552, institue que les curés tiennent les registres de baptêmes, mariages et décès.

     

    Dans deux délibérations de Nay, datées de 1718 et 1734, on note qu’ils doivent être déposés à l’Hôtel de Ville. Quelques années plus tard, en 1773, une autre délibération fait mention d’un arrêt du parlement de Navarre rappelant que les Corps de Ville de tous les chefs-lieux sont dans l’obligation de remettre « au greffe du bailliage sénéchaussée ou siège royal les registres des baptêmes mariages et sépultures déposés dans leurs archives et ce dans huitaine. » 9

     

    Comme le rappelle François Bluche, un Français lorsqu’il s’agit  de localiser son lieu de résidence  fait référence à la rue et à la paroisse.  S’il a besoin d’un certificat de baptême, il va l’obtenir dans sa paroisse. Même pour l’acquisition d’un poste dans la fonction publique, il lui est nécessaire de se procurer une attestation de communion pascale et, même celui qui cherche à acquérir un office a besoin à la fois du curé pour qu’il lui donne un certificat de catholicité et de deux notables de la paroisse pour une attestation prouvant ses bonnes mœurs. 10  

     

    Ségolène de Dainville-Barbiche mentionne que l’on appelle, en matière financière, « paroisse » ou « collecte » la « circonscription de base pour la répartition et la collecte de la taille » depuis le XIVe siècle. Elle rajoute que la « paroisse fiscale ne recouvrait pas forcément la paroisse ecclésiastique ». 8

    Sous la Révolution, exactement en 1792-1793 - la paroisse en tant que circonscription ecclésiastique et administrative - va laisser la place à la commune. Dans son souci de réorganiser le royaume - Etat, administration -  l’Assemblée nationale constituante subordonne l’Eglise.

    Déjà lors de l’adoption du décret sur la  Constitution civile du clergé du 12 juillet 1790 promulguée le 24 août  il est prescrit dans l’article 15 : « Dans toutes les villes et bourgs qui ne comprendront pas plus de six mille âmes, il n'y aura qu'une seule paroisse ; les autres paroisses seront supprimées et réunies à l’église principale. »

     

    Le nombre des évêchés passe de 134 à 83. Michel Vovelle rappelle que la « carte religieuse se modèle sur la carte administrative : les anciens diocèses sont supprimés, et l’on prévoit un évêque par département ». 11 Ce dernier est alors élu par une assemblée d’électeurs  départementaux au suffrage direct. Le curé est nommé par une assemblée d’électeurs du district au suffrage censitaire (par les citoyens riches). Vu que le patrimoine de l’Eglise est vendu comme bien national depuis les 2 à 4 novembre 1789 et que les redevances ecclésiastiques sont abrogées  il est prévu que les ecclésiastiques reçoivent un traitement de l’Etat.  Celui des évêques s’élève de 12 à 50 000 livres

    En échange, ils doivent prêter serment à la Constitution comme tous les fonctionnaires publics. Ceux qui refuseront, comme le pape qui la condamne comme il rejette la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen,  seront dénommés les prêtres « réfractaires ». De plus, certaines tâches dévolues aux prêtres leur sont enlevées  telles l’éducation et l’assistance.

     

    Sous l’Ancien Régime, les paroisses étaient très diverses ce qui explique que la Révolution va chercher à les uniformiser, et, pour y parvenir va les circonscrire. Le décret du 28 octobre 1790 décide que ceux qui gèrent les biens des fabriques « seront tenus de rendre compte tous les ans en présence du conseil général de la commune, ou de ceux de ses membres qu’il voudra déléguer. » Deux ans plus tard, le 19 août 1792, la loi confirme  que « les revenus des fabriques seront régis et administrés par les officiers municipaux des lieux ». En 1795, une autre loi qui assure la liberté des cultes supprime le budget des paroisses. Démontrant que la séparation  existe entre les paroisses et les communes elle assure que ces dernières ne peuvent pas financer les dépenses des premières.

     

    Ce remplacement de la paroisse par la commune  sera abrogé quelques années plus tard par le Consul Bonaparte  et le pape Pie VII lors du Concordat de 1801.

    L’article  LX : « Il y aura au moins une paroisse dans chaque justice de paix.

    Il sera, en outre, établi autant de succursales que le besoin pourra l’exiger. » 12  

     

    Dans la paroisse plusieurs autorités cohabitent, le seigneur, l’abbé laïque, le curé, le Corps municipal. Chacune d’entre elles cherchent à faire prévaloir leurs droits. 

    Par exemple, à Pontacq, en 1773, l’abbé laïque mécontent que l’on n’ait pas respecté ses privilèges, la préséance  saisit la justice : « La cour de Pau, par acte du 4 août 1773, considérant que Messire Pierre Daniel de Boyrie , Seigneur et Abbé lay de Nousty , Conseiller au Parlement de Navarre, s’est plaint de ce que Jacques Lestorte-Daban et Marie Despiaud, son épouse , ont fait brûler à diverses reprises  et fait des honneurs  sur la tombe de Despiaud , leur beau-père, à l’instigation de parents étrangers, ignorant que de tels honneurs appartiennent seuls à la Maison et famille du Seigneur, leur défend pareils actes ; les constituants reconnaissant leur tort et le droit du Seigneur , s’en excusent implorent grâce , promettant de ne plus recommencer  . »  Ce dit seigneur leur pardonne  mais …se réservant une nouvelle action en cas de récidive et se désistant de l’action déjà intentée… » . 13  

     

     

    Références :  

     

    1- Bonvallet-Desbrosses Jean, Richesses et ressources de la France, Impr. J Jacquez, Lille, 1789.

    2-  Intendant Pinon, Mémoires concernant le Béarn,  BULL.SSLA., 1905, tome 33, 2e  série, p.49.

    3- Desplat Christian, Pau et le Béarn au XVIIIe siècle, tome 1,J & D Editions ,  p . 604.

    4- Intendant Lebret, Mémoires sur le Béarn,  BULL.SSLA., 1905, tome 33, 2e  série, p.73.

    5- A.D.P.A., L. 529.

    6- Lassègues Jean-Claude, Lacommande, de l’Hôpital à la commanderie et au village, Centre généalogique des Pyrénées-Atlantiques, 2012, p.114.

    7-Jousse Daniel , Traité du gouvernement spirituel et temporel des paroisses, chez  Debure Père, Saint Paul, 1769, p. 17.

    8- Ségolène de Dainville-Barbiche, article : paroisse, Dictionnaire de l’Ancien Régime, (dir : Lucien Bely, Editions Puf, 2002.

    9- A.D.P.A., Nay  BB 17, f°20 r°.

    10- Bluche François,  La vie quotidienne  au temps de Louis XVI, Hachette littéraire, 1980, p. 177.

    11- Vovelle Michel, Nouvelle histoire de la France  contemporaine, La chute de la monarchie, Editions Seuil, tome 1,  1999.

    12- Titre IV, section première, ARTICLES ORGANIQUES DE LA CONVENTION DU 26 MESSIDOR AN 9.

    13- A.D.P.A., III  E 5389. 

     

     

     

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